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Ce lundi 22 février 2021 restera, pour longtemps, le jour le plus triste de l’année. Surtout pour les fans de Daft Punk qui, comme moi, ont envie de croire que Thomas Bangalter et Guy-Manuel de Homem-Christo sont en train de nous faire une mauvaise blague. Qui l’eût cru : après 28 ans d’existence et après avoir marqué à jamais l’électro/nos vies, les Daft Punk ont décidé d’arrêter. Pourquoi ? À l’heure où j’écris ces lignes, on ne sait toujours pas. C’est peut-être comme ça que rompent les robots, après tout. Même s’ils sont Human After All. Ou peut-être que they need something more comme ils l’annonçaient déjà dans leur titre-oracle, « Touch ».
Seule (maigre) consolation pour nous aider à faire notre deuil, cette vidéo d’une tristesse sans nom aux 4 premières minutes interminables où l’on pressent l’impossible se pointer sur nos écrans froids (sortez vos mouchoirs, c’est à l’enterrement de Daft Punk que vous allez assister et à sa spectaculaire explosion, littéralement) :
Voilà, c’est fini. Et n’attendez pas un éventuel retour : même leur responsable de presse a confirmé l’info, sans en dire plus. Bref, c’est du sérieux. Après 4 albums (seulement ?) et une vraie révolution dans le paysage musical, ils rendent leurs masques.
Avec le recul et en méditant un peu sur ces ovnis de l’électro, on se rend compte qu’ils avaient juste tout compris avant tout le monde, que le soin accordé à l’image était aussi important que la musique : leurs masques, leurs rares apparitions, leurs concerts mémorables, et même leur fin est un coup de théâtre. On n’en n’attendait pas moins d’eux.
Ils avaient un don pour se faire désirer, nous faire vibrer sans se prendre la tête sous leurs casques. C’était beau et juste, Daft Punk. Comme cet ami qui te décrypte sans que tu aies trop besoin de parler. Ça faisait du bien.
Alors oui, certains diront que de toute façon, ça faisait un moment qu’ils n’avaient rien sorti, qu’ils avaient déjà un peu disparu. Mais c’est faux. Ce n’est pas parce qu’on n’a pas de nouvelles de quelqu’un qu’il n’existe plus. Certes, à l’ère du numérique où tout va (trop) vite, c’est une posture difficile à tenir. Il faut se faire voir en permanence. Mais, ils l’ont rappelé à plusieurs reprises pourtant : ils n’étaient pas des robots, leurs apparences étaient trompeuses à bien des égards. Ils étaient seulement humains, après tout.
Comme d’autres artistes terriblement talentueux (je pense à Mansfield.TYA qu’on a interviewé la semaine dernière), ils prenaient juste le temps de faire les choses bien, de balancer des pépites en or massif et des tubes mondiaux tous les 4, 5 ou 8 ans. Ils n’étaient pas morts.
Jusqu’à ce 22 février 2021.
« Dans un sens, Daft Punk représente ce qu’attendait avec impatience la sous-culture techno française: quelque chose de plus rugueux, de plus impulsif, de plus sale », écrivait déjà Didier Lestrade dans Libé en 1997 (archive culte disponible ici). Il avait raison. Daft Punk répondait à un besoin criant d’entrer en transe collective (il faut avoir assister à un de leurs concerts pour comprendre). Imaginez un concert de Daft Punk dans le « monde d’après »…. Ça aurait été absolument déglinguant, renversant, planant, je-ne-sais-quoi. Mais surtout trop beau pour être vrai.
Comment leur en vouloir de s’arrêter en si bon chemin. On a grandi avec eux, ils nous ont fait découvrir et aimer l’électro, leurs mélodies vont squatter nos mémoires à vie et chacun.e de nous a forcément une histoire personnelle reliée à tel ou tel morceau. C’est le propre de l’art, et ils étaient passés maître en la matière. Au lieu de nous apitoyer sur notre sort, retour en clips et en mots sur 5 titres cultes, telles des petites madeleines de Proust qu’on va savourer encore longtemps.
One more time – Le générique des NRJ Music Awards
« One More Time », c’est ce clip fantastique qu’on re-re-regarde juste pour kiffer et ce son qui nous fait remuer bizarrement mais, pour une certaine génération, c’est aussi le générique des NRJ Music Awards (pendant 9 ans quand même)… Ça casse un peu le mythe mais c’est vrai. Certain.es ont peut-être même découvert le groupe grâce à l’émission, qui sait.
Instant Crush – et sa joyeuse mélancolie
C’est le titre que j’écoute en boucle sur mon Deezer plusieurs fois par semaine (!). C’est aussi la chanson qui me rappelle mes derniers instants dans le métro de Paris avant de m’envoler pour Montréal. Impossible à oublier, donc. En réalité, tout leur « Random Access Memories » est une sacrée machine à faire ressurgir des souvenirs. Et tant mieux !
Giorgio by Moroder – LA BIOGRAPHIE LA PLUS ÉCLATANTE
« When I was fifteen, sixteen, When I started really to play the guitar, I definitely wanted to become a musician ». Il suffit que j’entende ces quelques mots pour que j’augmente instantanément le volume à la recherche de ma dose de son. Je vois littéralement ce morceau comme une drogue, impossible à écouter doucement ou gentiment. Du moins pas après 5’20. Oh et puis la dernière minute… MONTEZ LE SON, VOYONS. Et appuyez sur repeat.
AROUND THE WORLD – AVEC LE CLIP DE GONDRY
Le titre est culte à bien des égards et il a cartonné dans tous les classements à l’international. Son clip aussi est culte, d’autant que c’est le génial Michel Gondry qui l’a fait. D’où les squelettes, robots, momies et nageuses qui crèvent l’écran au rythme de la musique. Cultissime.
Get Lucky – La chanson QUI MET EN FORME
« J’ai fait un solo de danse à mon mariage sur cette chanson ! Comment oublier », me lance mon collègue Romain en train de revivre le moment, pendant que je cherche le premier souvenir que m’évoque cette mélodie. « Ah bah moi c’est l’année où j’ai… rompu ! Je me souviens que cette chanson me faisait un bien fou ». Bref, « we’re up all night to get lucky »…
En guise de conclusion, une petite question : il part où comme ça tout seul dans le désert Guy-Manuel, hein ? Moi j’y crois encore au projet solo post Daft Punk. Je guette. Sans rancune. Et j’attends, avec impatience ce moment où, en 2040, mon enfant me demandera naïvement si je connais un vieux groupe électro du nom de Daft Punk…
En attendant, on se lève et on se casque. Merci d’avoir existé et de nous avoir rendu plus humains, les robots.
PS : même Twitter ne s’en remet pas