On a discuté de la lune bleue d’Halloween avec une vampire, un loup-garou et une sorcière (pour de vrai)

Je vais commencer cet article par une affirmation sans équivoque: j’adore la lune.

Je l’aime quand elle est pleine, je l’aime en croissant, je l’aime même quand on ne la voit pas.

Samedi soir, à l’occasion de l’Halloween, la lune sera pleine. Mais ce n’est pas tout: un phénomène très rare est sur le point de se produire… on aura droit à une lune bleue. Et toute une.

Pour commencer, non, la lune ne sera pas réellement bleue. L’appellation « lune bleue » signifie que pour la deuxième fois en un mois, une lune pleine brillera dans le ciel. En effet, la lune a été pleine le 1er octobre et le sera de nouveau le 31 octobre. Donc en plus d’avoir été une année assez intense merci, 2020 comptera 13 pleines lunes plutôt que 12.

Il faut aussi savoir qu’une lune bleue survient tous les deux ans et demi, ce qui en fait déjà un événement digne de mention. Mais une lune bleue qui apparaît à l’Halloween, nuit des morts et des esprits, c’est encore plus rare. La dernière date d’il y a 19 ans.

Vous pensez que c’est tout? Oh que non: cette année, l’ensemble de la planète pourra admirer la lune bleue le même jour. Ça prend 12h pour que la lune passe d’un hémisphère à l’autre et samedi, elle se lèvera assez tôt pour avoir le temps d’être pleine et visible partout sur le globe, le jour de l’Halloween. Selon la NASA, la dernière fois qu’un tel événement s’est produit, c’était en 1944, en pleine Seconde Guerre mondiale.

Bon: observer le phénomène d’un point de vue astronomique, c’est cool, mais qu’en pensent les principaux intéressés, c’est-à-dire les créatures de la nuit? Pour répondre à cette question quelque peu spooky, on s’est entretenu avec une sorcière, une vampire et un loup-garou. Mais genre, pour de vrai!

« Je trouve cette lune très enthousiasmante, déclare d’emblée Fanie Demeule, autrice et sorcière Wicca, âgée de 30 ans. Pour moi, une pleine lune, c’est symbole d’énergie qui circule, de renouveau, de bilan et d’introspection. » À chaque pleine lune, Fanie prend le temps de déposer un petit bol d’eau sur le bord de sa fenêtre, afin de la charger d’énergie. Elle utilise ensuite le précieux liquide tout au long du mois, dans son bain ou pour nettoyer ses cristaux. Elle prend aussi le temps de dresser une liste de ce qu’elle souhaite laisser derrière, et de la brûler à la flamme d’une chandelle.

« Je trouve ça incroyable que cette rare lune bleue survienne en pleine pandémie, alors qu’on dit qu’il s’agit de l’événement global le plus important depuis la Deuxième Guerre mondiale. Et le fait que ce phénomène lunaire ne se soit pas produit depuis cette même guerre, ça crée une boucle fascinante. Pour moi, ça résonne beaucoup, me confie celle qui pratique la magie depuis ses 11 ans. Dans un sens, cette lune me rassure et représente un baume sur beaucoup d’émotions difficiles associées à ce qu’on vit en ce moment. Comme la pleine lune symbolise le renouveau, je vois ça comme une belle occasion de faire un nettoyage énergétique. »

Pour Fanie Demeule et beaucoup d’autres sorcières, la fête d’Halloween (également appelé Samhain par les communautés Wicca) marque la nouvelle année. « Il y a quelques rituels que j’ai l’habitude de faire tous les 31 octobre. Je fais brûler de l’encens et des bougies, je porte des pierres noires, je crée un autel avec des offrandes alimentaires, comme des pommes, des citrouilles ou de la courge, je passe du temps en nature et je favorise le contact avec les esprits, m’explique la jeune sorcière. Je tire aussi mon tarot pour l’année. C’est toujours de beaux moments d’introspection et de bilan pour moi. »

Ce samedi, pour souligner l’extraordinaire conjoncture de la pleine lune bleue et de la fête des Morts, la sorcière compte réaliser un gâteau divinatoire, basé sur une tradition irlandaise, pour la toute première fois. « C’est un peu comme une galette des Rois. Et comme cette pleine lune est en taureau, le signe associé aux sens et au self-care, c’est cohérent de la souligner à travers la nourriture et l’exaltation des sens. ».

