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Les mots qui ont des étymologies de cul

Par
Louise Pierga
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Amis de la langue française, amateurs d’étymologie désopilante, condisciples de la cocasserie linguistique, bien le bonjour ! Vous devez commencer à le comprendre, l’étymologie c’est mon violon d’Ingres (expression que l’on doit bien sûr au musicien Ingres qui aimait toutefois se consacrer à la peinture à ses heures perdues et à l’époque on a trouvé ça tellement fifou d’aimer deux trucs en même temps qu’on en a fait une expression). Quoi de mieux donc que de parler de cul pour embarquer les foules dans cette passion débordante ? Car vous le découvrirez bien assez vite, les mots qu’on utilise tous les jours ne sont pas toujours aussi prudes qu’ils en ont l’air.

Une marmite poilue

On n’aurait pas imaginé qu’une vieille marmite eut un lien quelconque avec la schnek. “Ben si”, comme dirait la magistrate de Ni juge ni soumise. C’est la magie de l’étymologie. A la base, on a un adjectif “marmite” synonyme de “hypocrite”. Mais pourquoi donc ? Feu Alain Rey_ la Beyoncé de la linguistique, émet l’hypothèse suivante : “marmite” serait composé de l’onomatopée “marm” s’apparente à un murmure ou au ronronnement du chat. D’autant plus que la marmite est creuse et profonde, cachée d’un couvercle, contrairement aux poêles plates, à nu, offerte à la première cuiller en bois venue (hyper impudiques ces poêles).

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Autre trajectoire éventuelle : une “minette” qualifiait une cuvette au XIIIe siècle et il est possible que le mot “marmite” se soit imposé pour désigner par opposition les grosses cuves. Pas forcément flatteur d’associer l’appareil génital féminin à une cuve mais ce n’est pas comme si on n’était pas habituées à en prendre pour notre grade. Pour vous réconforter, vous retiendrez que “vanille” vient du latin ”vagina” qui signifie “gaine” et par extension “vagin”, c’est moins dégradant.

La porcelaine ou la brillance d’un vagin de truie

La porcelaine n’a rien à voir avec la laine mais beaucoup avec le porc. Mot apparu pour la première fois dans les récits de voyage de Marco Polo, la porcelaine vient de l’italien “porcella”. Cette femelle du pourceau sert à qualifier à travers les mots de Marco certains coquillages à la céramique dure et brillante qu’il a croisés sur son chemin. Suffisant pour que notre voyageur historique y visualise une teuch de truie. No judgment. Mais un peu judgment quand même.

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Canicule et virgule, de la chienne à la verge en folie

La canicule étant tristement devenue un marronnier estival, vous aurez certainement déjà lu que les racines du mots proviennent de l’univers canin (littéralement, “canicule” veut dire “petite chienne” en latin) tout simplement parce que canicula est l’étoile la plus lumineuse du ciel faisant partie de la constellation du Grand Chien. En principe, rien d’érotique là dedans sauf pour les zoophiles.

Pour ce qui est de la virgule, c’est plus inattendu puisque le latin “virgula”, soit “petite branche”, partage sa sémantique avec la “verge” rapport à la forme incurvée du signe de ponctuation qui n’est pas sans rappeler la courbure chaotique d’un phallus. D’autres mots renvoient au service trois pièces masculin sans qu’on s’en doute comme l’orchidée (du grec “orkhis” qui veut dire “testicule”), dont la racine a la forme… d’un testicule, pourquoi irait-on chercher plus loin ?

Un sacré bordel ce boucan

Déverbal de “boucanner” qui se disait pour “imiter le bouc” il a pris le sens au XVIIIe siècle de “fréquenter des mauvais lieux”, ce qui est assez cohérent car le bouc renvoie symboliquement à la débauche. Le boucan fut donc pour un temps synonyme de “bordel” et plus largement d’un lieu de débauche (au XVIIIe, une boucanière était d’ailleurs une prostituée), bruyant par nature, c’est pourquoi il a sémantiquement évolué vers une façon de qualifier le bruit, un peu comme le bordel finalement.

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Le pauvre bougre hérétique

Au Xème siècle, nombre de Bulgares étaient taxés d’hérésie, notamment les Bogomiles qui rejettent les sacrements du mariage. Par évolution sémantique, “bulgare” s’est transformé en “bougre” pour désigner ces malheureux qui mènent une vie cachée et misérable (c’est aussi de là que vient l’adjectif “rabougris”) élevé dans le dégoût des actes de chair. Agnès Pierron (*) rappelle toutefois que jusqu’au XVIIIe siècle, le mot “bougre” était associé à l’homosexuelité (un truc qui n’avait pas bonne presse à l’époque) avant de se transformer en formulation affectueuse certes mais aussi condescendante… tant qu’on ne les traite pas de gros “con”. Car, faut-il le rappeler, le “con” désigne là encore injustement nos malheureuses schnecks (à ce sujet lisez le récit érotique de Louis Aragon Le con d’Irène, c’est un délice de drôlerie) comme en témoigne l’expression cunnilingus basé sur le même latin “cunnus”.

Porter un toast au cul de la crémière

Si le “toast” a des airs d’english il vient pourtant du french “toste” au sens appréciable de tartine de pain grillé. Mais qu’est-ce qu’une tranche de pain carbonisée vient fiche dans le fait de boire à la santé de quelqu’un ou de quelque chose ? Traditionnellement, on porte un toste pour célébrer la maîtresse de maison, pour cela chaque convive trempait la fameuse tranche de pain grillé dans son verre de vin, le morceau symbolisant la madame. Est-ce que ça donne envie de se faire toaster ? Pas vraiment.

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On se quitte là dessus, n’oubliez pas que les pommes de terre (les fécules) sont des cousines étymologiques du caca (matières fécales) mais c’est encore une autre histoire que je vous réserve pour un prochain article…