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Félicitations : vous vous êtes rendus à la fin de 2023, une année qui, sur plusieurs plans, manquait de beauté, de vision, d’émerveillement. Avant de tourner la page, allons voir s’il y a de quoi se consoler du côté des logos qui sont nés dans les 12 derniers mois (la réponse est toujours oui). Parce que les bonnes résolutions, ça se mesure en dpi (cherchez sur Google), et ça s’applique d’abord au design graphique.
En passant, l’image ci-dessus est mon hommage maladroit mais sincère à l’artiste plasticienne Françoise Sullivan, qui a soufflé ses 100 bougies au mois de juin.
Les meilleurs
Le retour du peps
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Le vénérable Pepsi fêtait cette année son 125e anniversaire en s’offrant un nouveau logo. Il faut avouer que son prédécesseur, vieux de 15 ans, combinait un pictogramme étrange et une typographie mal fichue. Rien pour impressionner le rival de toujours, le mot-en-C. Le nouveau logo puise dans l’héritage de la marque et replace le nom PEPSI en plein milieu, là où il aurait toujours dû être. Le but est justement de se recentrer sur ce qui fait la marque : les vagues rouge et bleu, la simplicité, l’intemporalité. Pour que ça mousse, on a ajouté une bonne dose de vibe des années 70-80, et pschhhh! le tour est joué.
T’aurais pu faire médecine
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Parfois – trop rarement –, une bonne blague donne naissance à un logo. C’est le cas de MadeForMed, une plateforme (comme son nom l’indique) de gestion des soins, qui simplifie la prise de rendez-vous médicaux et la communication. Tant qu’à s’adresser à un médecin, autant leur parler dans un langage qu’ils sont les seuls à comprendre. Voilà donc un logo volontairement illisible et complètement risible. Évidemment, les réactions sont mitigées – je l’ai même retrouvé dans une liste des pires logos –, mais je tiens à saluer une audace bien trop rare dans ce milieu plutôt frileux. Merci à l’agence Graphéine, c’est fou.
Helvétique cas
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Je ne pensais jamais dire ça d’un cabinet d’avocats, mais Lenz & Staehelin, c’est d’abord un monogramme, c’est-à-dire un genre de version condensée du logo qui n’affiche que la combinaison des lettres L&S. On admire, puis on découvre le « vrai » logo et ses multiples déclinaisons, qui vont de la papeterie aux parapluies, en passant par le site web et… les barres chocolatées. Cette identité visuelle joyeuse et enveloppante est une création du studio zurichois Raffinerie. Et la loi, dans tout ça ? Elle va bien, merci. Ce sera tout, votre Honneur.
Patates d’écran
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Le logo de Too Much To Watch était facile à manquer, car il s’agit d’une conférence de la Royal Television Society, une organisation caritative et éducative qui promeut l’art et la science de la télévision en Angleterre. Pas de quoi s’exciter, donc ? Détrompez-vous, car le Studio Kiln a concocté une imagerie loufoque et mouvante, inspirée par le titre de l’événement : trop de choses à regarder. Les lettres s’entassent, se déforment et cherchent à envahir l’espace dans une avalanche de couleurs vives. Hello, le design mou.
C’est du bonbonk
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GonkBonk est un site dédié à la culture BD et manga. Comme si son nom n’était pas assez bondissant, le designer roumain Vadim Carazan en a rajouté une couche en empilant les deux O verticalement, et en les transformant en un point d’exclamation géant. Le logo s’adapte en permanence au contexte, et, dans la plupart des déclinaisons, ce gros ! attire notre attention par une couleur ou une texture distincte. Un bonk coup.
