Il y a quelques temps, dans une ère pré COVID-19, vous seriez passé à Arles, à quelques jours du week-end férié de Pâques, vous auriez découvert une ville en ébullition. Mais le confinement en a décidé autrement… Visite fantôme.
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Place du Forum : pas un chat. Quartier de la Roquette : pas âme qui vive. Près des arènes : silence funèbre. Théâtre antique : scène muette… Mais pourquoi, dans mon inconscient en plein confinement, ai-je imaginé (rêvé ?) retrouver Arles la festive ? Celle qui, chaque année, lance la saison des festivités dans le sud-est de la France. Le vent est souvent de la partie et s’engouffre dans les rues de la jolie Provençale, parfois même la pluie (on a aussi senti la neige), mais qu’importe les péripéties météorologiques, rien n’empêche l’ancestrale cité de se noyer pour plusieurs jours dans les effluves de la fête. C’est d’ailleurs le coup d’envoi, à grande échelle, de la belle saison.
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Mais Arles a le cœur en berne. Sa bête noire du moment, c’est pas les taureaux comme le veut la tradition, mais le seul et terrible COVID-19, unique responsable de l’annulation des festivités, qui va ravir les anticorridas et les militants vegans. Et point barre. Car Arles sans feria, c’est Cannes sans festival, Noirmoutier sans son gois, Bordeaux sans pinard, Menton sans citron, Aix sans calissons. Pas ennuyeux non, mais simplement: ça n’existe pas. Dans la ville romaine, où en plus le soleil s’invite sans prévenir (ne donnant qu’une seule envie : se poser en terrasse et le choix est large), les habitants parlent de balcon à balcon. Un seul sujet à l’ordre du jour, je vous le donne en mille: « Parait qu’ils veulent faire un confinement en Inde. » « Ah oui, et comment vas-tu confiner des gens qui n’ont pas de toît ? », rétorque la voisine. C’est le genre de dilemne intellectuelo-populaire qui, en temps normal, aurait animé les conversations, jusqu’aux petites heures matinales, aux comptoirs de Mon Bar ou du Tambourin, deux des bars les plus fréquentés la fin de semaine pascale pour n’en citer que deux.
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A côté, au chic hôtel Nord-Pinus (très cher), une sorte de Café de Flore façon sudiste, QG de la mondanité et épicentre du noyau artistique, les échanges sont plus huppés. En pleine saison des festivals, sur cette place du Forum, on y guette les stars (Édouard Baer, Arlésien d’adoption, et Renaud Capuçon). À d’autres époques, Picasso et ses potes ! Le Nord Pinus, c’est un peu l’ADN de la ville.
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2020 est donc bien une exception et La Roquette, quartier qui se contente de quelques branches de glycines pour se faire coquette, semble éteinte. On adore y flâner printemps comme été, dans ses ruelles parfois si étroites que l’on peut y tendre un fil à linge au travers de la rue, et où les draps apportent l’ombre rêvée en période estivale. Vieilles pierres et persiennes à l’ancienne. Comme un air d’Italie, une dolce vita en somme… qui cette fois n’est pas au rendez-vous. La Roquette qui adore jouer avec son côté vintage, ses enseignes d’une autre époque voulant donner l’impression d’être restées coincées en 1970, est rattrapé par l’actualité : sur pause comme tout le monde. Point d’exception. Repères de bobos, ce mini 20e arrondissement (j’avoue, on exagère), bordé par le Rhône, est un petit concentré d’Arles, en 2020. Un mélange de culture et d’esprit festif, de classe et de débrouille, un mariage qui fonctionne depuis longue date et le divorce n’est pas près d’être consommé.
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Ce qui fait qu’Arles, depuis quelques années, c’est the place to be. Ça ne vient pas de nous. Tous les journaux, les carnets de voyages, magazines des compagnies aériennes et autres sites internet en vogue en ont fait la ville tendance du moment, et veulent vous voir débarquer dans cet antre antique. Arles (50 000 habitants) est en passe de devenir une petite capitale artistico-bohème, un succès que la ville doit largement à la fondation Luma et la famille Hoffman qui entend donner un nouvel élan à la ville et qui, pour cela, a métamorphosé les anciens ateliers SNCF. Mission accomplie. Franchement, on applaudit ! Arles, et ses rencontres photographiques l’été (maintenues ou pas en 2020 ?), Arles et son fantastique festival les Sud, Arles dont pas mal de monde ignore qu’elle est aussi la plus grande commune de l’Hexagone, et ses plages uniques (Beauduc, Piémanson) est une parenthèse.
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Arles est cette ville qui a toujours eu un petit truc de différent. Ça doit s’appeler la chance. Ça commence avec Jules Cesar qui l’a protégée. Imaginez l’effervescence lorsque son buste, à Jules, fut ressorti du Rhône 2000 ans plus tard ! Tous les archéologues de la planète ont suivi l’événement, en direct ou en live via les réseaux sociaux. Van Gogh, le peintre, qui s’y pointe en 1880 pour plus d’un an, et qui y a multiplié les tableaux. Au chapitre des célébrités, citons aussi Picasso, Lucien Clergue le photographe, le couturier Christian Lacroix, la maison d’édition Actes Sud et Françoise Nyssen (ancienne ministre de la culture sous Macron), le chef Rabanel, l’humoriste Antony Joubert, et les incontournables et indétrônables, Gypsy King. Tiens, en voilà qui, avec leurs guitares au chômage technique, doivent pleurer des cordes.
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