Le reconfinement vous pèse déjà sur le clitoris ou la verge ? Vous cherchez un moyen de donner un coup de pouce à vos libraires indépendants et, par la même occasion, à vos parties intimes ? We got you.
Voici une liste non exhaustive d’ouvrages qui vous permettront de porter toute votre attention sur la chose après une bonne journée de télétravail. Découvrez notre sélection de D.H Lawrence à Sarah Barmak en passant par un auteur anonyme… À lire seul.e, à deux ou à 15 (mais en visioconférence, du coup).
Jouissance Club, une cartographie du plaisir, Jüne Plã (2020)
Au commencement, il y avait un compte Instagram éponyme, une illustratrice et l’envie de prendre et de donner du plaisir sans forcément passer par la case « pénétration ». En 2020, forte de son demi-million d’abonnés, Jüne Plã a réuni tous ses dessins dans un bouquin : léchage de tétons, squirt et doigt dans le cul se feuillettent sur 251 pages, sous forme de croquis explicites, mais surtout didactiques. On y découvre la véritable forme de son clitoris, où se trouve vraiment la prostate et de quoi est faite la mouille. Un genre de manuel d’éducation sexuelle inclusif avec des fiches techniques aux noms tous plus intrigants les uns que les autres : « Pouic-pouic », « Capitaine Crochet », « Pow Blop Wiiizz », « Ça tourne, Moteur » ou encore « le sourire du barbu » …
130 dessins et autant de manières de se faire jouir, avec les mains, la bouche et même le nez. De quoi tenir le coup jusqu’au déconfinement.
Morceau choisi :
« Essaie de trouver toutes tes zones de plaisir, une par une et n’aies pas peur d’aller dans des endroits où tu n’as jamais osé mettre les doigts. Oui, je pense à ton cul. Tu es seul.e et personne ne te regarde. Tu peux commencer par caresser ton anus, et une fois détendu, essayer d’y insérer un doigt ou un mini gode (il en existe de la taille d’un rouge à lèvres qui sont parfaits pour ton cul de débutant.e).
On a le droit de ne pas être attiré.e par cela et personne ne te force, mais si tu ne le fais pas parce que tu as peur de remettre en question ta « masculinité », alors laisse-moi te dire que tu te mets le doigt dans…l’œil. Ça n’est pas un plaisir réservé aux homosexuels et aux femmes, ça n’est pas non plus un truc de « soumission ». Sors-moi ces vilaines idées de ta tête et mets-les-toi dans le cul. »
Pour le trouver, rendez-vous ici.
Lucas Couillonov, un poème pornographique, Anonyme (2018)
Mais qui se cache derrière ce mystérieux poème russe du 19ème siècle ? Les rumeurs les plus folles l’ont attribué à Pouchkine, mais la piste la plus plausible serait celle d’une écriture à plusieurs mains, dans la Russie d’Alexandre 1er. Une chose est sûre, le texte a longtemps circulé sous le manteau dans les rues de Moscou, en raison de son caractère jugé obscène. Le poème utilise le mat, une forme d’argot encore taboue en Russie et toujours interdite d’utilisation dans les médias à l’ère Poutine. Le pitch ? Une veuve désespère de trouver un homme qui serait en mesure d’assouvir son appétence sexuelle, jusqu’au jour où Dame Matriona Markovna lui présente le bien nommé Lucas Couillonov, dont la réputation n’est plus à faire : d’après la gente féminine, il aurait le plus gros et plus long membre de tout l’Empire. Le synopsis est simple, mais efficace (attention, la fin risque tout de même de vous surprendre).
Lucas Couillonov est une des œuvres érotiques les plus célèbres de la littérature russe et ravira les amateurs d’obscénités désuètes et de rimes alternées.
Morceau choisi :
« Matriona merci, mais j’ai bien peur
Que ton gaillard ne soit pas de taille,
Même s’il est fin prêt à toute heure,
Je doute qu’il ait un instrument qui maille. »
Pour lire la suite, rendez-vous ici.
Filles perdues, Alan Moore et Melinda Gebbie (2008)
L’héritage du créateur des Watchmen et de V pour Vendetta n’est pas seulement composé de comics de superhéros et de vengeur masqué. Filles Perdues est un album à la fois excitant et dérangeant, illustré par les dessins de sa femme, Melinda Gebbie. Réécriture pornographique de nos lectures enfantines, la bande dessinée met en scène la sexualité débridée de trois femmes: Alice, Dorothée et Wendy, qui ne sont autres que les héroïnes de contes familiers (Alice aux Pays des Merveilles, le Magicien d’Oz et Peter Pan).
