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La grosse bêtise d’Anna : « Le charbon vole et s’éclate en mille morceaux sur le parquet »
C’est reparti ! Les histoires incroyables sont de retour. Cette fois, c’est Anna*, 28 ans, qui nous raconte sa plus grosse bêtise d’ado…
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C’était en 2008. J’avais 14 ans. Mes parents m’annoncent partir à Stockholm pour un week-end de trois jours. Ils me vendent cette escapade comme l’occasion de me laisser exceptionnellement dormir chez des copines – ce droit avait été abrogé en 2004, après plusieurs pyjamas party soldées par des nuits blanches et de multiples plaintes de tapage nocturne par différents parents organisateurs…
Nous n’avons qu’une seule consigne avec ma grande sœur (17 ans) : « Personne à la maison ». Penses-tu. C’est très gentil de nous offrir ces deux jours de trêve, mais nous penchons toutes les deux plutôt pour l’option soirée clandestine. Les invitations sont très vite lancées : samedi soir, sauterie à la maison.
« NOUS AVONS L’IMPRESSION D’ÊTRE LES PLUS MALIGNES DU MONDE »
Le jour J arrive. Les parents partis, nous réfléchissons à l’agencement de nos soirées respectives. De mon côté, je vais inaugurer ce qu’on appelle « la pièce du haut », un salon télé récemment refait à neuf, à base de parquet en chêne, meubles majestueux en pin et canapé d’angle en cuir beige. Ma sœur, elle, squatte le salon principal.
20h-21h, comme convenu, nos amis arrivent. Les miens montent directement là-haut. On boit nos premières bières (de la despé) et nos premiers cocktails fluo (des trucs infâmes à base de manzana à la pomme ou de martini-coco). On décide aussi de faire une chicha. Sympa, ma sœur nous prête la sienne. On pose la chicha sur la table (sous un torchon pour la protéger), on met le tabac (un truc dégueu à la framboise), on allume le tout et on commence à fumer. Ça tousse pas mal, mais on se marre bien !
« JE CRIE À LA PANIQUE GÉNÉRALE ! »
Bref, RAS, la soirée suit son cours. Jusqu’à un moment donné où je me rends compte que la chicha ne « tire » plus aussi bien. L’explication ? Il n’y a plus de charbon au-dessus du narguilé (alors qu’on vient pourtant tout juste de le changer). Je commence à baliser, je le cherche partout, quand je me rends compte qu’il est tombé, qu’il a complètement brûlé le chiffon et qu’il est en train de faire un énorme trou en plein milieu de la table en bois.
Je crie à la panique générale ! Tous mes potes essaient tant bien que mal de récupérer le morceau de charbon en faisant bien attention à ne pas le casser pour qu’il ne fasse pas davantage de dégâts. On fait attention aussi à ne pas nous brûler. Sauf que dans un mouvement de panique – encore aujourd’hui j’aurais du mal à décrire ce qu’il s’est passé à cet instant – le truc vole et s’éclate en mille morceaux sur le parquet.
Putain, putain, putain ! Vite vite, on récupère immédiatement les débris de charbon encore allumés. Sauf que c’est déjà trop tard, le parquet est partiellement brûlé à plusieurs endroits et la table en bois trouée… Je suis en larmes. Je sais que je vais me faire trucider. Zigouiller. Massacrer. Cette table, c’est vraiment leur bébé – elle coûte les yeux de la tête. Sans compter le parquet quasi neuf…
23h, ça dégénère. On cherche tous un coupable à cet accident. On s’engueule tous. La fête est finie.
« ÇA NE VA PAS FAIRE DE MIRACLES »
Je pleure toute la nuit. Zigouiller, je vais me faire. Le matin à la première heure, les yeux gonflés, je débarque avec toutes mes économies chez un ébéniste qui travaille dans le village où j’habite. J’ai racketté mes potes présents à la soirée aussi. Mon budget avoisine la centaine d’euros. Je lui fais le topo : la chicha, le charbon, le parquet, la table, les parents qui rentrent lundi, les larmes, le futur massacre, mes 100 euros.
