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« Quiet quitting » : y’a pas de honte à vouloir « juste travailler »
Est-ce la pandémie, la pénurie de main-d’oeuvre, le télétravail ? Sommes-nous la « génération burnout » ? Ou serait-ce simplement une combinaison de tous ces facteurs qui nous invite à reconsidérer notre rapport au travail?
En quelques années, nous sommes passé.e.s de la culture de la performance à une sorte de relâchement, que plusieurs ont surnommé le « quiet quitting ».
Le quiet quitting, c’est le fait de faire son job, seulement son job, sans les heures supplémentaires non payées et sans les « toutes autres tâches connexes ». C’est l’affirmation de son droit à la déconnexion et à la pause dej’ prise ailleurs que devant son écran. Une sorte de Révolution tranquille du monde du travail.
Le rêve est inaccessible au commun des mortels, et de toute façon, la Lamborghini est trop polluante.
Il faut dire que le monde du travail s’est montré particulièrement hostile aux travailleurs et travailleuses depuis plus d’une décennie. Avec des salaires qui stagnent, malgré une productivité toujours croissante et le recours toujours plus grand au travail à la pige, au temps partiel et à toutes autres formes de titres ambigus, les travailleurs et travailleuses n’ont plus de sentiment de sécurité. Sans sécurité, c’est l’appartenance qui prend le bord.
Les travailleuses et travailleurs plus âgés ont eux aussi leur quiet quitting, plus communément appelé « travailler pour sa pension ». Mais que reste-t-il, quand la pension est partie avec les meubles ?
La pandémie a exposé la fragilité du travail et a séparé les « essentiels » des autres. Le télétravail (et le retour au bureau) a fait la preuve que tout ce temps, il était possible de travailler à distance, sans s’engouffrer dans les bouchons. Et la pénurie de main-d’œuvre nous offre le choix. La tempête parfaite. Ajoutez-y l’épuisement et nombreux sont ceux et celles qui donnent leur démission.
Les capsules vidéos et TikToks motivateurs, sous-produits de la hustle culture, sont encore légion, mais leurs messages sonnent maintenant si creux, si faux. Le rêve est inaccessible au commun des mortels, et de toute façon, la Lamborghini est trop polluante.
Le grind manque d’huile depuis un bail. Qui, aujourd’hui, veut se rendre malade pour une performance qui n’inspire réellement que soi ? L’ambition est démodée.
Peut-être que le quiet quitting est une fatigue, mais peut-être s’agit-il aussi d’une petite braise. Un restant de combat des droits des travailleurs et travailleuses du passé. Peut-être que le quiet quitting est la réalisation que l’exploitation, même si elle est adoptée de plein gré, finit par montrer son vrai visage. Serait-ce le début d’un renouveau de la mobilisation ?
Peut-être que le quiet quitting est une fatigue, mais peut-être s’agit-il aussi d’une petite braise.
La montée des forums de type « antiwork » le laisse croire. De même que la « Grande Démission ». Même la réaction au terme « quiet quitting » est révélatrice. On en est offusqué.e. Il est où, le problème, dans le fait d’effectuer son job sans se tuer au travail ? N’y a-t-il rien d’autre dans la vie que la productivité ?
Qu’arrive-t-il quand cette productivité disparaît, quand la vieillesse ou la maladie se pointent : sommes-nous moins humains ? Qui sommes-nous quand nous prenons le temps de ralentir ? Voilà peut-être ce que le quiet quitting nous invite à découvrir.