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Sex Life, 50 Nuances de Grey, 365 DNI… Que disent ces succès de notre libido ?
La semaine dernière, je regardais la série SexLife, qui fait partie du Top 10 dans les recommandations belges et françaises sur Netflix. On m’en avait pas mal parlé, mais j’avoue que j’ai dû me forcer à regarder les trois premiers épisodes. J’ai vite abdiqué.
Je vais vous expliquer pourquoi : premièrement, j’ai trouvé les personnages d’un cliché sans nom. La femme mariée et mère de deux enfants qui s’ennuie dans sa banlieue, le mari parfait mais chiant, et l’ex incroyablement sexy et torride qui hante les pensées. Dans SexLife, les hommes sont tous baraqués, ils sont incapables de montrer leurs émotions et tombent vite dans des comportements toxiques voire violents. Ils doivent aussi être des bêtes de sexe et d’ailleurs, les meilleurs coups, ce sont souvent les bad boys car les hommes gentils sont chiants au lit. La taille du pénis a son importance : une scène de l’épisode 3 est très claire sur le sujet en montrant le membre imposant de Brad, l’ex du personnage principal, qui l’emmenait au septième ciel.
Enfin, il y a plusieurs passages problématiques : Billie, la mère de famille, demande à son mari à deux reprises d’arrêter de manière très claire (“Arrête” ou “Stop”) et celui-ci décide de ne pas l’entendre en disant « Je vais y arriver » pour finir en elle malgré son refus. Une scène qui est, pour moi, un viol conjugal même si certain.e.s diront que j’exagère.
Toutefois, une amie, a elle beaucoup apprécié la série et je dois dire que je comprends aussi pourquoi, parce qu’il y a en fait plusieurs lectures. Pour elle, et elle a plutôt raison je pense, montrer qu’une mère de famille peut être en manque de sexe et avoir une libido plus élevée que son mari, c’est effectivement novateur. Elle ajoute : « Je pense que cette série montre justement ce que peu de gens osent accepter de penser : une femme peut ressentir le sexe comme un ciment important dans son couple (plus que son mec). On peut avoir été avec un mec super toxique et avoir pris son pied dans cette relation même si on sait qu’il est nocif. On peut avoir une crise de couple énorme qui brise la confiance et arriver à dialoguer et se relever ensemble de cette situation. On peut être une femme/mère et manquer de cul comme lors de ses 20 ans et l’exprimer ouvertement. » Il y a aussi des réflexions sur le regret maternel et la dépression post-partum et ça, on ne peut qu’applaudir !
Ces succès en disent long sur notre libido
Tout ça pour vous dire que j’ai eu envie de faire le lien avec deux cartons “récents” qui tournent autour de thématiques similaires, à savoir, la sexualité et les rapports romantiques et charnels hétérosexuels : Cinquante nuances de Grey (qu’on ne présente plus) et 365 DNI, un film érotique polonais sorti en août 2020 et qui a reçu énormément de critiques.
Pour une question d’honnêteté intellectuelle, j’ai donc regardé ce dernier film malgré moi, puisqu’il a été accusé de faire l’apologie du viol, d’érotiser le kidnapping et les agressions sexuelles. Effectivement, une des premières scènes montre clairement un viol : l’hôtesse de l’air doit faire une fellation au personnage principal et n’a clairement pas accepté la situation, de même qu’elle n’y prend aucun plaisir.
Ces succès (si on en croit les ventes de la saga 50 Shades et les tops Netflix) en disent long, selon moi, sur notre sexualité et notre libido.
Nous avons besoin de folie. D’imprévu. De bestialité. De non-monogamie. De nouveauté et de sexe sans tabou. Alors oui, toutes ces productions sont maladroites, parfois clairement gênantes ou très problématiques; elles bafouent le consentement et tombent à pieds joints dans des clichés insupportables, c’est évident. Mais ne minimisons pas leur importance. Laisser ces films dans la catégorie “des films qui excitent les ménagères de moins de 50 ans”, c’est non seulement condescendant, mais en plus tout à fait erroné. Elles réveillent néanmoins des désirs parfois enfouis depuis trop longtemps, et leur succès repose en grande partie sur les torrides scènes de sexe.
Les désirs féminins sont encore trop tus
Je crois que ces séries et films veulent clairement dire que les personnes hétérosexuelles, et en particulier les femmes hétéro, ont besoin de s’échapper et rêvent d’ailleurs. Que la sexualité est encore tellement tabou, et que les désirs féminins sont encore trop tus : on se retrouve tous et toutes à regarder les mêmes scènes érotiques à la télévision sans avoir l’air d’y toucher, alors que nos esprits rêvent secrètement parfois un peu de tout ça.
365 DNI est un mauvais film qui se complaît dans la culture du viol, la romantisation du syndrome de Stockholm et que je ne vous conseille sous aucun prétexte. La réalisation, la bande originale, le jeu d’acteur, le scénario : tout y est mauvais. Seulement, il joue aussi sur la frustration de deux humains qui aiment le sexe et les rapports charnels sauvages. La femme kidnappée prend à plusieurs reprises Massimo, le kidnappeur, a son propre jeu en lui faisant honte devant son cousin, dans son club et en éveillant clairement des envies sexuelles a son égard. Les scènes de sexe sont édulcorées mais reprennent les codes du porno mainstream, et lorsque les deux personnes sont consentantes, elles sont effectivement agréables.
Bref, SexLife, comme beaucoup d’autres séries et films romantico-érotiques, sont de puissants vecteurs de fantasmes. J’ai personnellement été choquée par les stéréotypes que véhicule cette série, ou bien sur le scénario violent qui valorise l’agresseur sexuel dans 365 DNI, force est de constater que la relation qui unit les deux personnages principaux est l’attraction sexuelle.
De plus, un point me semble important à préciser : les trois productions citées ont toutes été réalisées par des femmes, dont je ne connais pas l’orientation sexuelle, certes, mais dont les films permettent de donner deux-trois indices. Des femmes, avec leurs désirs, ceux-là même qu’on a décidé de taire pendant des décennies et qui ont aujourd’hui le terrain de jeu du film (de fiction, donc) pour mettre en image leurs envies.