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Avec Muséosonic, l’électro résonne au-delà des frontières de l’art

L'artiste French 79 a participé à la première initiative du genre à Marseille.

Par
Romain Amichaud
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Réinventer les musées. L’idée trottait déjà dans la tête des spécialistes du milieu avant la pandémie. Leur fermeture a accéléré la réflexion et a parfois poussé à l’action. C’est notamment le cas dans la cité phocéenne qui peut se targuer d’avoir vu naître le projet Muséosonic : de la musique électro et des oeuvres d’art. Et qui de mieux placé que French 79 pour amorcer ce dialogue ? Personne.

Simon (French 79) a parfaitement joué la partition de ce projet en faisant vibrer son ensorcelant morceau Quartz dans un lieu méconnu de Marseille et surtout interdit au public : la Conservation du Patrimoine des Musées. Moment culte.

Nicolas Misery, adjoint au directeur des Musées de Marseille et fier co-responsable de l’initiative, évoque cette première collaboration comme un projet né sur un coin de table, avec une liberté d’imagination totale. « Je me suis autorisé à donner des noms d’artistes que je trouvais formidables, et le nom de French 79 est arrivé immédiatement. La Coopérative Grand Bonheur a répondu positivement et a dit : « Très bien, on l’appelle, on le fait ! » On l’a amené dans nos réserves. Il a été emballé et inspiré par ce lieu fascinant et mystérieux. »

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Un défi technique

Et c’est tout un défi technique qu’ont dû surmonter les équipes des musées et de tournage. French 79 a d’ailleurs été témoin de cette organisation parfois stressante. « Je me souviens d’un conservateur qui a dû rappeler un technicien à l’ordre, en mode : « Attention, t’as effleuré une toile qui vaut l’équivalent de trois immeubles à Paris ! ». Parmi les oeuvres choisies par l’artiste – aussi peintre à ses heures perdues – figurent celles de Djamel Tatah, Max Ersnt, Jean Dubuffet ou encore de Kazuo Shiraga. Rien que ça.

Inutile de rappeler que Simon adhère totalement à cette idée que les lieux et les œuvres d’art s’ouvrent enfin à tous.tes, ou presque. « Ça amène la culture à celles et ceux qui n’y ont pas forcément accès. Après, ce n’est pas grâce à moi que tous les adolescents vont aller dans les musées ! Mais je trouve ça intelligent de lancer ce genre de démarche. » L’artiste a aussi participé à un live streamé pour le festival Le Bon Air mais ce n’était pas aussi sensationnel que Muséosonic. « Avec des tableaux, c’était beaucoup plus intense. Je dois avouer que les musées de Marseille m’ont aussi mis dans de très bonnes conditions puisqu’ils m’ont laissé choisir la salle et les tableaux que je voulais voir. Avoir accès à une salle normalement fermée au public, c’était super original. Et puis, la peinture et la musique, ça va bien ensemble. »

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Une scène locale foisonnante mise à l’honneur

L’ objectif de Nicolas Misery, de Grand Bonheur et Transfuges était « d’inviter des artistes très différents et de convoquer des univers singuliers à chaque fois ». La 2ème édition qui a eu lieu le 5 mars dernier, était organisé avec un autre groupe marseillais qui a souhaité jouer cette fois-ci dans le Muséum d’Histoire Naturelle. « Le parcours avait été complètement rénové à l’automne dernier mais à cause des confinements successifs, il est encore très peu connu du grand public. Donc c’est Makoto San qui l’électrise, qui l’explore, et qui en donne une première lecture quasiment inédite. »

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La 3ème session aura lieu avec le groupe Minimum Ensemble et interviendra au sein du Musée Grobet-Labadié avec une collection exclusivement privée. Pour les prochaines diffusions, Nicolas Misery souhaite préserver la surprise même s’il a déjà pleins de noms en tête. Kid Francescoli ? Le mystère reste entier.

Un intérêt pour les autres musées de France

Face au succès de Muséosonic, Nicolas Misery ne doute pas que cela fasse des petits à travers l’hexagone, certains de ses homologues s’y intéressent déjà de près. L’initiative devrait se prolonger jusqu’à l’été. « Ça ne veut pas dire qu’à la réouverture, le projet s’arrêtera mais on espère qu’il se poursuivra avec du public cette fois-ci. »

Le musée du 21ème siècle ? « Un lieu de débats, de dialogues, d’échanges et de concertations. » L’adjoint au Musée de Marseille illustre cette vision avec la réussite d’une exposition participative au musée d’Histoire de la ville phocéenne. La prochaine étape à cette intégration du spectacle vivant dans ces lieux serait, selon lui, une implication encore plus active des visiteurs.

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En attendant, on se met déjà à rêver à de futurs set avec Cassie Raptor à Luma Arles ou Laurent Garnier au Louvre-Lens…

Marseille, une exception culturelle solidaire

French 79 observe avec plein d’étoiles dans les yeux le réveil culturel de Marseille depuis quelques années. Surtout après une longue période de politique culturelle plutôt austère, selon ses dires. « Entre artistes qui vivons à Marseille, on se soutient. S’il y a une concurrence, elle est bonne. Je pense que la culture à Marseille est puissante mais elle n’est pas mise en avant dans les médias (ndlr, sauf dans URBANIA). Quand on parle de Marseille, c’est souvent pour les mauvaises choses. Dans la musique, il y a une réelle solidarité. Les festivals font des efforts pour faire toujours jouer des artistes d’ici. Comme le festival Marsatac où ils font un stage spécial pour la scène marseillaise. C’est plutôt une bonne démarche qui crée des liens. »

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Et cela marche puisque French 79 a su “profiter” de la crise pour développer plusieurs collaborations avec d’autres artistes du coin. Notamment un album avec Fred Nevché autour du journal imaginaire de Lou Reed qui va sortir le 30 avril. Il est aussi en train de travailler un morceau avec N’to, un autre artiste phocéen qui a le vent en poupe. Notez bien son nom.

Mais il n’oublie pas non plus ses amis Djs qui n’ont pas de revenus de la SACEM, et pour qui les fins de mois sont très difficiles. Sans parler des salles de concert en difficulté. En attendant des jours meilleurs, la musique adoucit toujours les moeurs…