« Être dans le bois, un soir de pleine lune, et hurler en meute, c’est l’une des expériences les plus libératrices que tu peux vivre. » Oui, quelqu’un m’a vraiment dit ça cette semaine, le plus sérieusement du monde. Ce quelqu’un, c’est Ludovik Letellier, un jeune homme de 28 ans. Adepte des Grandeurs nature et de différents jeux de rôles depuis l’adolescence, Ludovik a l’habitude de personnifier des loups-garous. « C’est arrivé un peu par hasard, affirme celui qui se fait appeler Varka. Il y a quelques années, pendant un GN, je me suis fait mordre et contaminer par un loup-garou, et j’ai décidé d’adopter ce personnage. » Le jeune homme, qui travaille comme éducateur spécialisé dans la « vraie vie », m’explique qu’il apprécie le côté bestial, sauvage et primitif du loup, mais aussi l’aspect spirituel et sacré qu’il incarne dans certaines cultures. « J’aime également le fait que les loups se tiennent en meute. Ça apporte beaucoup à certaines situations de jeux, d’être en groupe ». Le loup-garou ajoute: « J’ai des souvenirs incroyables de GN dans la forêt, organisés par des nuits de pleine lune. La luminosité de la pleine lune crée un décor naturel magnifique pour nos jeux. Aussi, on dirait que les nuits de pleine lune, il y a une énergie particulière qui circule » affirme le loup-garou, au bout du fil.

Et en ce 31 octobre de pandémie, notre Werewolf of Drummondville hurlera-t-il à la lune? « Malheureusement non. J’ai souvent organisé des activités des soirs de pleine lune ou à l’occasion de l’Halloween, mais cette année, à cause de la pandémie, ce n’est pas possible de se rassembler. C’est dommage, parce que les deux événements tombaient le même soir. Je pense donc revenir à l’essence de ce qu’est l’Halloween, et en profiter pour passer une soirée calme et introspective. »

Nuit de mercredi à jeudi, 2h28 du matin. J’ai oublié de mettre mon téléphone sur « Ne pas déranger ». Un message texte me tire de mon sommeil: « 1:30 tomorrow works for me. Talk to you then. — Alicia ». Croyez-le ou non, ce texto reçu au beau milieu de la nuit m’a été envoyé par nulle autre que la reine des Vampires. J’aime absolument tout de ça.

Alicia, c’est la reine de la Vampire Court, une organisation montréalaise qui rassemble des gens qui s’intéressent à la spiritualité, la sorcellerie, la sexualité et l’énergie. La jeune femme, qui complète une maîtrise en aumônerie interreligieuse, accorde une grande place au vampirisme et à l’ésotérisme dans sa vie: « Je célèbre toujours la pleine lune, me confie la vampire. Je prends le temps de méditer, de faire de l’introspection et de formuler des intentions pour le prochain cycle lunaire. » Alicia m’explique aussi que pour elle et ses compères vampires, la fête d’Halloween est un événement très important, puisqu’il marque le début d’une nouvelle année. « D’habitude, on se réunit autour d’un grand festin, on allume des bougies sur des autels avec des offrandes et on célèbre les personnes décédées. » m’explique la Queen. Sauf que cette année, à cause du COVID, les vampires se tourneront vers une célébration virtuelle, en se rassemblant sur Zoom. Oui, oui les mesures sanitaires s’appliquent aussi aux créatures de la nuit!

Alicia poursuit sa réflexion sur l’extraordinaire lune bleue du 31 octobre 2020: « Le croisement entre une blue moon et l’Halloween, c’est comme une double ouverture entre les mondes des morts et des vivants. L’énergie et les esprits risquent de circuler de manière extrêmement puissante! » déclare la jeune femme. Elle m’explique qu’elle sera présente aux célébrations virtuelles avec sa communauté, mais qu’elle se réservera également un moment seule pour rendre hommage à des personnes décédées. « J’ai perdu des êtres chers cette année, donc je vais profiter de la lune bleue de samedi pour penser à eux et honorer leur vie. » Pour Alicia, le fait que le rare phénomène lunaire se produise en plein coeur d’une pandémie mondiale est une belle opportunité pour prendre un moment de réflexion et même, de procéder à une forme de “reset”. « On traverse une période tellement difficile et stressante, on a toutes et tous besoin de moment de calme et d’introspection », conclut la vampire.

Qu’on croit ou non aux influences des astres, aux esprits en visite pendant la nuit de l’Halloween et aux vertus un peu magiques de la lune bleue, la vampire, la sorcière et le loup-garou sont unanimes. Tout converge vers l’introspection et le renouveau. Nul besoin de boire du sang, de hurler à la lune ou faire un rituel chamanique avec des cristaux: se poser des questions sur sa vie, prendre conscience de ce qu’on veut laisser derrière, penser à ceux et celles qui nous ont quittés, ça vaut toutes les lunes bleues du monde.