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Les mots dont le sens était sous notre nez depuis le début

Par
Louise Pierga
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Amis de la langue française, compatriotes de l’étymologie désopilante, camarluches de la cocasserie linguistique, bonjour·soir (ici on pratique l’écriture inclusive temporelle). Vous pensiez peut-être que notre friponne de langue n’avait que des mystères à nous offrir ? Eh bien non. Certains mots n’ont aucun secret et livrent leur sens en toute limpidité au palier de leur prononciation.

Vous aviez peut-être remarqué que les gendarmes portaient souvent des armes ? C’est normal, il y avait un indice dans leur nom puisque c’est la contraction de “gens d’armes”. Vous pourrez pas dire que vous n’étiez pas prévenu la prochaine fois que vous serez menacé de mort pour refus d’obtempérer alors que vous faisiez juste votre “midinette”. Nous parlons bien sûr de votre pause déjeuner, puisque la “midinette” composée de “midi” et “dînette” renvoie initialement à une brève pause déjeuner que prenaient les jeunes ouvrières parisiennes du début XXe siècle. On a vite fait d’associer cette expression bassement alimentaire à une manière de désigner les filles frivoles, naïves… et sans doute un peu dupes puisque que l’adjectif bêtifiant résulte de la contraction “être de huppe”, cet oiseau qu’on a vite fait de juger aussi stupide qu’un pigeon ou une oie.

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Heureusement, les midinettes d’aujourd’hui ont de quoi se consoler avec une bonne tisane de pissenlit, qui n’a pas volé sa qualité de “pisse-mémé” puisque le nom de cette jolie fleur aux vertus diurétiques est composé de l’élément verbal “pisser” et de “lit”. On remercie au passage Victor Hugo qui a couché pour la première fois l’expression “manger les pissenlits par la racine” dans Les Misérables pour évoquer la mort. Pas besoin toutefois d’avoir lu les aventures de Jean Valjean pour savoir qu’il vaut mieux boire une infusion aux pissenlits avant de se coucher qu’une tasse de vinaigre : du vin “aigri” par la production d’acide acétique (et aussi par l’inflation mais c’est une autre histoire). Et si ça ne vous plaît pas, chialez ! Vous pisserez moins. Puisque “chialer” ne signifie rien d’autre que “chier par les yeux”, très chic. On y pensera à deux fois avant d’imposer sa diarrhée oculaire devant un épisode de Animaux à adopter sur W9. Des simagrées, voilà tout ! Et puisque vous me le demandez, non ça ne m’agrée pas du tout. “Simagrée” étant la substantivation de “si m’agrée” ou plus précisément “si cela m’agrée”. Et quand on parle de simagrées, qui vient forcément pointer le bout de son nez ? Les saltimbanques, of course. A en croire l’origine du mot emprunté à l’italien “saltimbanco”, ceux-là courent les cachets en pratiquant leur activité favorite : “sauter-en-bancs”. Le banc désignant au XVIe siècle l’estrade du bateleur dans les foires ; de l’estrade à la scène, il n’y a qu’un pas… franchi par le premier humoriste en herbe venu. Une herbe pas toujours bien fraîche pour ces chiendents de l’humour, des “dents de chiens” qui ont donné son nom à la mauvaise herbe.

Au regard de toutes ces étymologies dénudées, on risquerait bien de se faire avoir par d’autres racines trompeuses. Un spermophile n’a rien à voir avec une personne assoiffée de liqueur séminale, mais désigne un petit rongeur qui amasse des graines dans son terrier. Eh oui parce que “sperme” ça vient d’abord de “semer”, dans le sens de “semer des graines” bande d’obsédés. Pareil pour la choucroute qui n’a rien d’une “croûte de chou” comme son nom pourrait le laisser croire, puisque… roulement de tambour : la choucroute vient de l’allemand “Sauerkraut”, “kraut” signifiant “chou” et “sauer”, “aigre”… Le “chou” linguistique de la choucroute n’a rien d’un “chou”.

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“Maintenant”, lâchez-moi la main. C’est exactement ce que vous faisiez avec ce gérondif qui se prend pour un adverbe alors qu’il est le participe présent du “tenir quelque chose dans sa main”. WHAAAAT ? Too much ébourriffance l’académi francé ma parole.