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Pourquoi les jeux vidéo, c’est la vie

Décriés? Voici un grand cri d’amour aux jeux vidéo qui m’ont tant apporté.

Par
Stéphane Moret
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On entend tellement de mal des jeux vidéo en permanence. Ils sont violents, ils abrutissent les enfants. Ça me fatigue. D’abord parce que ces phrases sont souvent issues de personnes qui ne jouent pas et ont donc des idées arrêtées sur le sujet. Pas capables d’ouvrir leur curiosité à un nouveau sujet, un nouvel univers. Ensuite parce que je suis un gamer – occasionnel certes, mais gamer – et que je ne me reconnais pas du tout dans ces descriptions, en toute objectivité.

Les jeux souvent pointés du doigt sont ceux de tir (FPS) ou de baston (Beat’em up). Pourtant, quels défouloirs ils sont, et quelles plateformes de stratégie et d’apprentissage de la vie ils peuvent être. Jouer, échouer, réessayer, réussir, échouer de nouveau, recommencer, apprendre sur soi et être fier d’avoir passé une épreuve. Voilà ce qu’est un jeu vidéo. Quel autre media peut s’enorgueillir de réussir à nous faire passer par autant d’émotions, de manière aussi personnelle ?

Les jeux vidéo, c’est la vie, parce que c’est pas la vraie vie, et que ça fait du bien de s’échapper de son quotidien.

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Les jeux vidéo, c’est la vie, parce que c’est pas la vraie vie, et que ça fait du bien de s’échapper de son quotidien. De la même manière qu’on peut devenir un passionné de films, de séries, de musique, de livres: bref, de tout ce qui nous plonge dans un univers référencé. Alors oui, on peut être trop « à fond » dedans, et ça peut devenir compliqué à des âges où on doit se construire. Mais comme pour tout, si le jeu vidéo peut devenir une alternative à un quotidien de mal-être, il ne doit pas devenir la seule bouée de secours. Mais parents, critiques, amis, posez-vous la question : pourquoi une personne se plongerait autant dans cet univers quand tout va mal en dehors ? Peut-être parce qu’elle s’y sent bien, fort. Que sa position de héros/héroïne lui apporte une bonne image de soi, aussi virtuelle soit-elle. Et puis, le jeu vidéo est devenu un terrain d’excellence, comme tout art l’a été avant. On parle souvent de la barre des 10.000 heures de pratique pour accéder au domaine de la maîtrise. Et il n’est pas rare de voir cette barre franchie régulièrement par des gamers, sur un ou plusieurs jeux.

Bref, le portrait-robot du joueur n’est pas aussi caricatural que ce que certains attendent.

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En fin d’année, Playstation par exemple, propose à ses joueurs un compte-rendu pour leur dire sur quels jeux ils ont passé le plus de temps cette année, et leur temps de connexion globale. Même si je suis donc un casual gamer, j’ai tout de même atteint 240 heures de jeux, dont plus d’une centaine sur le jeu FIFA, à jouer entre amis. Certains de mes amis ont doublé ou triplé ce chiffre aisément. Pour autant, ils ne sont pas tous hardcore gamers. Ils sont en couple, ont des enfants, certains d’entre eux sont bien évidemment des femmes. Bref, le portrait-robot du joueur n’est pas aussi caricatural que ce que certains attendent. Alors, oui, on peut y passer du temps, mais jamais au détriment de notre réelle vie sociale.

On peut aussi bien jouer 30 minutes de temps en temps, que 6 heures d’un coup. C’est aussi une manière d’avoir du temps pour soi.

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Même si on passe 80 heures sur Final Fantasy VII remake. Même si on boucle Uncharted 4 en 25 heures en un week-end. Même si on cumule 240 heures rien que sur Borderlands 3. Parce qu’on peut aussi bien jouer 30 minutes de temps en temps, que 6 heures d’un coup. C’est aussi une manière d’avoir du temps pour soi.

