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Les tours de force d’Aya Nakamura

« Djadja » power.

Par
Clémence Carayol
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Aya Nakamura est l’artiste française la plus écoutée à l’étranger (sur Spotify) et aussi la plus unapologetic. Elle s’impose et détruit les stéréotypes. Même Rihanna se trémousse sur ses chansons. À l’occasion de la sortie de son nouveau titre, “Jolie nana”, on tente de décrypter le phénomène « Djadja ».

« Djadja ». Ce titre, c’est Aya Nakamura, jeune française de 25 ans (à peine) aux origines maliennes, qui l’a signé en 2018. C’est aussi ce qui l’a propulsée sur le devant de la scène musicale française. Quelques mois après, « Pookie » l’a confirmée au rang de star internationale. Et cette année, Aya a sorti « Jolie nana » qui rythme l’été 2020. Le titre est devenu aussitôt un hymne féministe. Son refrain « jolie nana recherche joli djo » a été repris par les twittos pour se transformer en slogans comme ici:

https://twitter.com/ca666iopee/status/1289643933341872128

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Les paroles des chansons d’Aya ont toutes un point commun : mettre sur le devant de la scène des femmes fortes, confiantes, unies. Les paroles de « Djadja » avaient d’ailleurs été reprises pendant la gigantesque manifestation parisienne contre les violences sexistes et sexuelles en novembre dernier. En plus d’être devenue un emblème féministe, Aya Nakamura est désormais l’artiste française la plus écoutée à l’étranger. Même la géante Rihanna se trémousse sur ses sons, sans parler de Madonna et de ses filles qui reprennent « Djadja » et se déhanchent sur dessus avec joie.

https://www.instagram.com/p/B62BpZRh7Ub/?utm_source=ig_web_copy_link

Après avoir conquis un public international, la reconnaissance de ses pairs ne s’est pas faite attendre: ses albums ont raflé d’innombrables disques de certification, allant du diamant à l’or en passant par l’argent. Pas de doute, la jeune femme brille de mille feux.

Loin du cliché de la fille qui boit du vin rouge à Saint-Germain

Pourquoi ? Comment ? Telle est la question.

Pour le journaliste musical Azzedine Fall, ex figure emblématique des Inrocks, le succès d’Aya Nakamura repose sur les « tours de force » de la jeune femme. Le premier, c’est d’avoir su se démarquer malgré une musique qui répond à des standards commerciaux. Mais c’est véritablement le morceau « Pookie » qui a opéré « une réunion des publics » autour de la jeune femme.

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« C’est un morceau qui s’inscrit par son côté easy listening mais la production est plus poussée, plus recherchée, et correspond presque à un son underground. » Voilà comment Aya aurait réussi à jouir « d’une nouvelle crédibilité en se faisant accepter par un public différent, aux standards plus pointus ».

Et puis Aya Nakamura est unapologetic. Sa personnalité est un véritable tour de force, indissociable de son succès. Elle est bien dans son corps aux formes harmonieuses et sa couleur de peau est sa fierté. Elle donne « une autre image de la Parisienne, beaucoup plus représentatif de la réalité », que celle du « cliché de la fille qui boit du vin rouge à Saint-Germain ». En 2019, Aya Nakamura avait été interviewée par le quotidien américain The New York Times, auquel elle avait d’ailleurs confié avoir grandi sans icônes féminines noires et françaises. « Il est temps que ça change », avait alors asséné la jeune femme.

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Pour Azzedine Fall, il est « choquant qu’il n’y ait pas eu une chanteuse française noire au succès si retentissant bien avant Aya Nakamura». Un peu comme Omar Sy dans le monde du cinéma. D’autant que leur singularité n’équivaut pas à une juste représentation: ils sont tout de suite « mis dans la case de l’artiste noir de leur spécialité».

«Le jour où une femme noire aura autant de succès qu’Aya Nakamura, on va inévitablement la comparer à elle parce qu’elles seront toutes deux noires et donc forcément dans la même catégorie ». Aya Nakamura va devenir une sorte de baromètre pour mesurer le succès d’autres jeunes femmes noires.

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« C’est regrettable », lance Azzedine Fall qui estime qu’être une femme noire dans cette industrie est encore difficile. « Il revient à l’industrie musicale de la reconnaître et de la faire reconnaître en tant qu’Aya Nakamura, et pas juste en tant que femme noire au succès éclatant. »

Aya va devoir continuer à se battre pour « ses singularités et ses chansons » incomparables. Elle est loin d’avoir dit son dernier mot.