Initialement publiée dans le magazine britannique Taboo, l’histoire s’est étalée sur 16 ans avant d’être éditée en un seul ensemble, le projet ayant souvent été bloqué par les ayants droit de l’auteur de Peter Pan. Il faut avouer que la version des contes de fées d’Alan Moore et Melinda Gebbie est franchement salée : Dorothée ne se gêne pas pour revenir sur ses threesome avec le bûcheron de fer-blanc et le lion ; d’après Wendy, la fée clochette est une nympho et le capitaine crochet un gros pédo ; et au Pays des Merveilles, la Reine de Cœur dirige un véritable bordel.
Côté dessin, on retrouve les couleurs pastel et les décors art nouveau de Melinda Gebbie, qui se marient parfaitement aux partouzes des trois protagonistes.
Pour le découvrir, rendez-vous ici.
Jouir – en quête de l’orgasme féminin, Sarah Barmak (2019)
« Alors que 95 % des hommes hétérosexuels jouissent presque à chaque rapport sexuel, c’est le cas de seulement 57 % de leurs partenaires féminines. » C’est le constat déprimant à la base de l’essai de la journaliste canadienne Sarah Barmak. Un livre à mettre entre toutes les mains de celles et ceux qui n’ont pas encore trouvé ni titillé un (ou leur) clitoris. Au cours de son enquête, l’auteure s’est lancée dans un tour d’horizon du plaisir féminin : elle a rencontré des femmes qui n’avaient encore jamais joui, dans l’arrière-salle d’un sex shop de Toronto, s’est rendu jusqu’au Burning Man pour assister à une séance de méditation orgasmique, a échangé avec des acteurs du porno alternatif, lu du Freud, parcouru des textes de l’Empire romain et de la Grèce antique…
Le livre alterne témoignages personnels et analyses anthropologiques avec, toujours en toile de fond, un discours d’émancipation et de démystification de l’orgasme féminin. Résultat ? Une aventure aux confins de la jouissance qui ne se contente pas de placer le clitoris sur un schéma scientifique.
Morceau choisi :
« Nous dormions dans le même camp à Burning Man en 2013, et elle s’y est tellement plu qu’elle y est retournée chaque année depuis. Carriériste, haut placée dans le célèbre groupe médiatique qui l’emploie et l’envoie aux quatre coins du monde, elle était de retour à la playa en 2015, à la recherche de nouvelles aventures pour repousser ses limites […].
C’est alors que, avec trois de ses amies, elles sont tombées sur un lieu sans prétention affublé d’un nom évoquant pêle-mêle le vin et la fessée : Spanky’s Wine Bar. […]
Dans une petite roulotte à l’écart, elle est tombée sur une espèce de cheval d’arçon coupé en deux, affublé de deux barres pour se tenir et d’un siège auquel on pouvait accéder grâce à un petit escalier. Sur ce siège, un appareil vibratoire avait été installé. Surplombé d’une petite bosse toute ronde, il faisait à peu près la taille d’une prune. C’est là que ces dames étaient conviées à venir s’asseoir. »
Pour la suite, rendez-vous ici.
L’amant de Lady Chatterley, D.H. Lawrence (1928)
Et on termine sur LE classique de la littérature érotique. Il aurait peut-être fallu commencer par ça : un genre de Madame Bovary britannique, saupoudré de parties de jambes en l’air en forêt, entre la jeune bourgeoise Constance et un garde-chasse malheureux en ménage. Publié en 1928 à Florence, il n’a pu être imprimé au Royaume-Uni qu’en 1960, avec un procès à la clé pour obscénité (gagné par les éditions Penguin), mais surtout, trois millions d’exemplaires vendus dans les trois mois suivants. Preuve, s’il en fallait, que la réputation sulfureuse d’un livre appâte toujours le lecteur.
En 2020, les pages de L’amant de Lady Chatterley ne choqueront plus grand monde, mais ce n’est pas toujours le but. Et certains pr éfèreront le style sensuel et bucolique de D.H Lawrence, pas vraiment branché rough sex. Les scènes charnelles laissent souvent la place à des descriptions du travail des mineurs ou de la nature, et c’est plutôt de cette mixité sociale que nait la sensualité de l’œuvre. De quoi réconcilier la bourgeoisie et le monde ouvrier.
Morceau choisi :
« Dans la petite cour à deux pas devant elle, l’homme se lavait, ne se doutant pas du tout qu’on le regardait. Il était nu jusqu’aux hanches ; sa culotte de velours glissait sur ses reins étroits. […] curieusement cette expérience avait eu la qualité d’une vision : le centre même de son corps avait été frappé. […] La nudité parfaite, blanche et solitaire d’une créature qui vit seule et seule même en dedans. Et au-delà, cette beauté de la pure créature. Non pas la matière de la beauté, ni même le corps de la beauté, mais un chatoiement, la flamme chaude et blanche d’une vie solitaire qui se révèle par des contours que l’on peut toucher : un corps ! »