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Gossip Girl 3.0 : ça passe ou ça casse ?

Indice : ce n’est pas un fiasco (étrangement).

Par
Malia Kounkou
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Ce n’est pas que je suis fan de Gossip Girl. C’est que j’ai mémorisé la seconde saison par coeur, lu l’intégralité des dix-sept tomes originaux et acheté une figurine Funko Pop de Blair Waldorf qui me juge nuit et jour depuis le perchoir de mon bureau. Alors en entendant que HBO s’apprêtait à sortir un Gossip Girl 3.0 avec casting, scénario et garde-robe renouvelés… je n’ai pas pu m’empêcher d’être mitigée.

Réadapter d’anciens succès du petit écran, comme cela s’est fait plus tôt dans l’année avec Friends, peut être un pari ambitieux, voire complètement casse-cou. La résurrection ratée de Arrested Development sur Netflix ne l’a que trop bien illustré. Sans compter que la première bande-annonce HBO, un mois plus tôt, ne m’avait vraiment pas rassurée. Mais une critique sans argument restant malgré tout infondée, j’ai quand même décidé d’attendre la sortie officielle de l’épisode pour mesurer les dégâts, règle en main.

Et à ma grande surprise : ce n’était vraiment pas si mauvais.

En contrepartie, le caractère invraisemblable du concept de Gossip Girl en lui-même n’est rendu que plus visible.

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Plot-twist : Gossip Girl apparaît

Grande première! Dès le quart de l’épisode pilote, l’identité de la reine masquée des potins est révélée au téléspectateur. Ce dernier est même mis au courant de ses motivations, de ses états d’âmes et de son mode d’opération à l’ère des réseaux sociaux. Plus besoin d’attendre sept saisons pour découvrir qu’un Dan Humphrey se cachait derrière un blog, cette fois-ci.

Un tel changement d’angle est rafraîchissant, il faut l’admettre. Cela nous permet d’être au coeur de l’action plutôt qu’en périphérie et d’observer les rouages internes d’une machine que la version précédente ne nous montrait que de l’extérieur.

En contrepartie, le caractère invraisemblable du concept de Gossip Girl en lui-même n’est rendu que plus visible. Car, très honnêtement, qui a le temps de fliquer une bande d’ados huit jours sur sept, de trier le vrai potin du faux dans ses messageries pleines à craquer et de penser à des tournures de phrases assassines à mettre en légende de publication, le tout sans être payé ? Personne, et c’est bien pour cela que la fiction existe.

Adieu blog poussiéreux et portables coulissants! Tout l’Upper East Side est à la mode de Steve Jobs, maintenant, et leur terrain de jeu a migré vers Instagram et Twitter.

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Entre tradition et modernité

Sans surprise, les références au Gossip Girl original abondent dans cet épisode pilote. Mais loin d’être pesantes, elles offrent un parfait équilibre entre hommage et fan service obligatoire. Ainsi, la première scène introduisant le personnage de Kate en fera sourire plus d’un par son flagrant clin d’oeil à la scène d’apparition de Serena, du décor de gare au petit foulard noué autour du cou. D’autres callbacks plus directs mentionneront les noms de Nate, Blair et — immanquablement — Chuck.

Mais loin de ne vivre que dans son passé, la série trouve sa fraîcheur dans un ancrage très actuel. Adieu blog poussiéreux et portables coulissants! Tout l’Upper East Side est à la mode de Steve Jobs, maintenant, et leur terrain de jeu a migré vers Instagram et Twitter. La mode a également changé — les serre-têtes sont à présent has-been, sacrilège! —, l’ancienne Gossip Girl est décrite comme «pré-cancel culture» par Kate, les personnages regardent Succession et ne se gênent pas pour (gentiment) tacler Olivia Jade. Côté chronologie, la mention d’une quarantaine au détour d’une réplique situe l’histoire au lendemain de l’ère covid.

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La diversité reste la plus grande nouveauté apportée par ce reboot, cependant. La trame s’axe autour de Julien et Zoya, deux jeunes filles afro-américaines, dont le groupe d’amis se compose, entre autres, d’un homme ouvertement bisexuel (Max), d’un peut-être-mais-pas-sûr-encore couple polyamoureux (Aki, Audrey et Max) et d’une troisième femme afro-américaine s’identifiant comme lesbienne (Monet). Sans oublier Luna, dont le personnage est porté à l’écran par l’actrice trans brésilienne Zión Moreno. Dans le tableau de la représentation, avouez que cela coche pas mal de cases.

Je-m’en-foutisme? Check. Moue arrogante? Check. Hédonisme olympique? Triple check.

Copier sans forcément coller

Face à ce nouveau casting, les comparaisons avec l’ancien sont inévitables.

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Vendue comme la nouvelle «Queen B», Julien ne partage avec son aînée que le statut de cheffe de clique et la popularité incontestable. Du reste, ni la prestance ni la répartie propre à Blair ne se retrouvent en elle. Fait plus étonnant : ces deux qualités semblent être portée par Monet, l’une de ses sbires, dont le niveau de mesquinerie laisse promettre de beaux rebondissements futurs.

Quant à Chuck Bass, sa relève semble être assurée en la personne de Max Wolfe qui l’émule à la perfection. Je-m’en-foutisme? Check. Moue arrogante? Check. Hédonisme olympique? Triple check. Ne reste plus que la panoplie de costumes multicolores pour que le tableau soit complet. Et pour parfaire le tout, l’un de ses meilleurs amis semble être le double parfait de Nate Archibald. Un peu sympa, un peu mou, riche (mais pas qu’un peu), j’ai nommé : Obie Bergmann IV. Pas III, ni V.

La dernière similarité se voit en Zoya qui, manifestement, est la nouvelle Jenny du groupe. Mais s’il a fallu à la cadette des Humphrey quelques saisons pour cultiver son assurance et son esprit combatif, Zoya paraît détenir ces capacités dès le premiers épisodes. Les premières étincelles risquent de survenir bien plus tôt, cette fois-ci.

Gossip Girl est une célébration de l’extraordinaire qui ne peut aboutir si ses invités d’honneur ne jouent pas le jeu.

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Acting 101

Préfaçons cette dernière section par cette phrase : j’ai bien conscience qu’une partie du cast n’a pas un long CV télévisuel, voire même aucun pour Evan Mock qui porte Aki à l’écran. Mais le jeu d’acteur est par moment une vraie souffrance à endurer, et ce pour deux raisons.

Une petite mais considérable portion des acteurs ne vendent pas l’extravagance qu’ils sont censés véhiculer. En voyant Julien parler, j’ai l’impression d’entendre une actrice réciter ses lignes plutôt que la célébrité locales des marches du Metropolitan Muséum. En les voyant interagir tous ensemble, je vois des collègues de bureau plutôt qu’un groupe soudé depuis l’enfance autour duquel toute la Gen-Z new-yorkaise dorée gravite. Gossip Girl est une célébration de l’extraordinaire qui ne peut aboutir si ses invités d’honneur ne jouent pas le jeu.

Enfin, ce reboot a réellement du potentiel. Les trames naissantes possèdent ce qu’il faut pour porter l’histoire loin, les personnages encore en surface laissent malgré tout entrevoir une certaine profondeur et certaines séries prennent parfois du temps avant de trouver le rythme parfait. Espérons que pour ce Gossip Girl 3.0, ce soit le cas.

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