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Quand j’ai raté le réveil matin d’un quart d’heure

Les Cahiers de Dorothée Caratini.

Par
Dorothée Caratini
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Hier soir, j’avais bien mis mes quatre alarmes (j’ai un réveil matin qui s’allume progressivement avec le bruit des oiseaux, et trois sur mon téléphone). J’en suis sûre, persuadée, il n’y a aucune protestation possible, et je le sais puisqu’elles ont bien sonné ce matin. Je les ai entendus. Je me souviens avoir nettement pensé plusieurs fois quelque chose du genre : « allez, encore quatre minutes dans le lit ». C’est dommage que je les aies éteintes les unes après les autres, en zappant la fonction « répéter », ça nous aurait évité le stress de ce matin, aux filles et à moi.

Comme nous pouvons le voir dans cette fantastique vidéo publiée sur le non-moins merveilleux site URBANIA.fr, j’ai beaucoup trop de choses à faire le matin et pas assez de temps pour le faire. C’est chronométré : me lever, lancer le café, sortir les trucs du frigo, allez chercher les filles, les nourrir, les habiller, descendre l’aînée jusqu’à son taxi qui l’amène à l’école, me laver, débarrasser, filer à l’école de l’autre enfant.

Rentabiliser le temps et économiser ses forces, prévoir et être peinarde, tel est mon credo le matin.

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Le soir, avant d’aller me coucher, je prépare les vêtements qui seront portés et la table est mise. Un bon conseil que m’avait filé une de mes sœurs qui est vraiment malin. Les dix minutes que ça me prend le soir, ce sont dix minutes gagnées le matin. En plus, je suis beaucoup plus lente et moins efficace le matin, par exemple je fais plus d’aller-retours inutiles (je suis sûre que vous voyez ce que je veux dire, quand, par exemple, on apporte à table juste deux pauvres cuillères sur un trajet au lieu de mettre toute la vaisselle sur un plateau, on qu’on cherche partout les bols qu’on vient juste de sortir du buffet sans savoir où on a bien pu les poser) : en termes scientifiques, ce syndrome s’appelle « avoir la tête dans le c*l ».

Rentabiliser le temps et économiser ses forces, prévoir et être peinarde, tel est mon credo le matin. Ça sonne super capitaliste mais c’est la vérité : j’ai besoin de temps le matin, je refuse de ne pas manger parce que je suis à la bourre, mais c’est un sport intense, je vous promets. Et ce matin, bon ben justement j’ai eu un raté : j’ai perdu quinze minutes dans mon lit, quinze minutes au chaud sous la couette (j’ai beau être une maman solo, je suis humaine, et je déteste sortir de mon lit chaud alors que ça caille dans ma chambre) et après ça a été l’enfer. J’ai réveillé les filles alors que tout n’était pas entièrement prêt sur la table alors la grande a râlé, il manquait une tartine et une paille, et l’autre ne voulait pas commencer à manger alors que je voyais les minutes défiler sur l’horloge.

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Dans ma tête, très vite, je refaisais l’emploi du temps : si on termine le petit déj’ dans tant de temps, on a le temps de brosser les dents mais pas de débarrasser avant de partir, bref : je priorise, je hiérarchise, sans possible sans hurler. J’y arrivais à peu près jusqu’à ce que je reçoive, comme ce matin, le SMS de la chauffeuse de taxi, qui arrive toujours toujours plus tôt que prévu. « Je suis en bas dans cinq minutes ». CATASTROPHE. Une fois encore, je sens mes capacités maternelles et organisationnelles déjà fragiles s’effriter un peu plus. Mon stress monte, je répète quinze fois la même consigne à ma fille qui n’a pas enfilé ses chaussures tandis que l’autre déclare avoir besoin de se soulager aux toilettes. Je suis chonchon. Et je ne peux m’en prendre qu’à moi. Mais les filles traînent, et le taxi attend, et mon café refroidi, et je perds du temps sur tout mon planning.

Ma tension est élevée, mon rythme cardiaque aussi, alors que je ne suis toujours pas réveillée et que j’ai les cheveux mouillés.

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J’arrive à mettre mon aînée dans son transport et je remonte chez moi, j’ai envie de m’allonger par terre, la tête contre le sol, pour l’y enfoncer, comme si j’étais une autruche, mais je ne suis pas une autruche, le lave-vaisselle ne va pas se remplir tout seul et je dois prendre ma douche pour me réveiller un peu. Je colle la petite qui a encore une petite demie heure devant elle devant un C’est pas Sorcier consacré au soleil, son préféré, je file sous la douche avec une eau à peine chaude parce que ça fonctionne mal, j’ai froid, je suis en retard, je sors et je m’habille, il est 8h28, l’autre n’a pas remis ses chaussures, je lui crie de se dépêcher tout en enfilant des chaussettes, c’est vraiment nul. Alors qu’on va ouvrir la porte pour foncer jusqu’à l’école, ma petite a décidé de ne pas prendre son doudou panda à l’école mais veut la sirène, grumbulbulbulrontondju (ça c’est quand je jure très fort dans ma tête). Ma tension est élevée, mon rythme cardiaque aussi, alors que je ne suis toujours pas réveillée et que j’ai les cheveux mouillés.

Dans ces cas-là, on arrive toujours à l’heure à l’école, enfin à la limite de l’heure autorisée. L’avantage d’être dans les dernières arrivées, c’est que je croise peu de parents. Non pas que je les fuis, mais vu mon état il ne faut pas trop me parler, ces matins-là. J’aimerais tant ne pas avoir à me lever, tous les matins, tout le temps, pour l’école, la danse, la chorale ou juste pour nourrir deux enfants affamées certes très mignonnes mais qui refusent d’apprendre le fonctionnement de ma cafetière* et qui sont assez inutiles d’un point de vue logistiques.

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Il n’y a pas de solution à ce problème de réveil à part me coucher plus tôt (ou alors trouver un.e compagnon.ne de vie qui accepterait de se lever à 6h30 trois jours par semaine) (d’ailleurs ça va je trouve, franchement faites un effort). Me coucher plus tôt, ça signifie qu’une fois les filles couchées et le bordel du dîner rangé, les différents préparatifs pour le lendemain achevés, j’ai une heure de temps libre devant moi. Une heure. Soixante minutes. Que choisir ? Lire un livre ? Ça, je le fais quoi qu’il arrive dans mon lit avant d’éteindre. Regarder un épisode d’une série ? Deux ? Commencer un film ? Broder ? Chaque soir je me promets de me coucher tôt, j’échoue la plupart du temps, mais dès que j’arrive à mon lit que je dois régler les quatre alarmes, je me déteste pour le lendemain que nous allons vivre.

Et le cycle infernal des quarts d’heure perdus reprend.