Logo

Les grosses ont aussi le droit d’être stylées

Et elles n'attendent pas votre autorisation pour l'être.

Par
Amandine Sanchez
Publicité

Nous sommes nombreuses à avoir passé de longues minutes devant le miroir à se pincer la peau des cuisses ou du ventre. A avoir gigoté dans tous les sens pour pouvoir rentrer dans notre jean et se persuader que non, on n’a pas grossi ! Parce qu’on nous a appris qu’être grosse signifiait être moche et pas désirable.

« Dire que ce qui est beau est mince est un préjugé », affirme la psychosociologue Catherine Grangeard, autrice de Comprendre l’obésité chez Albin Michel. La faute à l’industrie du cinéma et de la télé, où les femmes minces sont les seules à décrocher un premier rôle. La faute à la publicité, qui nous promet monts et merveilles si on achète la crème anti-cellulite/peau d’orange/vergetures. La faute à l’industrie de la mode, qui ne propose que des vêtements jusqu’à la taille 42 alors que la taille moyenne des Françaises est le 44.

Prenons l’une des émissions phares de M6, Les reines du shopping. Derrière son ton humoristique qui aide à faire passer la pilule, la présentatrice et conseillère en image Cristina Cordula assomme les femmes d’injonctions : « On couvre ses bras après 50 ans, surtout s’ils pendent », « pas de jupes courtes quand on a des grosses cuisses » ou « les décolletés en V quand on a de la poitrine, c’est vulgaire ».

Publicité

Comme beaucoup de jeunes femmes, Virginie Grossat connaît ces diktats par cœur et a décidé de les ignorer. Passionnée de mode, elle partage volontiers ses tenues sur ses comptes Instagram et TikTok qui cumulent plusieurs centaines de milliers d’abonnés. « Je n’ai pas peur de montrer mes cuisses qui se touchent. J’estime que je peux tout porter ».

@virginiegrossat

Je fais ma Fashion week plus size à la maison 🔥 lemoisfashion #fashionweek #parisfashionweek #plussize #grandetaille #fashiontiktok

♬ Hello Bitches – CL

Le culte de la minceur

Les magazines de mode comme Vogue s’accordent pour faire de la tenue « débardeur et jean taille basse » de Bella Hadid le must du style. Mêmes éloges lorsque Kendall Jenner ou Hailey Bieber sortent en cycliste et t-shirt oversized. « On considère qu’elles ont un bon style car elles sont minces et ont un corps taillé pour les vêtements », estime Catherine Grangeard.

Publicité

Si les lignes bougent, on trouve encore peu de femmes rondes dans les publications de mode. Pourtant, ce n’est pas par manque de style. Des modèles comme Ashley Graham, Paloma Elsesser ou Precious Lee, véritables porte-étendards du mouvement de libération des corps, récoltent des milliers de likes sur leur Instagram à chaque tenue postée.

Lors d’une interview pour le magazine allemand Focus en 2009, Karl Lagerfeld, alors directeur artistique de Chanel, avait affirmé : « La mode, ce sont des rêves, des illusions. Personne ne veut y voir des femmes rondes ». Un raisonnement qui trouve encore un écho aujourd’hui puisque seulement 18% des défilés comptaient au moins un mannequin « grande taille » lors de la dernière Fashion Week parisienne, selon le site spécialisé dans les statistiques de mode Tagwalk.

Publicité

Pourtant la demande est bien là. « J’aimerais voir plus d’inclusivité chez les mannequins et pouvoir m’habiller avec des marques de luxe », reconnaît Virginie Grossat.

Casser les codes

L’intérêt d’habiller les personnes qui sortent du 36-42, certains créateurs l’ont bien compris. Jean-Paul Gaultier était l’un des premiers créateurs à valoriser des corps « hors normes », dont la chanteuse Beth Ditto, qui avait ouvert l’un de ses shows en 2011. De Christian Siriano à Moschino, de nombreuses marques ont intégré des mannequins plus size à leurs défilés. Le label français Ester Manas est allé encore plus loin. Pour la dernière fashion week parisienne, la marque a choisi un casting composé en majorité de femmes plus size. Les collections sont même pensées pour s’adapter aux corps des femmes grâce à des matières extensibles et des jeux de cordons.

Cette libération des corps ne se fait pas sans résistance. Et les influenceuses en chair sont les premières à en faire les frais. Virginie Grossat avoue que ce qui la blesse le plus, c’est lorsqu’on l’accuse de promouvoir l’obésité à travers ses publications. « J’estime être séduisante et avoir le droit d’être bien dans ma peau ». Ce qu’elle préfère, c’est aider ses abonnées à s’accepter. « J’adore recevoir des messages de femmes qui me disent qu’en me voyant porter des robes courtes et montrer mes cuisses qui se touchent, ça leur donne envie d’oser ».

Publicité