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La fête des pères approche, tellement vite que j’ai bien failli l’oublier. Pour la fête des mères, j’ai été gâtée, mes enfants chéries m’ont récité de doux poèmes et ont déposé sur mon lit à mon réveil (qui s’est résumé en un cri perçant de ma fille de cinq ans à 7 heures du matin, bien trop tôt si vous voulez mon avis) des cartes pleines de cœurs. Ouais, c’est trop mignon. Comme chaque année, le « débat » des modernes contre les anciens sur le thème « et si on faisait une fête des gens qu’on aime à la place ? » a animé les discussions sur les réseaux sociaux. Si vous voulez encore une fois mon avis : les anciens ont tort, ils ne vont pas regretter la fête des mères mais ils ont juste peur qu’on remette en cause leur petit mode de vie.
Heureusement, le débat est monté d’un cran, en intelligence et en pertinence avec cette tribune appelant à une journée pour les droit des mères et des parents issu.es des minorités et je trouve que la fête des pères est une bonne occasion d’en parler (et pas du tout parce que je n’ai pas pris le temps avant). Le texte, complet, inclusif, engagé, signé par des militant.es, auteurices comme la Docteur en anthropologie Mounia El Kohtni ; Daisy Letourneur, autrice et mère trans ; Elena Chamorro, mère handi, co-fondatrice du CLHEE et enseignante ; Johanna Luyssen journaliste et autrice, entre autres, demande que la fête des mères ne soit plus l’occasion d’offrir un bouquet ou un aspirateur (ne faites jamais ça) à nos mômans, mais celle de donner aux mères et aux parents issus des minorités de genre, « non liés par le schéma normatif de la famille », de la visibilité et de défendre leurs droits. De parler des violences gynécologiques, de la PMA, de l’IVG, de l’allaitement, du handicap, du post-partum, de la discrimination à l’embauche. Entre autres. Être parent est un sujet éminemment politique, c’est un peu plus qu’une fête commerciale. Pour la fête des pères, je propose donc que la tribune soit largement rediffusée, en particulier auprès, vous l’aurez deviné, des pères. Elle mérite d’être encadrée, mettez vos mômes à contribution d’ailleurs, ils peuvent coller des coquillettes tout autour. Cela ferait un formidable cadeau.
C’est une suggestion de cadeau, la première, car si vous êtes à court d’idées à quelques jours de l’événement, en voici d’autres, et uniquement des ouvrages pour éclairer le cerveau de votre papa ou de votre co-parent. Je conçois que mes idées pourraient vaguement avoir l’air passives-agressives, à première vue et même à la deuxième (warning numéro 1, cette liste n’est pas exhaustive ; warning numéro 2, les féministes pures et dures ne découvriront rien ; warning numéro 3 : vous ne serez pas forcément d’accord)
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Catégorie « la base »
Ne suis-je pas une femme ?, de bell hooks, décédée en 2021, théoricienne de l’afro-féminisme. Moi les hommes je les déteste, de Pauline Harmange (comme ça se lit vite et bien, ajoutez Avortée, une histoire intime de l’IVG et son roman Aux endroits brisés). Le court et clair Dix questions sur le féminisme, de Valérie Ray-Robert (qui vient également de sortir Téléréalité : la fabrique du sexisme). Scum manifesto, de Valére Solanas, qui ne cesse de nous surprendre et nous séduire depuis 1967. King Kong théorie, de Virginie Despentes. La romancière et essayiste est sans doute l’un des plus grands esprits français. Pour terminer, je ne veux pas oublier Herstory, histoire(s) des féminismes de Marie Kirschen avec Anne Wanda Gogusey (cœur avec des flammes). Pointu, indispensable, Un féminisme décolonial de Françoise Vergès adopte le point de vue des femmes non-blanches. C’est la fête des pères, mais, sans cynisme, bien au contraire, c’est le moment de lire Si je veux de Johanna Luyssen qui défend les mères célibataires par choix, un livre politique et touchant !
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Catégorie « charge mentale »
T’as pensé à ? de Coline Charpentier, dispo désormais en Poche. Indispensable, à compléter avec les bd d’Emma Fallait demander ou ça se range où ? (entre autres), et bien entendu Libérées de Titiou Lecoq. Pour en savoir plus, Travail invisible, portraits d’une lutte féministe inachevée (livre collectif) soulève plein de bonnes questions. Perso, je vais les offrir aux copains en les mettant dans leurs toilettes où ils se planquent au moment de devoir débarrasser la table.
