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Ce que nous a appris le premier confinement sur la façon de mieux vivre le deuxième
Méditer, cuisiner, faire du ménage, remplir un journal quotidien, se remettre en forme, se découvrir de nouvelles passions pour le macramé ou le banjo, lire les sept tomes d’Harry Potter en espagnol, organiser 45 apéros sur Skype par semaine avec sa famille et ses amis. Ce ne sont là que quelques exemples de choses que l’on s’auto-prescrivait au printemps dernier pour passer à travers le confinement sans finir fou.
À l’heure où le gouvernement vient d’annoncer le reconfinement de la France, on présume que toutes ces façons d’utiliser notre temps «libre» entre les quatre murs de notre appart/maison vont vite revenir au galop.
Mais est-ce que ces passe-temps sont réellement la clé du bonheur encabané? On a demandé à Geneviève Beaulieu-Pelletier, psychologue et professeure, de déboulonner certains mythes du bien-être pandémique.
Se changer les idées à tout prix
Chasser les nuages qu’on a au-dessus de la tête est un conseil qui a beaucoup circulé pendant le confinement printanier. Or, selon la psychologue, certains gestes, qui sont en apparence posés pour notre bien-être, peuvent finalement s’avérer nuisibles.
Tout comme jeter son dévolu dans l’entraînement ou la confection de miches de pain, Geneviève croit qu’on doit utiliser ces passe-temps de manière «ponctuelle». «Ça permet de mettre son attention ailleurs que sur la crise que l’on vit. Si ça devient un mécanisme de défense contre ce qui nous tracasse, là ça devient un problème».
«Il ne faut pas que ça devienne un moyen de se couper de ses émotions négatives.»
«Décompresser en regardant un épisode de sa série préférée sur Netflix une fois de temps en temps, ça peut faire du bien. Mais il ne faut pas que ça devienne un moyen de se couper de ses émotions négatives», illustre-t-elle.
Selon elle, il vaut mieux affronter ses idées noires lorsqu’on en a l’énergie plutôt que de les refouler, «puisqu’elles finiront par nous rattraper de toute façon». «Ce n’est pas vrai qu’on a la capacité d’arrêter d’y penser tout le temps», estime-t-elle.
Les contacts sociaux ne sont pas tous égaux
Votre mère vous appelle juste avant votre apéro Skype avec vos collègues qui lui-même est juste avant votre Facetime quotidien avec votre flamme qui est à son tour dérangée par les 1240 notifications de votre conversation Messenger avec vos amis qui prennent de vos nouvelles. Épuisant, être socialement sollicité en confinement, hein?
Bien que Geneviève Beaulieu-Pelletier admette que les contacts sociaux sont primordiaux dans un contexte d’isolement, elle reconnaît qu’ils ne se valent pas tous. «Il faut continuer d’avoir des contacts avec les gens, que ça soit par des vidéoconférences, par écrit ou par téléphone. Le plus important est de miser sur la valeur significative des contacts plutôt que sur la quantité».
Elle explique par exemple qu’une conférence téléphonique avec son équipe de travail de 30 minutes n’est pas aussi thérapeutique qu’un dîner par Facetime avec ses meilleurs amis. «Il faut que ce soit une communication profonde qui vient stimuler nos intérêts et créer des émotions positives pour qu’on en ressente réellement un effet positif», explique la docteure.
«Mais on ne doit pas snober notre conversation avec le caissier pour autant, nuance-t-elle en riant. Toutes les chances de communiquer et voir du monde sont les bienvenues. »
Se forcer à être productif
Lundi: apprendre la flûte nasale. Mardi: faire le ménage de votre garde-robe qui abrite encore vos vieux t-shirts 2008. Mercredi: faire le plus de pains possible en ordre alphabétique des sortes de grains utilisés.
Pendant le confinement au printemps dernier, zoner en pyjama sans avoir d’autres plans que de zoner en pyjama semblait être un crime capital dans notre société de performance.
«Bien sûr il y a du bon à être productif et s’attaquer à des projets qu’on remettait à plus tard. Par contre, il ne faut pas se mettre la pression d’accomplir des choses coûte que coûte», souligne la psychologue.
«Bien sûr il y a du bon à être productif et s’attaquer à des projets qu’on remettait à plus tard. Par contre, il ne faut pas se mettre la pression d’accomplir des choses coûte que coûte.»
Il faut avant tout faire preuve d’indulgence envers soi-même par les temps qui courent, selon la psychologue. «On est encore en période d’adaptation. Ça se peut qu’on ait moins la tête, dans les prochaines semaines ou les prochains mois, à essayer plein de nouvelles choses. C’est ok de ralentir notre rythme de vie», admet Geneviève.
Namaste. Ou pas.
«Wow! Je vais prendre ce temps-là pour faire du travail sur moi et faire un reset sur mes habitudes de vie», a déclaré naïvement presque tout le monde au début du premier confinement.
Avec des applications en vogue comme Headspace, la méditation en ligne, une industrie qui connaît un gigantesque boom économique ces derniers temps, s’est avérée un outil efficace pour contrer l’angoisse créée par la pandémie et voguer vers un espace mental plus serein.
«Avec tout ce qui se passe, il est normal et même sain de s’interroger sur nos valeurs et nos habitudes de vie. Mais pour certaines personnes, se centrer sur ce type de pensée peut être plus anxiogène qu’autre chose », explique la professeure.
«Si c’est le cas, la meilleure manière pour ces personnes de calmer leurs angoisses est non pas de se replier sur elles-mêmes, mais plutôt de parler avec des proches ou d’aller chercher de l’aide d’un professionnel».
Vous vous demandez peut-être quoi faire après avoir lu un article aussi abrasif pour vos croyances de confiné. Heureusement pour vous, Geneviève Beaulieu-Pelletier le résume bien en seulement quelques mots. «Ralentissez, écoutez-vous et surtout, soyez indulgents envers vous-mêmes».