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Les soirées pyjama sont maintenant CANCEL (sur TikTok, du moins)

Certains parents disent non aux dodos chez les amis.

Par
Laurence Niosi
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Passer la nuit chez des amis représente une activité aussi indissociable de nos souvenirs d’enfance que de jouer dans la ruelle ou de construire des bonhommes de neige. Pourtant, l’activité est maintenant remise en question par de nombreux parents. Ce rite de passage est-il désormais révolu ?

Regarder des clips en boucle sur M6 Music. Louer des films trop adultes au club vidéo du coin et les regarder sur la télé du salon. Se disputer pour la manette de Nintendo. The Craft. Les frites congelées McCain. Impossible de penser à mon enfance sans évoquer ces souvenirs (coucou les années 90).

En effet, c’est toute une nouvelle génération de parents qui s’y oppose. Les milléniaux sont-ils devenus des parents poules, surprotecteurs et étouffants, ou font-ils plutôt preuve d’une grande lucidité ?

Sur TikTok, une mère et avocate américaine, Erin Bailey, expliquait le mois dernier dans une vidéo vue presque 4 millions de fois pourquoi elle ne permet pas à ses enfants d’aller coucher chez des amis.

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Parmi les raisons évoquées : le risque d’agressions sexuelles de la part d’un membre de la famille ou d’une connaissance de l’enfant, ou encore, la présence d’armes dans la maison.

Ailleurs aussi, des débats de mères pour ou contre les dodos chez les amis enflamment TikTok. « Tu ne connais jamais réellement les autres parents. J’ai fait des sleepovers plus jeune et j’ai détesté, donc je ferai pas subir ça à mes enfants (sic) », écrit une utilisatrice du réseau social.

Éviter les histoires d’horreur

Geneviève* a entendu trop d’histoires d’horreur relatives à des agressions sexuelles pour laisser ses enfants de 4 et 6 ans découcher.
* Nom d’emprunt.

« Pour moi, c’est une question d’avoir la conscience tranquille. J’ai trop peur que quelque chose arrive pendant un sleepover et c’est à moi de les protéger », nous confie cette mère de 35 ans qui a souhaité garder l’anonymat.

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Elle fait cependant une exception pour les grands-parents « deux fois par année ». Car même les plus stricts des parents dérogent à leurs propres règles, en laissant les enfants passer la nuit chez les tantes, ou encore les amis aux parents séparés, mais seulement pendant la semaine de garde de la mère. Ils font donc confiance à la famille et aux femmes.

En France, dans plus de 9 cas sur 10, l’auteur présumé d’une agression sexuelle est un homme ou un garçon, et 8 femmes victimes de viol sur 10 connaissent leur agresseur sexuel.

Me Chanel Alepin, une avocate et TikTokeuse, s’est récemment mêlée au débat, dénonçant le militantisme de certains parents.

« C’est comme si les enfants avaient le besoin absolu d’aller faire un dodo chez des amis. Est-ce qu’en les empêchant de découcher, on les empêche d’avoir des souvenirs? C’est aux parents de décider et de voir ce qu’il existe comme risque pour leurs enfants », souligne-t-elle.

Aux États-Unis, 45 % des parents se disent « surprotecteurs », dans un sondage mené en janvier 2023 par Pew Research.

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Et selon un sondage de YouGov, certaines communautés le seraient encore plus en matière de sleepovers. Ainsi, si 80 % des adultes blancs permettraient « certainement » ou « probablement » leurs enfants à passer la nuit chez des amis, seuls 55 % des adultes hispaniques et 50 % des adultes noirs déclarent qu’ils autoriseraient leurs enfants à le faire, selon ce sondage américain réalisé en ligne l’hiver dernier.

Le sleepunder comme alternative

En cette ère de parents précautionneux, ou surprotecteurs selon certains, les enfants ne perdent-ils pas une partie de leur indépendance, de leur éveil et de leur compréhension du monde externe ? Sont-ils moins exposés aux familles qui vivent et fonctionnent différemment de la leur ? C’est l’avis des partisans des soirées pyjama.

Et pour les parents, ces soirées représentent aussi une nuit sans enfants, un échange de faveurs avec d’autres parents, des amis ou des voisins.

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Julie*, elle, ne voit pas de problème à envoyer son plus grand de 9 ans chez des connaissances.

« C’est quand même moins effrayant si tu connais les parents. Au primaire, on les connaît bien. Je leur parle tous les jours devant l’école, on fait des activités. Au lycée, j’imagine qu’on ne va pas voir les parents », dit cette mère.

Question de trouver un compromis, un nouveau phénomène commence à faire son apparition aux États-Unis : le sleepunder.. L’idée est de laisser ses enfants ou adolescents rester chez des amis jusqu’au soir, parfois même jusqu’aux petites heures du matin, sans cependant passer la nuit, les parents venant les récupérer juste avant le dodo.

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Julie n’est toutefois pas convaincue par cette nouvelle tendance parentale mi-figue mi-raisin. « C’est quoi, le but ? Tu refuses carrément l’activité, dans ce cas. »

Le sleepunder aura au moins l’avantage de permettre aux enfants de passer de bons moments sans trop faire angoisser les plus poules des parents.