Logo

Pierric Chalvin, héros démasqué d’UNITEX

Il s'est lancé dans la production de masques en urgence, la semaine dernière.

Par
Owen Barrow
Publicité

A en croire notre cher Wikipedia, les héros et héroïnes sont des “personnages réels ou fictifs de l’histoire (…) dont les hauts faits valent qu’on chante leurs gestes.” Alors je crois que j’en connais un, moi, de héros, et j’ai envie de chanter ses gestes, et ceux de son équipe. Il habite à deux maisons de chez moi. Habituellement, on se voit au moins tous les vendredis soirs, pour l’apéro, le dîner, chez lui ou chez nous. Cette fois-ci ce sera via FaceTime, confinement oblige. On a réussi à échanger quelques minutes avec lui, alors que l’urgence dans laquelle il vit, donne le vertige. Rencontre avec Pierric, héros de la région Rhône-Alpes.

En temps normal, il s’occupe de l’organisation professionnelle régionale du textile dans la région Auvergne Rhône-Alpes (première région textile de France, au passage) et anime le réseau des entreprises textile de ce territoire, lance des actions avec son équipe qui conseille, informe et oriente tous ces industriels.

Sauf qu’aujourd’hui, Pierric est chez lui, à gérer une équipe UNITEX également confinée à domicile. « Et tous nos efforts sont concentrés sur la coordination des entreprises textiles du territoire pour la fabrication de masques de protection », m’explique-t-il. L’initiative a été lancée en début de semaine dernière, le 16 mars 2020. Il n’a pas attendu longtemps pour passer à l’action.

Publicité

« J’ai envoyé un mail à l’ensemble des 170 entreprises adhérentes de notre organisation pour leur demander ce qu’elles pouvaient faire pour fabriquer des masques, c’est à dire de m’indiquer quelles étaient leurs possibilités à fournir de la matière (fils, tissus, élastiques), ainsi que leurs capacités de production ou de confection ». C’est ce qui lui a permis d’établir une première base de données avec une cinquantaine d’entreprises qui lui ont immédiatement et spontanément transmis ces informations. « J’ai tout de suite ouvert ce réseau afin que chacun puisse voir ce que proposait l’autre, ce qui a permis une mise en relation rapide. Dans le même temps, j’ai partagé cette initiative sur les réseaux sociaux, ce qui a entraîné un afflux de propositions. »

Alors que l’objectif était, à l’origine, de mobiliser la filière textile régionale, les propositions d’aide et de solidarité arrivent à présent de la France entière, voire même de l’étranger (Angleterre et Belgique) « Vu l’ampleur que cela prenait, la décision a été prise hier matin de centraliser tout cela sur une plateforme nationale ».

Difficile de savoir ce que cela implique pour une entreprise (bien qu’elle soit dans l’industrie du textile) de changer du tout au tout, de se mettre à produire ou confectionner un produit tout à fait différent du jour au lendemain. Évidemment, c’est très compliqué. Très compliqué car il faut « adapter les outils de production, former dans un délai très court les collaborateurs et obtenir les matières pour fabriquer ces masques ». Un changement radical « mais les entreprises y sont arrivées en moins d’une semaine ».

« J’ai eu en ligne un médecin urgentiste du CHU de Grenoble qui m’a appelé et m’a dit: on fait face à une pénurie de masques, c’est l’horreur. »

Publicité

Quand on demande à Pierric quel a été l’élément déclencheur d’une telle opération, la réponse est claire. « J’ai eu en ligne un médecin urgentiste du CHU de Grenoble qui m’a appelé et m’a dit: on fait face à une pénurie de masques, c’est l’horreur. Les soignant.e.s, les infirmier.e.s, même ceux qui viennent de l’extérieur, ambulanciers, pompiers n’ont pas de masques. La crise est en train de prendre de plus en plus d’ampleur, c’est dramatique: il faut nous fournir des masques par tous les moyens ». La mission d’UNITEX, dans cette « guerre » que traverse la France, c’est d’être un apporteur de solutions, face à cette pénurie de masques.

D’autant que de nouvelles pénuries risquent, à coup sûr, de voir le jour dans les prochaines semaines. « Depuis 2 jours, il y a un autre besoin faisant appel aux compétences textiles qui arrive: ce sont les blouses du personnel soignant qui sont rapidement jetées une fois utilisées, étant donné que le virus peut rester sur le vêtement… » Il y a donc un besoin de roulement important et les stocks ne permettent pas d’y répondre aujourd’hui.

Publicité

Persuadé que tout le monde a un rôle à jouer dans cette crise, « quel que soit son poste, sa fonction ou sa mission », à commencer par aller « voir si ses voisins n’ont pas besoin d’aide pour leurs courses, ou autre », assure Pierric. Car cela ne dépend pas du métier que l’on exerce ou de la fonction qu’on occupe: on peut tous être solidaires, même à distance face à cette crise.

Alors que l’opération a été lancée il y a maintenant tout juste une semaine, on souligne déjà une « mobilisation très forte » et de « bonnes volontés » des industriels selon les dires de Pierric. « Mais on se heurte à une lenteur des services administratifs de l’Etat. Alors j’imagine bien qu’ils font face à une crise sans précédent qui demande de l’organisation, mais c’est souvent rageant et incompréhensible lorsque l’on est sur le terrain de devoir attendre des réponses, des validations, homologations ou certifications qui ne viennent pas. On a l’impression de perdre énormément de temps, qui serait très précieux pour beaucoup de monde ».

Alors Pierric: héros ou pas héros? On a choisi notre camp.

Publicité
Commentaires
Aucun commentaire pour le moment.
Soyez le premier à commenter!