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Sexualité post covid et #MeToo : les Européennes en pleine (r)évolution
Vous avez certainement vu passer plusieurs articles concernant, soit le baby boom probable lié aux divers confinement, soit la baisse de libido qu’ont enduré les couples pendant la pandémie de covid-19. Personnellement, ces articles m’ont rassurée, car ma libido n’a jamais été aussi absente que pendant les confinements successifs qui ont eu lieu en 2020.
Le 3 septembre 2021, l’IFOP (Institut Français d’opinion publique) pour The Poken Compagny, publie une étude menée auprès de 5025 femmes âgées de plus de 18 ans, entre le 1er et le 5 mars 2021, et vivant en Italie, France, Allemagne, Espagne et Royaume-Uni. L’objectif ? Faire un point sur la satisfaction sexuelle des principales concernées, mais aussi sur l’évolution de leurs pratiques. Et ce qu’on y apprend est plutôt rassurant. Décryptage.
La dernière étude avait été menée en 2016. Depuis, #MeToo et le Covid-19 sont passés par là, autant dire que les enjeux sont bien différents concernant les habitudes sexuelles mais aussi la satisfaction des femmes.
(In)Satisfaction et vie sexuelle
Rien de nouveau sous le soleil : 35% des Françaises sont insatisfaites de leur vie sexuelle, quand elles ne sont que 23% en Allemagne. Pourtant, les Frenchies sont aussi celles qui ont le plus de partenaires sexuels dans leur vie, avec une moyenne de 20, contre 16 en Allemagne, 9 en Italie, et 13 en Espagne.
Les femmes européennes ont aussi moins de rapports sexuels qu’en 2016 : la proportion de femmes ayant une vie sexuelle inactive est passée de 32 à 37 avec cette nouvelle étude. À la question posée : « Combien, approximativement, avez-vous eu de rapports sexuels au cours des quatre dernières semaines ? », 37% des Européennes sondées répondent “Aucun”, et 27% affirment “Moins d’un par semaine”.
On avait d’ailleurs déjà soulevé cette question en compagnie d’Ovidie en février 2021 à l’occasion de la diffusion de sa mini série « Libres ! » sur Arte. Elle nous confiait : « Le chiffre qui me fait le plus halluciner de tous, c’est la fréquence des rapports. Mais honnêtement : qui baise 2,5 fois par semaine ?! ».
La pandémie s’est évidemment invitée dans le lit (ou autre endroit de votre choix) des couples : les confinements n’ont certainement pas aidé à avoir des rapports sexuels, même si, selon les derniers chiffres de l’INED parus en 2017, plus de 15 millions de Françaises vivent en couple. Il y a fort à parier que le confinement a plutôt eu tendance à mettre notre libido en berne. Mélie le confirme lors d’un sondage effectué sur mon compte Instagram : « Je pense que le fait d’être 24H/24 avec la personne n’aide pas. Il n’y a plus ce côté sympa de se retrouver le soir après avoir fait chacun ses activités ». Sophie renchérit : « On est toujours ensemble, on passe notre vie en jogging. Bref, on a l’impression d’être dans une boîte où l’histoire se répète à l’infini. Ça rend fou, ça manque de piment ».
Côté inactivité, les Françaises remportent la palme : elles sont 41% à avoir répondu qu’elles n’avaient eu aucun rapport sexuel dans le dernier mois. C’est 10% de plus que les résultats énoncés lors de l’étude de 2016. Selon François Kraus, Directeur du Pôle Politique / Actualités à l’Ifop, si le confinement explique indéniablement les chiffres (l’étude a été menée en mars 2021, je le rappelle), il faudrait voir si d’autres facteurs n’entrent pas aussi en ligne de compte, comme les réflexions sur le consentement, l’écoute de son corps, le temps passé sur les écrans, ou la fin de la pression sociale liée à l’activité sexuelle. Quoi qu’il en soit, je suis ravie de lire ce chiffre : il permet de déculpabiliser. Non, avoir des rapports sexuels quotidiens n’est pas la norme, même en couple !
