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Pass sanitaire : une colère qu’il faut savoir écouter

Au risque de ne plus s'entendre du tout.

Par
Ouissem
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Je vais tout de suite mettre les choses au clair avant que des personnes soient scandalisées par mon titre : je fais partie de ces gens qui ont fait le tour des centres pour être vacciné avant même l’ouverture de la vaccination aux adultes. Je suis convaincu que le vaccin est la bonne solution pour lutter contre l’épidémie et cela fait aujourd’hui plus d’un mois que j’ai reçu mes deux doses de Pfizer.

Toutefois, une chose m’agace particulièrement en ce moment avec le débat autour du pass sanitaire et de la vaccination obligatoire pour les soignants, les pompiers (et de facto pour les personnes qui travaillent dans des établissements recevant du public) : j’ai l’impression que toute personne qui se dit contre l’application du pass sanitaire ou qui ne souhaite pas se faire vacciner à l’heure actuelle passe immédiatement pour un complotiste décérébré.

Il y a une semaine, plus de 100 000 personnes ont manifesté un peu partout en France contre le pass sanitaire et l’obligation du pass sanitaire. Certes, les têtes de gondoles de ce mouvement ne donnent pas envie de marcher avec eux. Difficile de se dire que l’on risque de défiler derrière Florian Philipot, Francis Lalanne, Jean-Marie Bigard ou encore Nicolas Dupont-Aignan. La colère des Français.es a été largement récupérée par l’extrême-droite et autres « anti-vax » extrémistes.

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Pourtant, j’ai pu voir dans les défilés beaucoup de diversité et des revendications légitimes portées par une foule plutôt populaire qui rappelle les rassemblements des gilets jaunes. Car derrière les dérives de certains qui prennent de plus en plus de place médiatique (comparaison avec le nazisme, étoile jaune, etc), se cachent aussi de nombreuses personnes qui ont surtout manifesté pour demander davantage de libertés face aux restrictions gouvernementales.

« Tous ceux qui sont dans la manifestation sont contre le pass sanitaire, rien à voir avec la vaccination. »

« C’est une manifestation citoyenne, rien à voir avec les meetings politiques de beaux parleurs qui récupèrent la colère des gens », s’exclame le gilet jaune Jérôme Rodrigues lors d’une manifestation ce mercredi à Paris. « Tous ceux qui sont dans la manifestation sont contre le pass sanitaire, rien à voir avec la vaccination. Vous avez vu les dingueries qu’ils sont en train de faire ? Jusqu’à licencier les gens qui ne sont pas vaccinés. Beaucoup de gens ont des questions sur les vaccins car il y a beaucoup d’amalgames faits sur les médias mainstream », ajoute le militant.

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Il faut dire que la gestion de la pandémie par le gouvernement a entraîné une grande méfiance d’une partie des Français.es envers les politiques : les déclarations contradictoires autour du masque, les applications aléatoires des restrictions de déplacement et la question des moyens donnés aux soignants lors de la crise n’ont pas aidé à crédibiliser la parole des ministres et du président de la République.

« Je suis sa pute à Macron, moi ? »

« Moi, je n’étais pas forcément contre le vaccin. Mais maintenant qu’ils veulent nous l’imposer, je n’ai plus envie de le faire. Je suis sa pute à Macron, moi ? », se scandalise Benoît. « Moi, j’ai dû faire mon vaccin pour aller à la salle de sport. Sinon, je ne l’aurais pas fait, je n’en ressentais pas du tout le besoin. Ils disent ce qu’ils veulent, mais le gouvernement a rendu la vaccination obligatoire alors qu’ils avaient promis l’inverse », se désole Aymeric.

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De nombreuses personnes opposées aujourd’hui au “pass de la honte” disent aussi préférer attendre le vaccin produit en France par l’entreprise Sanofi qui doit sortir d’ici la fin de l’année. « Je ne suis pas anti-vaxx, je suis juste contre les vaccins à ARN messager. J’attends les vaccins Sanofi et/ou Valneva pour me faire vacciner », explique Jean-Michel.

En effet, le vaccin de Sanofi Pasteur, actuellement en phase 3, utilise la technologie de la protéine recombinante. « C’est ce qu’on utilise pour la vaccination grippale, une technologie éprouvée qu’on utilisait depuis quelques années […], avant l’arrivée de l’ARN messager », avait indiqué Olivier Bogillot, président de Sanofi France, au micro de France Inter le 5 juillet dernier.

Malgré tout, l’urgence d’atteindre l’immunité collective se fait de plus en plus pressante en France avec plus de 20 000 cas chaque jour. Et d’après une étude réalisée par la Drees (Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques), plus de 80% des personnes contaminées ne sont pas vaccinées. La vaccination est efficace pour réduire la dangerosité du virus, en témoignent le nombre d’hospitalisations et de décès qui sont beaucoup moins importants que lors des précédentes vagues.

Il faut plus que jamais faire preuve de pédagogie pour faire avancer concrètement les choses, plutôt que de nous monter les uns contre les autres.

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Et même si nous disposons de toutes ces données, il faut savoir écouter les colères qui émanent des Français.es qui manifestent contre le pass sanitaire et qui se questionnent par rapport à la vaccination. Ce n’est pas en leur répondant avec condescendance et infantilisation que l’on arrivera à faire avancer les choses. Au contraire, cela risque de participer à une certaine fracture de la société française et à leur “radicalisation” vers des intox autour de ce sujet.

Profitons des débats en cours au Parlement autour de la loi sur le pass sanitaire pour mettre au clair les vraies informations et débunker les fake-news. Puis, tant qu’à faire, tentons de le faire de manière apaisée, contrairement à ce que l’on peut parfois voir du côté de l’hémicycle. Nous valons mieux que ça. Il n’y a pas de gentilles personnes pour la vaccination et des méchants anti-vaxx : la situation actuellement est beaucoup plus complexe et il faut plus que jamais faire preuve de pédagogie pour faire avancer concrètement les choses, plutôt que de nous monter les uns contre les autres.

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