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Le pire des jeux vidéo de 2022

Une année de hauts hauts et de bas bas (gauche-droite-gauche-droite-B-A).

Par
Pier-Luc Ouellet
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Dans le monde des jeux vidéo, 2022 a été une année à cheval entre la pandémie et « la vie normale » (comme dans les autres sphères de la société).

D’un côté, on a eu droit au retour triomphal de grosses franchises et à l’arrivée de nouvelles franchises prometteuses. Mais on a aussi eu droit à beaucoup de déceptions qui sentaient le « mouais, on n’était pas vraiment équipé.e.s pour développer un jeu en pleine pandémie, sorry, tout le monde ».

Reste que 2022 était quand même une meilleure année que 2021 en matière de jeux vidéo. Alors que God of War OU Elden Ring auraient pu remporter le titre de jeu de l’année des Game Awards lors de n’importe quelle année (c’est finalement Elden Ring qui est reparti avec les honneurs), le gagnant de 2021, It Takes Two, n’aurait pu gagner qu’en 2021, même si c’est un bon jeu.

Bon, peut-être que si It Takes Two était sorti en 1983. il aurait aussi gagné, mais aucun Atari n’aurait pu faire tourner ça.

Malgré cette reprise partielle de l’industrie du jeu, on a quand même été bien servi.e.s en termes de déceptions vidéoludiques. On vous guide dans cette année de mauvaises notes Metacritic et de ragequit.

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1. Mario Strikers Battle League

Écoutez, le nouveau jeu de soccer/football (je me fous de ce débat stérile, appelez ça comme vous voulez) n’était pas mauvais en soi. En fait, le jeu paraît bien sur Switch, et les mécaniques de jeu sont amusantes, rapides et étonnamment stratégiques.

Mais c’est aussi l’exemple parfait d’une fâcheuse tendance de l’industrie dans laquelle Nintendo a sauté à pieds joints dans les dernières années.

Avant, quand on achetait un jeu, il était complet. Le contenu sur la cartouche était le contenu que le jeu offrait. Aujourd’hui, grâce à Internet, il est possible d’ajouter du contenu et de corriger des défauts bien après la sortie.

En théorie, c’est une bonne chose. Sauf quand on vous vend un jeu incomplet et qu’on décide qu’on le complètera plus tard… une fois que vous aurez payé.

Mario Strikers venait avec un mode solo anémique et une liste de personnages tellement courte qu’il était presque impossible de ne pas retrouver les mêmes personnages dans les deux équipes.

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L’attrait de cette édition de la série était la fameuse Battle League, qui nous proposait de former un club en ligne avec nos ami.e.s pour affronter d’autres joueurs ou joueuses. L’ennui, c’est que c’était difficile de former un club parce que personne ne voulait acheter le jeu, parce qu’il n’y avait à peu près aucun contenu…

… ce qui m’amène à mon dernier point. Oui, les développeur.euse.s finissent par ajouter plus de contenu avec le temps, mais seulement si le jeu se vend bien. Mario Tennis Aces était aussi sorti avec une sélection de personnages plutôt limitée, mais on en a rajouté un bon nombre au fil des mois, parce que le jeu s’est bien vendu.

Or, pour Mario Strikers, la situation fut tout autre : le 13 décembre (soit presque exactement six mois après la sortie du jeu), la dernière mise à jour a été lancée. Au total, ce ne sont que quatre personnages qui ont été ajoutés, et pas vraiment de mode solo.

Désolé pour les naïfs qui ont acheté le jeu à sa sortie en espérant un jeu complet (je m’inclus là-dedans).

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2. L’E3 est mort, vive euuuuh… quoi déjà ?

Il n’y a pas si longtemps, l’E3, qui avait lieu en juin, était le Noël des gamers. Pendant une semaine, les joueurs et joueuses s’agglutinaient devant leurs écrans pour regarder des hommes d’affaires habillés d’un blazer et d’un t-shirt geek leur promettre une avalanche de jeux vidéo à venir.

C’était exagéré, c’était racoleur, mais c’était excitant. Mais quand j’y suis allé en personne en 2019, on sentait déjà que la grande messe commençait s’essouffler : Nintendo ne présentait déjà plus de conférence en présentiel depuis quelques années, alors que Sony avait boudé l’événement au complet.

Puis, il y a eu la pandémie, et ça fait trois ans qu’il n’y a pas eu d’E3.

Il y a bien eu quelques initiatives qui ont tenté de remplacer l’événement-phare du calendrier vidéoludique, dont le Summer Game Fest mené par Geoff Keighley, l’homme derrière les Game Awards, mais ce n’est pas pareil. Cet été, le Summer Game Fest n’a fait que présenter une liste interminable d’émules plus ou moins excitantes de Dead Space, dont j’ai aujourd’hui oublié le nom.

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Les organisateurs de l’E3 nous promettent que l’événement reviendra à l’été 2023. Mais les développeur.euse.s et éditeur.trice.s auront-il envie de revenir ? Faut pas trop se faire d’illusions.

3. Babylon’s Fall

Je sais que la plupart d’entre vous n’ont probablement pas entendu parler de ce jeu, et c’est probablement le point le moins grand public de tout cet article. Mais c’est important pour moi et c’est mon article, alors je vais en parler, ok ?

Babylon’s Fall est un jeu développé par Platinum Games, le studio derrière des jeux tels que Bayonetta et Astral Chain, et l’un de mes studios favoris. Voir le logo de Platinum Games sur une pochette, ça ne vous garantit pas un bon jeu, mais ça vous garantit au minimum un jeu intéressant.