Evolution des pratiques
Concernant les pratiques bucco-génitales et anales, qui sont les deux focus principaux de l’étude, les évolutions sont parlantes : si, en 2016, 46% des femmes sondées avaient déjà avalé le sperme de leur partenaire, elles ne sont plus que 40% à l’heure actuelle. Chez les Françaises, le chiffre est d’ailleurs passé de 52% à 45%. De même, si 31% des européennes avaient autorisé leur partenaire à éjaculer sur leur visage en 2016, elles ne sont plus que 26% en 2021.
Des chiffres encore plus mouvants quand on parle de la bifle : 22% des femmes interrogées en 2021 la pratiquent, contre 32% en 2016.
Des changements qui en disent long : les pratiques abordées dans l’étude sont généralement liées à des désirs de possession, voire attribuées à des actes de soumission de la partenaire envers son compagnon. De manière générale, il semblerait que les pratiques bucco-génitales perdent en popularité, en particulier du côté des Françaises : si la pratique de la fellation ne faisait qu’évoluer depuis 1970, elle baisse depuis 2021 !
Je me suis demandé ce que ces chiffres pouvaient bien signifier et j’ai interrogé mes abonné.e.s sur Instagram sur ce que #MeToo et les 5 dernières années de réflexions avaient provoqué chez elles. « Je suis plus à l’écoute de mon corps » ; « J’ai tout simplement découvert le consentement ! » ; « Je m’énerve beaucoup plus quand un mec insiste, je pose mes limites » ; « #MeToo m’a éveillé au féminisme » ; « Depuis #MeToo, j’ose exprimer mon non-consentement, alors que je n’osais pas avant ».
La question du consentement, qui est sur toutes les lèvres (petites et grandes) depuis 2017, mais aussi la libération de la parole ont permis à de nombreuses femmes de prendre confiance en elles et de faire part de leurs désirs et de leurs limites. Avoir accès à ces chiffres permet de se rendre compte que le fait de parler publiquement, de réfléchir d’un point de vue sociétal et systémique aux combats féministes qui sont menés façonnent notre société et modifient nos manières de vivre ! Tant mieux.
Par ailleurs, l’étude émet aussi quelques hypothèses sur le sujet : « L’enquête montre bien une tendance générale à une autonomie sexuelle croissante des Européennes sous l’effet d’un changement des représentations culturelles et des discours publics sur le sujet qui ne sont pas sans effet sur le contenu même de leur répertoire sexuel ». Rien d’étonnant là-dedans : combien sommes-nous à être mal à l’aise devant le porno mainstream, qui use et abuse allègrement des éjaculations faciales et autres pratiques comme moyen de soumission des femmes à un homme, qui ne pense souvent qu’à son propre plaisir !?
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Du côté des pratiques anales, la tendance est toute autre, et là j’avoue avoie été hyper surprise ! En effet, la pratique de la sodomie augmente chez les Européennes : si elles étaient 40% a l’avoir pratiqué en 2016, elles sont aujourd’hui 44%. Les Françaises sont les plus adeptes de cette pratique en Europe, 51% d’entre elles l’ont déjà pratiqué, un chiffre en augmentation de 4 points par rapport à 2016.
Ce qui est également significatif, c’est le profil des femmes qui pratiquent l’anal : ce sont celles qui ont un grand nombre de partenaires sexuels au cours de leur vie, celles aussi qui se masturbent tous les jours ou presque, et qui ont une activité sexuelle régulière.
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Bien que l’étude ne propose pas d’interprétation de ces chiffres, je me permets de vous livrer ma vision des choses… Dans l’étude, j’ai remarqué une corrélation entre liberté sexuelle, connaissance de son corps, de son plaisir, et pratique de la sodomie. Rien d’étonnant, quand depuis le mouvement #MeToo, les contenus sexos sur les réseaux sociaux, mais aussi les articles liés au plaisir féminin se font quotidien ou presque. La notion de consentement n’est pas un frein aux pratiques sexuelles variées, comme le martèlent plein d’anti-féministes qui nous répètent que ce n’est pas sexy de devoir toujours s’assurer que la personne est d’accord… 🤬 Visiblement, ça n’empêche pas la créativité, et c’est tant mieux !
Toujours est-il que nous affirmons plus notre consentement, notre non-consentement, et que nous apprenons à découvrir ce qui nous plaît : voilà ce que montre en partie cette étude qui tombe à pic.