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Amour, gloire et rentiers : on a maté pour vous L’Agence, le programme d’immobilier de luxe de TMC

Et on a des questions.

Par
Oriane Olivier
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A tous ceux qui frétillent déjà de la télécommande en songeant aux séries qui s’apprêtent à débarquer sur nos écrans cette année : cette émission de téléréalité va peut-être vous aider à patienter. Librement inspirée du programme américain Selling Sunset dans laquelle l’élite des agents immobiliers refourgue des villas à des Californiens fortunés dans une région du monde régulièrement ravagée par des feux de forêt, sa petite soeur française suit les aventures d’une famille parisienne spécialisée dans l’immobilier de luxe.

Chaque semaine, le clan Kretz explore donc tout ce que l’Hexagone compte de penthouses ou de maisons de campagne et reste soudé autour d’un même objectif de vie : vendre des triplex à Passy. Mais si au bout de trois saisons d’épisodes hebdomadaires, les piscines intérieures et les sourires immaculés finissent tous par se ressembler, des questions importantes demeurent.

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Combien de chèques énergie faut-il pour chauffer un hôtel particulier ?

Parce qu’avec la hausse des prix de l’énergie, il va en falloir des cols roulés en mohair pour supporter les températures hivernales dans des 400 mètres carrés sur les Champs Elysées. Alors bien sûr, les grands industriels de l’armement et les patrons du CAC 40 sont des petites hirondelles ploutocrates sensibles au moindre changement : ils migrent vers des pays plus hospitaliers en fonction des saisons, des mandats présidentiels et de la fiscalité. Mais on fait le pari que même les rentiers n’ont pas envie de débourser 5 millions pour un appartement vide la moitié de l’année…

Qui a besoin d’une salle spéciale pour ses trophées ?

Hammam, ascenseur privatif et passage secret dans la bibliothèque pour amateurs de Cluedo pétés de thunes ou conjoint.e adultère qui préfère protéger ses arrières : les exigences des clients de la famille Kretz sont variées. Mais certaines requêtes laissent parfois entrevoir la blessure narcissique originelle derrière la black card. Ainsi, lorsque le footballeur français Alphonse Aréola fait appel à l’agence pour lui dégoter un bien d’exception outre-manche, ce n’est pas tant le budget colossal de 23 millions d’euros que l’obsession pour sa future salle des trophées qui interroge. En effet, tandis que sa compagne pose des questions triviales sur la surface de la cuisine, le joueur international évalue le potentiel de chaque pièce pour y entreposer toutes ses récompenses. Après tout, qu’est-ce qu’une hotte aspirante efficace face à une coupe du monde rétroéclairée ?

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Quel genre de multi-millionnaire accepte de se montrer à la télé ?

Quand on a 50 millions d’euros à claquer pour un pied-à-terre à Paris et qu’on vit le reste de l’année sur un yacht, pourquoi ressent-on le besoin d’exhiber sa grosse fortune à la télé ? Sérieusement, est-ce que ces personnes ont déjà entendu parler de kidnapping et de demandes de rançon ? Ou vivent-elles dans un monde où les tentatives d’extorsion, les braqueurs de Kim Kardashian et les contrôles fiscaux n’existent pas ? Parce que dévoiler le nom de sa future rue et le plan 3D de son appartement pour nababs n’est probablement pas la meilleure des idées lorsqu’on dispose de budgets quasi illimités.

La question se pose un peu moins lorsqu’il s’agit de célébrités de prestige comme Lorant Deutsch, Fabrice Luchini ou François Berléand qui ont tous participé à l’émission. Après tout, dans l’univers impitoyable de l’intermittence : l’occasion fait le cacheton.

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Qu’est-ce qu’on attend pour foutre le feu ?

Près de 5 millions de personnes en France vivent sous le seuil de pauvreté. C’est-à-dire qu’elles ont moins de 940 euros par mois pour vivre. De manière concomitante, il y aurait à ce jour 300 000 Français sans domicile fixe et 4,1 millions de mal logés. Alors bien que l’émission attire désormais chaque semaine 700 000 téléspectateurs, espérons que son succès suscite moins au sein du public des vocations de gestionnaire de patrimoine que des envies d’investir les rues.

Et si c’était finalement ça l’agenda militant caché des producteurs de l’émission ? Exposer les dorures et l’opulence dans toute leur obscénité pour éveiller l’esprit de révolte des rebelles du canapé. Parce qu’à l’instar des créateurs originaux des plus grandes séries de ces 20 dernières années qui dénoncent à travers la fiction les violences systémiques, le cynisme en politique et les dynasties de millionnaires aux dents qui rayent le parquet (The Wire, House of Cards, Succession), la société Réservoir Prod cherche peut-être à mettre en lumière l’indécence des nantis pour inciter le peuple à s’indigner. Du moins, comme le dirait probablement un inconditionnel de l’émission en découvrant un loft en plein Marais qu’il ne pourra jamais se payer : il n’est pas interdit de rêver.

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