Et puis c’est aussi un moyen d’avoir une vie sociale, notamment en période de confinement, souvenez-vous… L’OMS a par exemple recommandé de jouer aux jeux vidéo, pour rester chez soi pendant cette période compliquée. Aujourd’hui, qu’on soit sur PC, Xbox, Switch, ou PS4, on a tous l’occasion de s’ouvrir au monde en se branchant en ligne, et de jouer avec d’autres personnes. Qu’on connaît ou qu’on ne connaît pas. On peut même se faire de nouveaux amis. Certains qu’on verra un jour en IRL (In Real Life), d’autres qu’on ne verra jamais et ce n’est pas dramatique. Certains ont bien des amis du club de sport, du cours de danse, qu’ils ne voient pas plus que ça en dehors. Avec mes amis, habituellement, on se réunit les uns chez les autres pour des soirées conviviales. Ou on se connecte en même temps, chacun chez soi, pour partager un jeu, en coopération, en équipe, en duel. On se défie, on se soutient. Inutile de vous parler de Fortnite, ce phénomène du jeu qui recueille le plus de joueurs dans le monde. Personnellement je n’en fais pas partie. Ce n’est pas mon style de jeu. Car oui, on peut aimer certains jeux et pas d’autres, et pourtant les communautés de gamers, que ce soit dans les simulations sportives, les plate-formes, les action/aventure ou autres se retrouvent tous autour d’un point commun : la passion du jeu vidéo.

La majorité des jeux sont éducatifs. Animal Crossing New Horizon en est le premier exemple.

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On apprend, pas forcément les maths ou le français, même si, avec les jeux vidéo, c’est possible. Bien sûr, on entend souvent parler de « jeu éducatif ». Et c’est très bien qu’ils existent en soi. Mais sachez que la majorité des jeux sont éducatifs. Animal Crossing New Horizon en est le premier exemple. Certains ont reconstitué des musées, des centres d’exposition pour apprendre les arts, et intéresser un nouveau public, censément plus jeune. Pourtant, ce n’est pas à proprement parler un jeu « éducatif ». On apprend la stratégie d’équipe avec FIFA, à économiser certains joueurs pour le prochain match. On peut comprendre un peu mieux certains entraîneurs et devenir un peu moins « Footix » (personnes qui parlent de foot sans avoir les connaissances « expertes »). Avec un jeu de baston comme « Injustice », qui met en jeu super-héros contre Villains, j’ai appris l’abnégation, d’aller chercher certains trophées pour avoir gagné 250 combats avec un personnage parmi la trentaine proposée. Avec « Cities Skylines », j’apprends à construire et gérer une ville. Avec tous les éléments réels de ce genre de simulation, jusqu’à une pandémie et la gestion des décès dans sa ville. Avec Assassin’s Creed, on découvre une période de l’histoire, ses coutumes, ses cultures.

Mais j’ai aussi appris des choses dans le domaine des « soft skills ». C’est plus anecdotique, mais en jouant à la version multiplayer de Uncharted 4, dans lequel l’objectif est de s’éliminer en équipe pour atteindre 40 points, on peut entendre les autres participants via le micro. Et certains ont, disons, un langage très fleuri du haut de leur âge pré-adolescent. A base de, je cite l’auteur : « Nique lui sa mère, à ce fils de pute, il m’a tué ». Bon. Une fois ça passe, mais quand le vocabulaire tourne uniquement autour de ces mots, ça vous gonfle vite. Mine de rien, ça m’a beaucoup appris sur la génération Y, voire Z, sa manière d’être, et j’ai un peu mieux compris mes interlocuteurs perso ou pro de cet âge-là. Oui je suis un vieux con, mais je le revendiquerai presque, alors ne me poussez pas.

On voit de plus en plus souvent sur les CV, dans la rubrique « Intérêts » : jeux vidéo. Et c’est très bien.

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Il m’est arrivé aussi de me replonger dans mes primes années de joueur, adolescent, quand on jouait sur la NES à des jeux aussi compliqués que Batman ou Tortues Ninja. La moindre erreur vous faisait perdre la partie, et vous recommenciez… du début ! Pas de sauvegarde à cette époque. Il fallait finir un jeu du début à la fin une fois que vous aviez allumé votre console. Clairement, on a ragé plus d’une fois. Alors quand on discutait d’un jeu à la récré et qu’un pote venait dire « Ouais, je l’ai fini », honnêtement les regards qu’on portait à cette personne valaient une médaille olympique. A cet âge, j’ai donc découvert la frustration, car je ne finissais jamais les jeux jusqu’au bout, je laissais tomber. Je n’ai jamais été aussi doué que mes amis. Et c’est bien de découvrir ce sentiment qu’est la frustration, de l’identifier, de mettre un nom dessus. Ce n’est pas grave, depuis, je joue pour le plaisir.

