Les tristes de records de la France

En 2018, la France a remporté pour la seconde fois la Coupe du Monde de foot. Mais depuis ce deuxième trophée, et la remontada inespérée d’Emmanuel Macron dans les sondages d’opinion à la faveur de cette victoire, elle s’est surtout illustrée sur le plan international en établissant de bien tristes records. Et contrairement à ce que sa réputation de pays au mille fromages pourrait laisser penser, il ne s’agit pas du plus grand nombre de personnes ayant développé une intolérance au lactose. En voici quelques-uns.

D’après un rapport paru le 5 novembre, et établi à la demande de la Commission européenne qui a mis en place cet été une nouvelle réglementation sur les services numériques (le DSA) pour exiger davantage de transparence sur les contenus diffusés par les géants du web, les utilisateurs hexagonaux de X (le nouveau nom de Twitter), seraient les plus violents de l’U.E. Ainsi, parmi les 27 membres que compte la communauté des États européens, c’est notre pays qui remporte la palme du plus grand nombre de messages supprimés.

En effet, sur la seule période du 28 août au 20 octobre 2023, 16 288 messages ont été retirés de la plateforme française, contre 7160 en Allemagne et 7743 en Espagne, qui est pourtant le pays le plus actif sur le réseau en termes d’utilisateurs. Parmi les contenus éliminés, plus de 4000 messages avaient un caractère de harcèlement, et 6000 tweets contenaient des propos violents. Mais comme la moitié des internautes français.es seraient prêt.es à lancer une vendetta pour un mésusage du mot chocolatine, on ne s’étonne qu’à moitié…

Là encore, sinistre cocorico : selon les données d’Eurostat (une institution européenne chargée de l’information statistique à l’échelle communautaire) en 2021, on comptabilisait 3,32 accidents mortels au travail pour 100.000 personnes en France, contre 1,7 en moyenne au niveau européen. Un taux d’incidence affolant, qui nous place donc juste derrière la Lettonie (4,29), la Lituanie (3,75) et Malte (3,34). Mais devant la Roumanie (3,11).

Pour les personnes qui souhaitent désormais s’expatrier à la lumière de cette info, sachez que les Pays-Bas ne se démarquent pas uniquement par leur politique libérale en matière de drogues récréatives et par leur passion pour les fleurs à bulbes. Ainsi, l’autre pays du fromage est celui dans lequel les employé.es courent le moins de risques de mourir au boulot (avec un taux d’incidence de 0,33%). Une excellente raison de chercher les offres d’emploi disponibles chez nos voisin.es néerlandai.ses, même si cela signifie troquer sa fourme d’Ambert pour un morceau de gouda.

La France, au coin ! Les classes des collèges français sont les plus chargées des États membres de l’U.E, qui sont également membres de l’O.C.D.E. Et avec les suppressions constantes des effectifs dans l’enseignement public depuis plusieurs années, que les personnes qui tombent de leur chaise en lisant cette info lèvent le doigt… Ainsi, d’après un rapport annuel de la DEPP (le service statistique du Ministère de l’Education Nationale) sur la période 2019-2020, tandis que la moyenne chez nos voisins était de 21 élèves par classe, les profs de l’Hexagone faisaient souvent face à 26 pré-ados, pas toujours très enthousiastes à l’idée d’en découdre avec l’histoire géo.

Et ce n’était pas mieux en primaire. Car là encore, notre pays porte le bonnet d’âne avec 22 écoliers en moyenne, contre 19 ailleurs dans la communauté européenne. La bonne nouvelle, c’est qu’à défaut de former les jeunes esprits, les enseignant.es pourront éventuellement former des équipes de rugby. Eh oui, 15 titulaires et 7 autres sur le banc, c’est pile ce qu’il faut pour disputer un tournoi.

D’après le sociologue Sebastian Roché, directeur de recherches au CNRS, la police française est la plus meurtrière d’Europe, si l’on prend en compte le ratio du nombre de morts par rapport au nombre d’habitant.es. Il précise qu’à partir des données disponibles (récoltées dans la presse, sur les sites des ONG, ou auprès des institutions étatiques qui daignent les fournir, mais aussi fruits de collaborations avec d’autres sociologues européen.nes), on peut affirmer que la police française tue le plus dans deux cas : celui des tirs policiers en intervention, et lors d’opérations de maintien de l’ordre. Pour parvenir à ces conclusions, il a répertorié sur la période allant de 2011 à 2020, le nombre de décès imputés à des tirs policiers, rapporté à la taille de la population des pays étudiés. Une fois ce taux obtenu, il a pu effectuer des comparaisons entre pays. Et le résultat est glaçant : la police et la gendarmerie en France auraient tué par tirs, 50 % de plus que la police allemande, et 377 % de plus que la Grande-Bretagne (Angleterre et Pays de Galles). Et petite précision : ces calculs excluent les décès lors d’opérations anti-terroristes.

Même constat d’échec lors des opérations de maintien de l’ordre : alors qu’entre 2018 et aujourd’hui, aucun décès n’a été recensé dans les autres pays européens au cours de manifestations, en France, trois personnes sont mortes (Zineb Redouane, Steve Maia Caniço, et Mohamed Bendriss décédé cet été). Là encore, on aimerait bien pouvoir faire semblant d’être surpris, mais quand on sait que nous avons la seule police européenne qui utilise encore des grenades de type explosiveslors de rassemblements, et que l’Etat a également assoupli en 2017 les conditions d’emploi des armes à feu par les forces de l’ordre en leur donnant la possibilité d’en faire usage même hors de la légitime défense, on ne tombe pas vraiment des nues.