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Catégorie « repenser l’amour », parce que si vous vous interrogez, peut-être que votre mec aussi, ou votre père (on peut rêver)
Révolution amoureuse, pour en finir avec le mythe de la révolution romantique, de Coral Herrera Gómez (alors je vous raconte ma vie – encore – deux secondes, je l’ai lu en plein questionnement sur ce qu’est le couple, ça ouvre plein de perspectives). Puisqu’on est sur les relations hétéros, il y a bien sûr Réinventer l’amour de Mona Chollet qui est une bonne base mais on peut aussi offrir (même carrément) Sortir de l’hétérosexualité de Juliet Drouart. Comme les podcasts sont géniaux, offrez à tout le monde Le cœur sur la table : pour une révolution romantique de Victoire Tuaillon que l’on connaissait aussi pour Les Couilles sur la table, entre autres.
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Catégorie « romans féministes »
Consentement, domination masculine, servitude, dystopie, parcours initiatique, vous devriez trouver de quoi satisfaire le mâle qui a besoin d’imaginaire pour avoir une illumination. Bien entendu, on peut débuter par La Servante écarlate – qui a donné la série télévisée, mais aussi un film, un opéra et un ballet, de Margaret Artwood (qui en a ignifugé un exemplaire pour montrer qu’on ne peut pas brûler les livres, gnark gnark, alors que nous, on veut juste cramer des mecs*). À lire avec Vox de Christina Dalcher, super flippant parce que là aussi plausible dans le genre futur proche horrifique, mais vous pouvez équilibrer avec Sans eux, de Caroline Fauchon qui imagine une société sans homme dans l’espace public. On ajoute sur la pile La Petite dernière de Fatima Daas qui a aussi produit une jolie série de podcasts pour France Inter, Le Consentement de Vanessa Springora qui pourra interroger les lecteurs masculins sur leur propre rapport avec cette question essentielle ; Miss Islande par Auður Ava Ólafsdóttir et Je sais pourquoi l’oiseau chante en cage de Maya Angelou pour plonger dans l’Amérique des années 40 et découvrir le combat antiraciste de l’autrice.
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Catégories bandes dessinées et romans graphiques
La ligue des super féministes de Mirion Malle pour assouvir le besoin de super héro(ïne)s se lit dès dix ans, donc j’imagine assez bien à l’âge adulte. Pour les plus grands, il y a l’intégralité de l’œuvre de Liv Strömquist ; la série des Culottées de Pénélope Bagieu ; La Fille des Oiseaux de Florence Cestac dans lequel elle revient sur sa jeunesse ; ReSisters de Aurore Chapon et Jeanne Burgart ; les bds autiobiographiques d’Alison Bechdel ; le super duo Ovidie et Deglee a publié Libres ! Manifeste pour s’affranchir des diktats sexuels ; on s’émeut avec Pari(s) d’amies de Rokhaya Diallo et Kim Consigny ; on se retrouve dans Fun Girl d’Elisabeth Pich… Et je vais caler un auteur ici : Quino qui a créé Mafalda, ce personnage dont les réflexions sur le monde ne vieillissent pas.
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Catégorie « il y en a encore plein mon coco, pioche là-dedans »
Je pense que passé un certain nombre de lectures, votre co-parent ou votre père aura bien compris l’idée, mais c’est toujours bon de proposer de nouvelles lectures, de la même manière que la philosophie est une science en mouvement. Il trouvera plein de ressources dans le best-seller d’Alice Coffin dans Le génie lesbien. L’ouvrage collectif Pensée féministe décoloniale nous fait découvrir les intellectuelles d’Amérique du sud et on en profite pour ajouter Décolonialté et privilège de Rachele Borghi aux éditions Daronnes.
Puisque c’est la fête des pères, on pense aussi aux enfants, c’est le moment de faire passer des messages en termes d’éducation, avec le super complet livre de Lucile Bellan Petit traité d’éducation féministe. Tout est dans le titre : Tu seras un homme féministe mon fils, manuel d’éducation antisexiste pour les garçons libres et heureux d’Aurélia Blanc pour déconstruire les petits garçons et surtout leurs parents. Avec Chère Ijeawele, ou un manifeste pour une éducation féministe, Chimamanda Ngozi Adichie donne des clés aux parents pour « donner une ligne de conduite féministe » dans leur manière d’éduquer les enfants.
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Catégorie auto promo
Traverser la foule, Dorothée Caratini, éditions Bouquins. Vraiment pas mal, je vous le conseille. Plus sérieusement, j’en parlerai le 24 juin sur France Inter dans l’émission Unique en son genre de Giula Foïs, qui a publié Je suis Une sur Deux, qui parle du viol qu’elle a subi, de la justice qui lui a imposé une double peine, de son parcours.
*calmez-vous, c’est pour la blague