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Je le confesse : je n’ai jamais regardé un seul film avec François Sagat en pleine action. Mais ça ne saurait tarder. Évidemment, j’ai entendu parler de lui 1000 fois et plusieurs de mes amis (même des mâles alphas hétéros) m’ont confié combien ils fantasmaient sur lui. Perso, c’est son tatouage crânien qui a toujours retenu mon attention. Dernièrement, c’est son premier album « Videoclub » qui a titillé mes esgourdes et qui m’a permis de le rencontrer sur Zoom pour parler musique et plus si affinités.
J’ai lu que tu ne sortais pas beaucuop en boîtes ou en clubs, mais je trouve que ton album serait parfait pour ce genre d’endroits ! T’en penses quoi ? Ça te fait plaisir ou pas du tout ?
Je suis sorti activement en clubs et en boîtes pendant de nombreuses années mais aujourd’hui, ce n’est plus mon truc. C’était très familier pour moi le clubbing à une époque mais ça fait partie d’un souvenir maintenant. D’un point de vue social, j’ai du mal aujourd’hui avec les gens, ça me demande beaucoup d’énergie. Et je n’écoute plus la musique de la même manière non plus et puis surtout maintenant je dors la nuit !
Mais ton album a quand même été pensé pour le clubbing ou pas du tout ?
Absolument ! C’est un album avec des morceaux très remixables d’ailleurs, et qu’on peut décliner. Il est très inspiré de clubbing des années 90/début 2000. Il y a cette histoire de nostalgie/souvenirs au sujet de cette époque que j’ai vécue et que d’autres ont vécu avant moi. Mais c’est vrai que le clubbing ne correspond plus à mon présent.
Comment l’envie de faire un album est-elle née ?
Ce n’était pas du tout mon idée, j’aurais été terrifié de me lancer ! C’est l’idée du producteur, Tommy Marcus. Mais le projet initial c’était juste de refaire le cover d’une chanson d’Amanda Lear, on avait pensé à ça avant le covid. Finalement, deux ans se sont écoulés et on a décidé de faire un album ! Même si j’avais très peur (rires)
Pourquoi t’avais peur ?
Parce qu’il fallait aussi que j’écrive les textes des chansons et comme je suis quelqu’un d’extrêmement intime, malgré ce pourquoi je suis connu, ça me faisait flipper. L’intimité n’est pas que corporelle… Et puis je fais partie de ces gens qui partagent très peu leur vie privée. Faire un album, pour moi, c’était du domaine de l’intime et ça me faisait un peu peur. Mais comme j’aime les expérimentations, j’ai voulu essayer quand même !
Comment s’est passé ton processus de création ? Tes inspirations ?
Tommy Marcus m’a appris à travailler à sa manière. J’ai dû faire un moodboard où je mettais tout ce qui m’inspirait niveau films, livres, interprètes, etc. Ensuite, il m’a envoyé des instrumentaux et sur chaque instrumental, je lui donnais mes inspirations et ressentis en mots-clefs pour chaque morceau. Ensuite, je devais écrire un paragraphe ou une histoire sur chaque instrumental, et de cette histoire découlaient les paroles.
Au début, je voulais écrire en français parce que j’adore la langue française et sa sonorité. Mais je n’y arrivais pas, ça faisait comme un mur devant moi. Les syllabes, la recherche de rimes, etc, j’ai trouvé ça difficile.
Et Amanda Lear, qu’est-ce qu’elle fait là ? J’ai vu qu’elle a participé à ton album…
C’est quelqu’un que j’admire beaucoup et qui a traversé les décennies tout en restant très actuelle, je trouve. J’ai lu tellement d’interviews d’elle des années 70 où elle avait déjà des propos très avant-gardistes pour l’époque. C’est un personnage fascinant et une vraie icône, selon moi. Elle n’aime pas la disco et elle en a marre qu’on l’associe à la disco. Je voulais finir mon album avec “Follow me” en guise de clin d’œil. Je voulais que la fin soit plus sucrée !
Quel est ton public cible ?
Ça parle beaucoup de sexe, de drague et de LGBTQ+ mais ce n’est pas si évident ni explicite que ça. Tu peux être hétéro et écouter certains morceaux sans trop savoir de quoi ça parle. J’aborde les notions de sensualité et d’attraction mais pas forcément dans le milieu gay, lesbien ou autre. Mais c’est vrai que mes inspirations viennent du milieu gay.
J’aimerais que mon public soit plus large, évidemment !
Justement que dire aux gens (hétéros notamment) pour leur donner envie d’écouter ton album ?
Je leur dirais que c’est d’abord du divertissement ni plus ni moins et pas tellement de l’activisme. D’ailleurs, on peut être activiste sans le savoir parfois, juste en continuant à exister par soi-même au sein d’une communauté. Je n’ai pas voulu faire quelque chose d’évident dans l’activisme ou défendre une cause en particulier, j’ai plutôt voulu faire quelque chose d’émotionnel. Certains disent que mon album est conceptuel mais il est d’abord amusant et accessible.
À l’heure où les droits LGBTQ+ progressent et régressent aussi rapidement, quel rôle penses-tu jouer ? Au niveau de la communauté gay notamment ? Quels sont tes combats (si tu en as) ?