Sympa, il me suit jusque chez moi pour constater les dégâts. Verdict : il va pouvoir faire quelque chose pour la table (boucher le trou avec un genre de pâte et foncer les coins pour que ça se confonde avec le bois). Il y aura une trace mais rien à voir avec l’énorme trou qui y figure actuellement. Méga sympa, il me promet de finir le job avant leur retour de Stockholm pour la modique somme que je lui ai apportée.
Pour le parquet en revanche, il est catégorique : c’est mort, il n’a pas de solution. Il me file vite fait un genre de « crème pour parquet », mais me prévient : « ça ne va pas faire de miracles ». Et ça n’en a pas fait.
« COMMENT AI-JE PU PENSER UNE SEULE SECONDE QU’IL N’Y VERRAIT QUE DU FEU ? »
J-1 avant le retour des parents. L’ébéniste a fini de bosser sur la table. Il a fait un super boulot. C’est exactement ce qu’il m’avait vendu : il y a une trace mais plus de trou. Je croise les doigts pour que mes parents n’y voient que du feu… Je pose des magazines et une boîte de mouchoirs sur la table et je prie.
À cet instant je n’ai qu’une seule certitude : de toute façon, je n’avouerai jamais mon crime. Impossible, impossible, impossible. Je prépare un scénario dans ma tête au cas où ils remarqueraient le parquet. Le pitch : « j’ai fait des nuggets, je suis montée dans “la pièce du haut” avec la poêle, l’huile chaude est tombée sur le sol et l’a brûlé à plusieurs endroits ». Dans ma tête, c’est carrément plausible.
Ils rentrent. Je sens mon cœur qui va exploser tellement il bat fort. « Alors, euh, c’était bien ? ». Tu parles. Je n’écoute même pas la réponse, juste je les observe et je prie. Ils vont dans le salon, dans la cuisine, rien. Pitié, pitié, pitié. Et puis mon père se décide à aller dans « la pièce du haut ». Et c’est le drame. Je l’entends hurler. Comment ai-je pu penser une seule seconde qu’il n’y verrait que du feu ? On monte les escaliers quatre à quatre avec ma sœur. Là tout va très vite. C’est le parquet. Il a capté le parquet. Ma mère débarque en furie également. Premier imprévu : ils pensent que c’est ma sœur (c’était plutôt elle madame bêtise d’habitude), du coup je vais devoir me dénoncer.
Je prends donc mon courage à deux mains et je plaide coupable. Mon père se poste à cinq centimètres de mon visage et me hurle dessus : « QU’EST-CE QUI S’EST PASSÉ ? ». Je suis tétanisée. Je ne pipe pas mot. Il continue à gueuler – à un centimètre cette fois – « QU’EST-CE QUI S’EST PASSÉ ? ». Je vais me faire pipi dessus. « QU’EST-CE QUI S’EST PASSÉ ? », il beugle. Je suis en larmes. Je lui bredouille mon histoire de nuggets et d’huile… Son regard devient encore plus noir. Il va me transformer en charpie. Il prend une grande inspiration et hurle: « CHRIS (ma mère), VA ME FAIRE CHAUFFER UNE POÊLE D’HUILE ON VA LA RENVERSER SUR LE PARQUET VOIR SI ÇA FAIT PAREIL ». Oups. Deuxième imprévu. Je ne l’avais pas vu venir celle-là.
Ensuite, il fait voler les magazines et la boîte de mouchoirs posés sur la table et se retrouve nez à nez avec la trace. Je suis foutue. Il se retourne vers moi – toujours vraiment loin d’avoir retrouvé sa paix intérieure – et hurle de nouveau : « QU’EST-CE QUI S’EST PASSÉ ? ». Bon, pas le choix, j’avoue tout. La soirée, la chicha, le charbon, le parquet, la table… Comme convenu, je me fais hacher menu-menu. Mais croyez-moi, on ne m’y reprendra plus. La punition a été pour le moins efficace : jamais refait de soirée chez eux et jamais retiré sur un narguilé depuis…
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Si vous aussi avez vécu une histoire incroyable, qu’il s’agisse d’un braquage sanguinolent (mais qui finit bien), d’un voyage complètement loufoque, d’une histoire un poil honteuse ou comme Anne, d’une grosse bêtise d’ado, n’hésitez pas à nous écrire à [email protected] (à l’attention d’Anne-Laure Mignon). Nous nous ferons une joie de la retranscrire – avec humour – dans nos colonnes.
*Le prénom a été modifié