Pour finir sur ce sujet de l’apprentissage, on voit de plus en plus souvent sur les CV, dans la rubrique « Intérêts » : jeux vidéo. Et c’est très bien. D’abord parce que ça prouve que c’est un loisir entré dans les mœurs d’une génération, notamment celle qui recrute, qui ne s’en moque plus. Mais aussi qu’on a compris que ça pouvait être un avantage dans un CV. J’ai souvent posé la question : « Qu’est-ce que ça vous appris ? » quand j’avais un candidat en face de moi qui l’avait inscrit sur son CV. Clairement, ce sont ceux qui ont le plus vite compris l’intérêt de jouer en équipe, de tenter des choses en mode laboratoire, quitte à ce que ça ne fonctionne pas, et qui présentaient le plus d’agilité pour proposer une nouvelle solution en cas d’échec. Et en plus, à la pause café, on pouvait causer du dernier XCom ou Xenoblade.

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A chacun sa manière de jouer, à chacun son jeu. Aujourd’hui, vous pouvez jouer en famille avec Nintendo. La Switch est faite pour ça, et vous propose de retirer les manettes de l’écran pour pouvoir les partager avec une personne. Vous bougez les manettes pour reproduire un geste de golf, de tennis, de voiture. Si vous êtes plus adulte, vous vous penchez vers une console Xbox ou Playstation. Avec bien sûr une guerre amicale entre les deux, entre performance pure et plaisir du jeu. Une guerre accentuée par la prochaine génération de consoles, la Next Gen, que préparent Sony et Microsoft, avec leurs nouvelles consoles qui devraient sortir en fin d’année, X Box Series X et PS5. Si vous êtes plus féru de graphismes imbattables, vous vous dirigez vers le PC gaming, aux qualités visuelles et de calcul plus poussées. Mais vous pouvez aussi jouer au même jeu sur chacune de ces plateformes et vous retrouver à jouer ensemble via le « online ».

Plus ça va, plus on vous propose même de jouer sans support physique, console ou PC, via votre smartphone, votre écran de télévision, ou le « Cloud Gaming », que propose par exemple Google Stadia. Bref, ce n’est pas une question d’équipement, c’est une question de goût. De jeux.

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Vous aimez les chevaux ? Il existe un jeu qui vous permet d’en élever. Vous aimez la cuisine ? Overcooked est sur cette thématique, et il est fun. Même les jeux de société comme le Trivial Pursuit, Monopoly ou un jeu de cartes comme le Poker ont désormais leurs versions vidéo-ludiques. Et il y a aussi des jeux dans lesquels vous jouez un pêcheur, un chasseur, un fermier, un magicien, un cycliste du Tour de France, un pilote de Formule 1, un astronaute, un comptable, un médecin. Vous pouvez être tout et n’importe qui dans un jeu. C’est sûrement ça qui nous attire, nous les gamers. Jouer une pelote de laine qui cherche son chemin dans Unravel, puis un guerrier Viking deux heures plus tard qui massacrera tout dans Assasin’s Creed Valhalla.

Je suis heureux d’avoir grandi avec une console de jeux dès qu’on pouvait s’en offrir une. D’abord la NES, puis la Super Nintendo, quand mes amis avaient une Sega. On allait les uns chez les autres pour les tester, parce que personne ne pouvait s’en payer deux à l’époque. Et puis d’avoir acheté seul ma première Playstation, la 2, avec l’argent de mes premiers jobs. Depuis, j’ai eu une Xbox, la PS4, une Switch. J’ai joué à la Wii, à la Game Boy, même si je n’en avais pas. On se prête les jeux, on s’échange les bons plans, les réductions, les promos. Parfois on achète le même jeu, juste pour pouvoir jouer ensemble. Certains nous déçoivent, d’autres nous ravissent. Je joue avec ma compagne sur certains jeux, avec des amis sur d’autres, seul sur d’autres encore. Ça ne m’a jamais coupé du monde, ça m’a rapproché. Ça ne m’a jamais fait perdre des neurones, ça m’en a fait gagner. J’ai jeté des manettes parce que j’étais déçu, et l’instant d’après je me sus juré de ne plus le refaire. J’ai crié de joie, j’ai été ému par la fin de certains jeux. J’ai râlé contre un boss de fin de niveau, j’ai résolu des énigmes et des puzzle-games. Bref, grâce aux jeux vidéo, j’ai grandi, j’ai vécu. Merci.

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