Je pense qu’actuellement, le simple fait d’être ouvertement gay et de continuer à exister en produisant des choses, c’est déjà beaucoup ! ll n’y a parfois pas besoin de mettre trop de mots sur le déferlement d’actualités. Je n’ai jamais été quelqu’un qui donne trop son avis, surtout quand on ne me le demande pas. Ça ne me ressemble pas et je ne veux pas me forcer. Mais je fais ma part pour la communauté quand on me le demande, même si ça ne vient pas forcément de moi. En réalité, j’ai souvent peur d’être maladroit ou de dire des bêtises. Mettre en forme des chansons, c’est une manière de s’exprimer, ou lire les textes d’autres, etc. Il y a 1000 façons de passer à l’action.
Sans transition aucune : qu’est-ce que ça fait d’être François Sagat ? d’être un tel objet de désirs ? Comment tu le vis à l’heure actuelle ?
Il y a beaucoup de gens qui ne m’aiment pas aussi… Mais la notoriété et tout ce qui va avec, ce n’est pas un point sur lequel je me focalise, ce n’est pas dans ma tête en continu. Je préfère faire de la place pour me concentrer sur des nouveaux projets. Et puis j’ai la tête ailleurs aussi avec le cours de ma vie, tout simplement ! Je pense à d’autres trucs. Je ne vis pas du tout une vie de star, je suis très terre à terre. Je n’ai pas non plus les avantages d’une “vraie” star. On peut me croiser assez facilement au supermarché par exemple ! J’ai une vie extrêmement anonyme, surtout depuis que je ne vis plus à Paris, dans un monde de plus en plus hétéro d’ailleurs, malgré moi… Ce n’est pas super fun mais je me protège. J’oublie parfois que je suis un “personnage public” comme on dit. Souvent, ce sont les gens qui me rappellent ce que j’ai fait ! Mais surtout, il y a la vie qui prend la plus grande partie de mon temps, et c’est extrêmement terre à terre.
Ça t’a fait quoi la controverse autour du clip de Bilal ?
Je m’attendais à des retours un peu négatifs mais pas à ce point-là. J’ai même eu des menaces… Il a fallu que je mette mon profil en privé, etc. Et Bilal, c’était pire, c’était puissance 10. Je n’ai pas compris les amalgames qui ont été faits ni les fausses excuses données par certaines personnes. Comme si c’était la première fois que les gens voyaient du porno sur Twitter… Et puis l’église à Metz qui a interdit à Bilal de se produire en prétextant un “concert pornographique”, je n’ai rien compris. Mais ça dérange vraiment les gens qu’on soit visibles, c’est dingue. Ça a été 3 semaines de violences mais ça ne m’a pas empêché de dormir non plus. Alors ce que j’ai envie de dire aux haters : continuez d’avoir la haine, ça va vous ronger de l’intérieur ! Enfin, j’espère.
Que représente le porno pour toi aujourd’hui ? Et l’industrie porno dans son ensemble ? Comment tu perçois l’évolution du porno depuis tes débuts ?
L’industrie porno est en train de se désintégrer au profit des contenus beaucoup plus réalistes et personnels sur diverses plateformes. Certains considèrent que ce n’est pas du porno, certes, mais ça reste du contenu sexuel diffusable… Et dont les images vont rester longtemps voire éternellement sur le net. Certain.e.s n’y pensent qu’après coup, c’est dommage et parfois dangereux.
Le vrai porno, celui que j’ai vécu, est un produit collector maintenant ! Il y a eu les VHS et les DVDs, c’était des produits qu’on collectionnait et il y avait des fans, etc. C’était un produit avec un cahier des charges précis et des vrais décors, ça ne se fait plus beaucoup maintenant. Je trouve ça triste comme la nostalgie des stars d’Hollywood des années 40-50-60. Ce sont des choses qui ont quasiment disparu aujourd’hui, mais je suis content d’avoir fait partie de ça ! Je me sens juste un peu dinosaure (rires).
T’aurais fait quoi si tu n’avais pas été artiste/acteur porno ?
J’aurais voulu être vétérinaire, m’occuper des animaux mais scientifiquement et moralement parlant, je n’aurais pas pu ! Juste aller chez le véto avec ma chatte, c’est compliqué (rires) Sinon, j’aurais bien aimé ouvrir un shelter pour animaux ou un grand manoir avec des animaux qui sortent de partout ! C’est toujours un rêve ça.
Que dirais-tu au petit François chétif qui se faisait emmerder dans la cour de récré ?
Tu as eu raison de ne jamais douter quand tu étais au collège et au lycée, tu as eu raison garder la tête haute quand on t’insultait et de croire en toi en te disant que tu deviendrais quelqu’un de bien. Tu as eu raison de surpasser tout ça et de ne pas sombrer.
Qu’est-ce qu’on peut te souhaiter pour la suite ?
Je ne me vois pas faire encore de concerts complets mais je me verrais bien chanter 3 ou 4 morceaux en festivals, pourquoi pas ! Ce serait déjà beaucoup. Pourquoi pas refaire un album de covers, plus acoustique, moins super produit. On verra…