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Le problème avec Platinum, toutefois, c’est que l’entreprise fait des jeux très nichés qui parlent à un public de passionné.e.s (un jeu qui demande de contrôler une sorcière qui s’habille avec ses cheveux et qui se met nue pour invoquer des démons cheveux, ça ne sera jamais aussi populaire que FIFA). Du coup, elle est toujours sur le bord de la faillite.

Pour remédier à cette fâcheuse situation, Platinum a décidé de créer Babylon’s Fall, un jeu qui adopterait toutes les tendances à la mode pour faire beaucoup d’argent. Un titre axé sur le multijoueur ? Check. Des mises à jour constantes pour garder les joueuses et joueurs accrochés longtemps ? Check. Des tonnes de microtransactions ? Check, check, check.

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Le problème, c’est que pour que ces stratégies fonctionnent, il faut généralement que le jeu derrière soit bon. On peut dire ce qu’on veut de Fortnite, mais ce n’est pas un mauvais jeu. Et c’est ce que Babylon’s Fall semble avoir oublié.

Le résultat ? Le jour du lancement, seuls 1200 joueurs et joueuses étaient connectés. Il y a plus de monde aux parties de l’Océanic dans mon Rimouski natal. Et quelques semaines plus tard, il n’était pas rare de voir un seul joueur connecté. UN.

Ce qui devait arriver arriva : on a annoncé la fermeture des serveurs, ce qui fera des disques de Babylon’s Fall rien de plus que de jolis sous-verres. Et les finances de Platinum Games demeurent aussi incertaines que d’habitude.

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4. L’industrie du jeu vidéo est pleine d’agresseurs et tout le monde s’en fout

Vous pensez que le monde de la culture a le monopole des agresseurs ? Ne mettez pas le pied dans un studio de jeux vidéo, vous allez paniquer.

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Il y a quelques années, le mouvement #MeToo a pris d’assaut le monde du jeu vidéo. Et quand on a ouvert les portes du garde-robe, on s’est rendu compte que les squelettes étaient plus nombreux que les chemises (les développeurs aiment mieux les t-shirts quoiqu’il arrive).

Activision-Blizzard, l’un des plus gros joueurs de toute l’industrie (Call of Duty, c’est eux), a été particulièrement pointé du doigt. On a dénoncé une culture de frat boys, où les femmes sont constamment victimes d’harcèlement sexuel, voire d’agressions.

Vous pensez que le monde de la culture a le monopole des agresseurs ? Ne mettez pas le pied dans un studio de jeux vidéo, vous allez paniquer.

Une employée de la firme aurait même mis fin à ses jours pendant une sortie d’entreprise à cause du harcèlement qu’elle subissait.

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Et ça commence au sommet : Bobby Kotick, le PDG de l’entreprise, aurait caché pendant des années les agressions qui avaient lieu sous sa gouverne, en plus d’avoir menacé de mort une assistante au téléphone.

Ce n’était semble-t-il pas mieux chez Ubisoft : de nombreux décideurs haut placés ont dû démissionner alors que des accusations d’harcèlement sexuel, d’agressions et de racisme ont fusé de toutes parts. Et s’il y a bel et bien eu des départs, des employé.e.s se sont plaint que les changements restaient plutôt minimaux.

Et qu’est-ce que ces dénonciations ont changé ?

Activision-Blizzard continue de générer des profits record (Call of Duty: Modern Warfare II a dépassé le milliard de ventes en trois jours), Bobby Kotick est le deuxième PDG le mieux payé dans l’industrie, et Microsoft a allongé près de 69 milliards pour acheter l’entreprise.

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Si Ubisoft n’a pas eu la meilleure année (puisque peu de gros titres sont sortis en 2022), l’entreprise continue d’être un des gros joueurs de l’industrie, et plus personne ne mentionne les accusations qui visaient le studio. La preuve qu’Ubisoft a le champ libre ? C’est le studio de Québec qui développe Assassin’s Creed Red, un titre attendu dans la série, et son directeur créatif est Jonathan Dumont, qui a été accusé de faire du harcèlement psychologique et de passer des commentaires homophobes et misogynes.

Tout va bien, comme on dit.

5. Sony et Microsoft jouent du violon

L’année a commencé avec une énorme annonce, quand Microsoft a annoncé son intention d’acheter le géant Activision-Blizzard pour 69 milliards.

Ne voulant pas être laissé en reste (pour être honnête, la transaction a dû être négociée bien avant l’annonce de Microsoft), Sony a de son côté fait l’achat de Bungie (Halo, Destiny) pour 3,6 milliards.

Dans un combat entre deux multinationales multimilliardaires, avons-nous vraiment besoin de choisir un favori ?

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Mais ce n’est rien comparé à la fusion Activision-Microsoft, et Sony ne voit pas d’un bon oeil cette transaction. L’entreprise a donc contesté l’offre d’achat devant toutes les instances administratives à travers le monde, jugeant que Microsoft essaie de créer un monopole en achetant des studios (ce que Sony fait couramment). La firme nippone a particulièrement peur de perdre Call of Duty, une locomotive pour les ventes de consoles, et les promesses de Microsoft selon lesquelles la franchise demeurera sur toutes les consoles ne semblent pas la rassurer.

De son côté, Microsoft a récemment rétorqué que Sony veut grossir en gardant Xbox petit, comme si Microsoft était une petite PME, et pas une multinationale qui s’est elle-même assuré un quasi-monopole dans le monde des PC en écrasant tous les autres joueurs.

C’est correct d’avoir vos jeux vidéo préférés, ou même vos consoles préférées. Mais dans un combat entre deux multinationales multimilliardaires, avons-nous vraiment besoin de choisir un favori ?

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