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Les groupes Facebook de daronnes : soutien nécessaire ou environnement toxique ?
Mamans à la maison !, Mamans Et Futures Mamans, Ça va maman, MAMAN AUX AFFAIRES, Le Club des Mamans (interdit aux papas ;))… Tellement de groupes qui me sont apparus sous les yeux en tapant « maman » dans la barre de recherche sur Facebook que j’ai mis de côté l’idée de tous les compter.
Il y a des groupes de mères pour presque toutes les régions, goûts et/ou activités que vous voulez faire. Je me suis rapidement sentie dépassée.
Pour y voir plus clair, qui de mieux qu’une adepte d’un groupe de mères pour m’initier à ce monde qui n’en n’était qu’à ses balbutiements quand j’ai accouché de mon premier enfant ? Ni une ni deux, j’ai contacté mon amie Karine qui a accouché de son premier enfant il y a bientôt cinq ans. Dans notre bande d’amies proches, elle arrivait bonne dernière. Les nuits infernales, les couches qui débordent, le mal aux tétons … on était déjà toutes passées par là. Et on était beaucoup plus dans la gestion des devoirs et des activités parascolaires que dans la recherche du meilleur moment de la journée pour réussir à prendre une douche. Bien que ça nous faisait plaisir de l’écouter et de la conseiller, elle a trouvé plus de réconfort dans son groupe de moms.
« Je suis tombée sur le groupe des Mamans de mon quartier pendant mon congé de maternité 2019-2020 et ça a cliqué tout de suite », raconte-t-elle.
En partageant avec des mères qui ont toutes accouché à peu près en même temps, Karine a pu tisser des liens avec des femmes qui vivaient la même chose, au même moment.
Ç’a été son espace pour ventiler au beau milieu de la nuit quand elle avait mal aux seins à force d’allaiter et qu’une autre mère était « au bout du fil » pour lui parler à des heures impossibles. « On parle même de séparation, de sexualité… de plein de sujets qu’on vit à travers nos maternités. C’est vraiment bienveillant. C’est un safe space. »
Quand le safe space devient le wrong space
L’expérience d’Élise a été moins réjouissante que celle de Karine. Elle en a d’ailleurs long à dire sur le groupe qu’elle « fréquentait » quand ses enfants étaient jeunes. « C’est impossible de, genre, demander une recommandation de resto kids friendly sans se faire dire : “Montessori / le plastique et les BPA / Quoi tu manges au resto? Ben voyons y a bien trop de sel ! ». Bon. Elle exagère un peu, mais n’empêche que je suis certaine que vous voyez très bien de quoi elle parle.
C’est d’ailleurs là le « danger » de ces nombreux groupes Facebook qui se veulent bienveillants. « Quand on rentre dans les comparaisons, il y a un risque associé », souligne la psychologue Geneviève Beaulieu-Pelletier. « Si c’est une comparaison qui vient normaliser, c’est une chose, mais si c’est finalement pour me comparer et me diminuer, ou chercher à être comme l’autre, c’est là qu’il faut faire attention. »
Elle donne l’exemple des difficultés d’allaitement. C’est cool, de trouver quelqu’un qui vit la même chose que toi, mais si cette personne-là trouve des trucs et s’en sort et que toi, avec tous les trucs possibles et imaginables, ça ne marche toujours pas, tu risques de commencer à te diminuer ou même à ressentir de la honte par rapport à ça. Même chose quand tu regardes les photos de la mère qui vient de confectionner un beau jouet en bois Montessori pour son enfant quand t’arrives à peine à faire un pain aux bananes sans chialer.
Savoir s’arrêter
Élise raconte qu’il lui est déjà arrivé de retirer des posts parce que les commentaires qu’elle recevait lui faisaient plus de tort que de bien.
« Avec le temps, j’ai compris qu’il valait mieux aller chercher de l’info pertinente ailleurs et j’étais mieux entourée par mes voisines et mes amies. »
La psychologue Geneviève Beaulieu-Pelletier mentionne qu’il n’est parfois pas facile de quitter un groupe qui, malgré ses défauts, a pu nous apporter du soutien. « Quand on voit que ça nous cause plus d’anxiété, ou qu’on en est à avoir une vision plus négative quand on a consulté notre fil d’actualité et qu’on a vu certains posts du groupe, c’est bon de prendre une pause. » Encore faut-il s’en rendre compte…
Groupe privé… ouais, ouais
Même s’il faut répondre à quelques questions pour être admise dans un groupe de mères sur Facebook, c’est facile de bullshitter. Il ne m’a fallu que quelques heures pour être admise dans certains groupes de quartier alors que je n’y habite pas.
Tout ça pour dire que tu ne sais jamais vraiment qui se trouve sur les différents groupes « privés »… et que tout ce que tu publies pourrait se retrouver ailleurs, genre sur des groupes créés pour rire des autres.
C’est le cas du groupe ASSEZ DES GROUPES DE MÈRES qui se moque d’autres groupes de daronnes. On y rit d’une maman qui parlait du deuil de son bébé en commentant : « Ça va faire de la place en crèche », et on ne se gêne pas pour partager des screenshots d’enfants qu’on trouve laids juste pour se moquer.
Toxiques, les groupes Facebook de mamans ? À l’occasion. Mais sur Internet, il n’y a pas grand recoin qui n’a pas le potentiel de devenir un terrain glissant. Suffit de faire attention, quoi. La photo que tu partages naïvement sur un groupe de mères peut se retrouver la risée d’un autre groupe. Elle pourrait même se retrouver ici. Mais on sait vivre.