Par-ci par-là
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Puisque Think Forward est un groupe de réflexion sur l’avenir social et technologique de notre monde, il est normal que son image de marque questionne, incite et démontre. Dans sa grande sobriété formelle, le logo du rapport 2024 illustre un phénomène assez connu : la capacité de notre cerveau à « autocorriger » un mot dont une lettre aurait été remplacée par un autre signe. Si vous voulez briller au réveillon, précisez qu’il s’agit d’un effet marginal de la loi de clôture (ou loi de fermeture) de la théorie de la Gestalt. Ici, deux flèches remplacent un K et un A sans affecter la lisibilité des mots. En regardant de plus près, on s’aperçoit que 1) ces flèches ont quand même été dessinées pour ressembler aux lettres manquantes, et que 2) chacune symbolise son mot : vers l’intérieur pour la pensée, vers l’extérieur pour l’avenir. Brillant.
PEANUT de fusée
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Quel est l’amuse-gueule préféré des voyageurs cosmiques (anglophones) ? Les Astronuts ! Cette savoureuse blague se double d’un nourrissant concept marketing : des noix mélangées contenues dans des cannettes, COMME DANS L’ESPACE ! Le logo n’exploite rien de plus que le concept de base en donnant à la visière du casque la forme de cacahuète. La gamme Astronut ressemble à un assortiment de boissons énergisantes aux dégradés psychédéliques – sauf le Space Fruit Mix, qui reste gris comme un monolithe. Une création intergalactique du studio suédois Jesper Holm.
Logo-mollo
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Parlons un peu de ce fameux Jell-O (le dessert gélatineux, pas Jennifer Lopez). Il s’est gâté cette année en remplaçant avantageusement son logo bof-bof par un logo rigolo, mieux harmonisé avec sa vibrante identité. Faut-il le rappeler, le Jell-O est un aliment dont la valeur esthétique est inversement proportionnelle à la valeur diététique. Le studio BrandOpus a donc misé sur un design simple et percutant qui conserve le rouge, mais devient plus massif, avec un joyeux élan du côté du O. Ajoutons un effet de vieille 3D qui rappellera leurs jeux d’enfants aux plus de 35 ans, et nous voilà prêts pour le dessert.
Poireau en gros
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Silo, c’est une entreprise américaine qui s’est donné pour mission de responsabiliser tous les acteurs de la chaîne d’approvisionnement alimentaire. Le fond est vertueux, et la forme satisfaisante. L’agence californienne Gold Front a produit un maximum d’impact avec un minimum de signes. Simple, solide, stylé. Seul le vert forêt évoque le végétal dans cette composition massive et géométrique dont la puissance permet une lisibilité sur tous les supports et à toutes les tailles.
Les pires
Ornithocide
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Si le rachat de Twitter par Elon Musk a fait couler autant d’encre et noirci autant de pixels, c’est parce qu’il représente un acte entrepreneurial d’une rare violence. Sans ménager ses employés ni ses clients, le multimilliardaire a tué le jovial oiseau bleu pour faire naître une entité pas mal moins sympathique nommée X. Autant le défunt volatile était rond et bleu, autant le nouveau symbole paraît lisse et froid. On murmure d’ailleurs que Musk aurait lui-même dessiné la chose… ou plutôt emprunté la lettre dans une police existante. En tout cas, le noir n’est pas la couleur la plus douce, et les angles vifs du X ne sont pas exactement feng shui. L’oiseau ne gazouillera plus.
Le miracle de la vie
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Le logo de la Maison de naissance Anne-Courtemanche, située à Montréal, a fait le tour des internets au printemps dernier. Ou, plus exactement, une photo de ce logo prise sous un angle qui renforce la ressemblance entre ce qui est dessiné et ce qu’on veut y voir. Apparemment, le « graphiste » qui a engendré cette œuvre essayait de représenter le corps (décapité, ben oui) d’une femme enceinte assise. Et personne, dans le comité de validation, n’y a vu autre chose. Personne ne s’est donc opposé à ce que la façade de la maison de naissance soit ornée de ce saisissant symbole de fertilité.
Formule Enrichie
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La Formule E était censée contenter tout le monde : ceux qui voulaient s’abreuver de sport automobile et vivre le nightlife, et ceux qui protestaient contre la pollution atmosphérique et sonore, le pouvoir du fric, et les jeunes femmes à louer. Mais l’électrification des bolides ne semble pas tout régler. Au départ, il faut une vision, et cette vision doit unifier et convaincre. Maintenant, regardez ce logo. Une scripte en dégradé semi-assumé, avec un « e » géant. Un ABB arrivé tout droit des années 80. Un FIA sorti des années 60. Un pauvre WORLD CHAMPIONSHIP coincé au milieu. Il manque deux ou trois cliparts pour que ça ressemble à une page MySpace : on n’ira pas loin avec ça.
