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Souvenez-vous, j’avais déjà expliqué récemment que la fin de l’année scolaire s’apparentait à une course de fonds. Les fêtes de fin d’année, les spectacles de danse, les anniversaires, les rendez-vous médicaux, la fatigue générale qui s’est installée au fil des mois et la canicule qui réchauffe lourdement l’air, comme une menace. Bref, début juillet, j’étais sur les rotules. Pour sauver mon mental autant que mon physique, cette année, j’ai réussi à trouver des colonies de vacances pour mes filles. L’une qui accueille en vraie inclusion des enfants handicapés, pour mon aînée. L’autre aux mêmes dates, adaptée aux enfants plus petits (et leur doudou), pour sa sœur. Et à cela se sont ajoutés quelques jours chez leur tante et oncle en Normandie. J’ai pu me préserver quelques jours seule, c’est une denrée tellement rare que j’y ai pensé tous les jours pendant les semaines précédentes.
Avant ce grand soulagement, directement chez ma frangine pour une fête de famille, pour fêter moult anniversaires (dont celui de ma p’tite dernière).
Pour ces quinze jours de vacances, il m’a fallu organiser avec efficacité : préparer les valises des colos en respectant les listes envoyées par les organisateurs et remplir la paperasse (on n’y pense pas avant mais il y a en a beaucoup, comme une rentrée des classes), emballer les cadeaux d’anniversaire, préparer mon propre avec en prévision du travail sur un manuscrit et des recherches pour un prochain livre…
Nord ; Normandie ; Paris ; Normandie puis Nord. C’était le programme. Le jour J, je suis prête, comme une mamoune de choc. Les valises sont calées dans le coffre. Les enfants sont bien attachées. J’ai des bouteilles et des vaporisateurs d’eau, des goûters dans la glacière, la carte bleue déjà sorti pour être aux péages, la voiture a été révisée, le réservoir est plein.
Je démarre sereine, la bande originale de La Reine des neiges II à fond dans les enceintes : nous partons vers « un autre mooooooooonde » (nous sommes à fond).
Le trajet est sympa, les filles sont calmes, rien à signaler. Et nous arrivons enfin chez ma sœur, l’excitation des enfants a augmenté d’un cran. C’est alors que je vide le coffre. Et qu’il manque un élément essentiel de ces vacances. MA VALISE.
Je réalise en quelques secondes que je l’ai oubliée sur le trottoir en partant, alors que j’étais si fière de mon organisation, de mon calme, de moi. Le trajet ayant duré cinq heures, il y avait très peu de chances qu’elle fût encore à sa place. Bien sûr, j’ai contacté la police et la mairie pour les objets trouvés, les commerces en bas de mon immeuble que je connais et les voisins dont j’ai le numéro : rien.
Nous sommes le 14 juillet, je fonce au centre commercial pour prendre des culottes, deux-trois vêtements et je pleure en pensant à :
- Mon disque dur externe
- Mon ordinateur portable
- Ma tablette (elle est spéciale)
- Ma liseuse
- Mes vêtements d’été préférés
- Mon Satisfayer.
Voilà comment j’ai débuté mes quinze jours de vacances.
Mon second jour de répit seule, j’ai cassé mon téléphone portable que j’ai dû changer en urgence. J’ai aussi reçu le devis pour ma voiture : 2 300 euros. Sans ça, le contrôle technique de septembre ne passera pas. J’étais en transe dans le lit de mon squat : mon cerveau bouillonnait.
Au lieu de faire des musées, je suis restée dans le lit à regarder une série sur mon nouveau téléphone et à essayer de ne pas penser.
La fatigue avait emporté ma raison, la disparition de la valise en a été la conséquence. J’étais prête à tout : des embouteillages, la chaleur, la faim. J’avais des petits cadeaux pour les filles pour le jour de leur départ en colo. J’ai tellement pensé à tout que j’ai fini par faire déborder mon cerveau. Si j’avais fait une liste avant de partir, je suis sûre que j’aurais oublié de mettre des items dedans.
On m’a dit que c’était fort symboliquement, que c’était un signe, que je devais changer de vie (mais j’espère vraiment que c’était pour rire). Perso, je pense juste que j’étais au bout du rouleau, rincée, épuisée, fracassée, que j’avais tout donné avant ce départ et pour ces vacances. Ça m’a coûté émotionnellement, financièrement et « logistiquement » de devoir remplacer le contenu de la valise et mon téléphone pendant mes jours de répit.
Le lendemain de notre retour, ma voisine d’en face, que je croise rarement et que je connais peu, a toqué à ma porte. Elle a commencé une longue explication et a finalement sorti, masquée par sa porte d’entrée, MA VALISE. Intact. Pleine. J’ai compris qu’un passant avait pis la valise, le garagiste d’en face l’a récupérée, avec son voisin ils ont cherché mon nom et mon adresse, les ont trouvés dans mon ordi, et ont refilé le bébé à ma voisine d’en face, qui ne pouvait pas me prévenir puisqu’elle n’avait pas mon numéro de téléphone. Longue histoire à base d’ascenseur émotionnel et de grosse fatigue.
Nous sommes en août. Nous devons repartir une semaine à la fin des vacances scolaires. J’hésite à annuler. Je prépare déjà dans ma tête les valises. Et si j’oubliais une de mes filles ? Les médicaments ? Les maillots de bain ? Ma carte bleue ? Ma patience ? Ma sérénité en partie retrouvée ? Les doudous ? Les goûters ? Mon énergie ?