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Allez, encore un acteur qui s’invite dans le monde des plateformes de streaming à grand coup de contenu exclusif. Sauf que celui-ci ne vous demande pas 9,99 euros par mois. Ni 4,99. Ni même un paiement à l’année, et encore moins votre mail. Pluto TV est gratuit, sans inscription. Alors, où est le loup ? Nulle part, et c’est ça qui est intéressant.
Pluto TV est lancée par ViacomCBS, et existe depuis 2014 dans plusieurs pays. Aujourd’hui, c’est le marché français qui intéresse le groupe, propriétaire de CBS ou Showtime aux Etats-Unis. Depuis plusieurs années, le groupe a créé ou racheté des chaînes, à commencer par le groupe MTV et ses chaînes (MTV, BET, GameOne), ainsi que Paramount Channel ou la chaîne d’animés J-One. Et l’année dernière, devant la demande publicitaire liée à ce marché, elle avait lancé la version française de Comedy Central, qui rediffuse en boucle How I Met Your Mother et The Big Bang Theory.
Mais cela prouve une ambition qui pourrait bien être intéressante pour les consommateurs. Aujourd’hui, chaque grand groupe de médias lance sa plateforme de contenus exclusifs (Warner avec HBOmax, Universal avec Peacock, Disney avec Disney+, et j’en passe). Le groupe Viacom, avec Paramount, possède également son studio de cinéma, et des chaînes. Et renforcer Pluto TV, c’est une manière d’annoncer aux autres qu’ils pourraient ne plus trouver leurs contenus sur un streamer qui n’y mettrait pas le prix (coucou Netflix). Avec l’ambition d’être un gros du streaming ? Pas sûr.
On y trouve quoi ? Eh bien des chaînes entièrement consacrées à Bob L’Eponge, Tortues Ninja, Louis La Brocante ou Plus Belle La vie. Oui, vous avez bien lu.
La direction générale du ViacomCBS France l’a annoncé : PlutoTV est un hybride, un complément entre la TV et le Web. Et pour cause : ce sont actuellement 40 chaînes en linéaire qui sont proposées, autour du cinéma, du divertissement, de la jeunesse, de la comédie ou du gaming. Et un service à la demande qui compile le meilleur de tout ça. Gratuit ? Oui car le tout est financé par la diffusion de publicité, comme sur une chaîne TV classique. Le service est dispo via Web et appli, et devrait arriver sur les télés connectées. Bon ok, tout ça c’est bien, mais on y trouve quoi ? Eh bien des chaînes entièrement consacrées à Bob L’Eponge, Tortues Ninja, Louis La Brocante ou Plus Belle La vie. Oui, vous avez bien lu. Une chaîne Louis La Brocante, puisque le groupe a racheté les productions de séries françaises comme celles-ci et Sœur Therese.com ou Femmes de Loi, Les Cordier. Côté jeunesse c’est fourni aussi, avec iCarly ou Dora, tirées du catalogue Nickelodeon, toujours propriété du groupe. Et des programmes MTV comme Pimp My Ride ou Catfish. Bref, on va être honnête : ça vaut vachement plus le coup que Salto, sorti il y a quelques mois et payant.
Et surtout, c’est plus logique de proposer des programmes pour les plus vieux (Louis la Brocante et autres séries françaises ainsi que Telenovelas) et programmes pour les plus jeunes (MTV, Comedy Central) de cette qualité… gratuitement. Qui ça intéresse de payer pour voir les rediffs d’Affaire Conclue ? Mamie ne le fera pas. Et les jeunes, biberonnés au gratuit via Youtube, ne paieront pas pour voir des rediffs de Game One, donc c’est malin. Ça attire du public, et donc le marché publicitaire qui va avec. Alors bien sûr, vous n’allez pas passer votre vie devant Pluto, car ce ne sont pas les derniers films récents, ni les séries les plus « In ». Mais, vous passerez du bon temps « plaisir coupable » devant les programmes, et à consommer n’importe où. J’imagine déjà mon voisin de métro mater Les Cordier sur son smartphone. Personne n’est oublié dans l’offre, avec des chaînes également consacrées aux arts de vivre, aux documentaires, et un total de 60 chaînes prévues d’ici juin, dont des éphémères.
Un mélange malin entre TV et Web, un hybride qui ne rebutera aucune génération.
Pluto réussit sûrement là où les autres se plantent. Prenons Rakuten TV, qui devait concurrencer Amazon. Vous connaissez vraiment ? Non. Les programmes diffusés dessus ne sont pas foufous, voire souvent fond de catalogue. Et pourtant, c’est fourni sur quasiment toutes les TV connectées, et personne n’y va. Alors déjà, c’est mieux. En plus, c’est un mélange malin entre TV et Web, un hybride qui ne rebutera aucune génération. Contrairement à Salto, ça ne pète pas plus haut que son cul pour des rediffusions de programmes non exclusifs. Et puis, c’est peut-être un moyen intelligent d’entrer dans le secteur, en proposant une offre d’abord gratuite, puis de proposer d’ici quelques mois un supplément payant pour accéder à des offres aux contenus plus premium de la marque.
C’est aussi une manière de valoriser un catalogue de productions. Revoir les Retro Game One animés par Marcus sur une chaîne dédiée. Les Takeshi’s Castle qui ont fait les beaux jours de Menu W9. Caler les enfants devant Hé Arnold, en jetant un œil avec eux par nostalgie. Avec le nombre de chaînes proposées et l’interface très simple et accessible, vous allez forcément zapper, chercher un programme et trouver de quoi rester scotché, par nostalgie, curiosité ou ennui. Et il ne faut pas oublier que l’ennui est un très bon facteur pour l’audience télé. Les noms de chaînes sont clairs, efficaces. L’habillage est agréable. Bref, ça n’a pas à rougir face aux packs de Discovery en France, ou d’autres acteurs qui ne sont pas toujours au premier plan du contenu télévisuel (on pense à Canal ou consorts). Le gros bémol du bouquet, c’est l’offre de films. On est vraiment sur des films de samedi après-midi, à quelques exceptions près. Au lancement, le 8 février, seul Papillon avec Steve McQueen peut vraiment être déclaré comme gros film, dans l’offre VOD.
Et puis franchement, du Louis La Brocante 24 heures sur 24… Qui peut dire non ?
PlutoTV montre l’ambition d’un groupe qui a décidé de jouer dans la cour des plus grands dans les prochaines années. D’un groupe qui a réfléchi avant de lancer son offre, et qui ne lance pas des chaînes éphémères juste pour justifier le contrat de travail de certains de ses animateurs (coucou France Télévisions avec CultureBox). Bref, ça casse pas trois pattes à un canard, mais ça a le gros avantage de ne pas nous prendre pour des pigeons, dans une période où les MegaCorps visent nos porte-monnaies avant de lancer du contenu prévu pour leurs chaînes, à l’image de HBOmax, four monumental qui ne doit sa survie actuelle qu’à l’ajout des films cinéma de l’année 2021 dans son offre. Alors bien sûr, lancer cette offre dans un contexte où le marché publicitaire est au plus bas c’est couillu, et Pluto pourrait ne pas y survivre dans quelques mois, mais donnez sa chance au produit, vous verrez que vous ne le regretterez pas. Et puis franchement, du Louis La Brocante 24 heures sur 24… Qui peut dire non ?