On s’en FOUT
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Quelque part, un roi a été couronné, en mai 1823. Ah ! Mais non, on m’informe que c’était en mai 2023 ! Désolé, je m’étais fié au design de l’emblème officiel du couronnement de Charles III.
BLOOM-BLOOM
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Ces deux logos, apparus cet automne, semblent être nés dans la même pouponnière. Et pourtant. Bloom a vu le jour à New York en octobre, et incarne une application d’autothérapie, alors que Bloon a poussé son premier cri le mois suivant à Paris, et qu’il représente un siège ballon ergonomique. Notons au passage que les deux entreprises existent depuis plusieurs années et possédaient déjà un logo. Quoique troublante, la ressemblance entre leurs noms et leurs identités visuelles peut difficilement être attribuée à autre chose que le hasard, combiné à une tendance actuelle de glisser un élément « fluide » dans une typographie géométrique. Tant pis pour l’unicité!
Trop mignon pour mordre
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En ligne depuis près de 20 ans, Reddit s’est forgé une réputation de plateforme d’information et de discussion où les opinions se libèrent et les idées avancent. La dernière évolution du logo récemment dévoilée et signée Pentagram témoigne de la popularité du site : en devenant « grand public », il rentre dans le rang et perd son mordant. Snoo, le robot-mascotte, a toujours affiché un sourire, mais celui de la dernière mouture le fait ressembler à un ours en peluche, pendant que le traitement 3D évoque l’univers de Disney-Pixar, et que la typographie pourrait être celle d’un supermarché. Trop gentil, le robot ?
Une grosse frite avec ça ?
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Non mais où le nouveau logo de Döner Haus a-t-il bien pu puiser son inspiration? Un indice : leur slogan est « Bite me, lick me, eat me good ». Bon appétit. Sachez quand même que PornHub leur a envoyé une mise en demeure, parce qu’ils veulent bien exploiter des femmes, mais ils ne rigolent pas avec les droits d’auteur.
Perdre ses morceaux
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Autrefois synonyme de robustesse – surtout grâce au légendaire modèle 3310 –, Nokia n’a pas su négocier le virage intelligent dans le peloton de tête. Le manufacturier finlandais existe pourtant toujours et vient de confier à l’agence new-yorkaise Lippincott le premier rafraîchissement de son image de marque depuis 45 ans. Malheureusement, le résultat semble coincé dans les années 2010, quand la tendance incitait à couper des morceaux de lettres pour « faire futuriste ». On y était presque.
On ferme !
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Ne cherchez pas le scandale dans le nouveau logo de WeWork : le problème est plutôt dans le timing. L’ex-flamboyante jeune pousse américaine qui réinventait le co-travail a dévoilé, en début juin une identité (très, très subtilement) retravaillée. Début novembre, elle déclarait faillite. Le nom WeWork prend soudain une toute autre connotation.
Mention spéciale
Planète saturée
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COP28 : Bon. Pour le logo, on cherche un élément qui symbolise nos enjeux. Des suggestions ?
Les participants : Des oiseaux ! Une princesse ! Un avion ! Un cheval ! Dix éoliennes ! Un volcan ! Un immeuble néoclassique ! Cinq arbres ! Un flamant rose ! Des panneaux solaires ! Un lamentin ! Un gars en kayak ! Deux chameaux ! Des méduses ! Deux satellites ? [Ils continuent pendant 20 minutes.]
COP28 : OK, on a recueilli 53 idées, on choisit laquelle ?
Les participants : TOUTES!
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Vous pouvez maintenant éteindre votre écran, respirer profondément et aller vivre des choses vraies et sincères avec vos proches. L’année qui vient est remplie de possibilités et d’espoir : à vous de jouer.