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Le « mommy brain » : mythe ou réalité d’une mère débordée ?

Tout parait différent après avoir eu un enfant, surtout la tête.

Par
Gabrielle Tremblay-Baillargeon
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Une collègue vous l’a peut-être dit en oubliant ses clés sur votre bureau : « Mom brain ! » Cette excuse est utilisée par les mères pour justifier leur genre de « brain fog » perpétuel, ce sentiment d’avoir constamment la tête ailleurs, durant et après la grossesse.

Sauf que récemment, un article du magazine The Atlantic critiquait la propension des femmes à sortir cette excuse de leur chapeau (ou de leur sac à couches).

L’argument principal ? Les mères n’ont pas nécessairement le « mom brain ». Elles sont juste débordées. Avec le retour au travail post-congé de maternité, la charge mentale, la pandémie et les problèmes de places en garderie (sans compter tout le reste !), les femmes surchargent leur cerveau d’information, ne lui laissant d’autre choix que de surchauffer comme un ordi en plein soleil.

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Chercher ses mots… pour de vrai

La vérité, c’est que le cerveau des mères subit bel et bien des changements durant la grossesse et après l’accouchement. Les fluctuations hormonales entraînent des transformations dans la matière grise de leur cerveau. L’objectif ? Leur permettre de devenir hyper-focus sur les besoins de leur bébé.

Est-ce qu’on perd des points de QI en devenant mère ?

En gros, le cerveau déplace son énergie vers des zones jugées plus utiles pour s’occuper d’un nouveau-né, ce qui affecte certaines capacités, comme la mémoire langagière. Donc oui, on peut oublier des mots et des prénoms !

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Ces changements sont observés durant au moins deux ans après la naissance de l’enfant, mais pourraient même être permanents, selon une nouvelle étude espagnole. Est-ce qu’on perd des points de QI en devenant mère ? On change, ça c’est sûr : une autre étude démontre que plus la matière grise du cerveau diminue, plus la relation entre le bébé et la mère est chaleureuse et profonde.

Un filet social très mince

Biologiquement, donc, tout ça est très bien arrangé. Socialement, c’est une autre paire de manches. Et retourner au travail après la naissance ou l’adoption de leur enfant est une transition qui ne se fait pas sans heurts.

« Passer d’être 100 % du temps mère à travailleuse, c’est difficile », souligne Camille Robert, doctorante et chargée de cours en histoire.

« La séparation du bébé, l’intégration à la garderie… tout ça peut contribuer à ce sentiment de ne pas être capable de se concentrer sur les tâches qui nous sont attribuées et de ne pas répondre aux attentes professionnelles lors de notre retour au travail », poursuit l’autrice de l’essai Toutes les femmes sont d’abord ménagères.

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Les mères en ont donc beaucoup sur leur assiette lors de leur retour au boulot… sans toutefois bénéficier de tout le soutien dont elles ont besoin, que ce soit de la part de leur partenaire de vie, de leur employeur ou encore de leur famille.

Après plusieurs semaines sans 9 à 5, c’est assez normal qu’on ait du mal à se remettre en selle.

Si vous avez du mal à comprendre ce que les mères vivent lors du retour au travail, imaginez comment vous vous sentez après deux semaines passées en vacances sur la plage (même si un congé de maternité est loin de ressembler à ça). La réunion du lundi matin est soudainement plus difficile à avaler, non ? Après plusieurs semaines sans 9 à 5, c’est assez normal qu’on ait du mal à se remettre en selle.

« Dans la culture populaire, les femmes qui retournent au travail après un congé de maternité sont un peu présentées comme des poules pas de tête, mentionne Camille Robert. Les attentes sont vraiment élevées envers les jeunes mères. Paradoxalement, elles ont de moins en moins de support pour accomplir tout ce qu’elles ont à faire. »

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Aidez-nous à vous aider

Camille Robert me donne cet exemple : même si la mère est la deuxième personne à contacter en cas d’urgence sur la liste de la garderie, c’est quand même souvent elle qui est appelée quand l’enfant est malade.

« Quand il est question du bien-être des enfants, on va s’adresser à la mère en premier. C’est profondément ancré dans les normes sociales », indique la doctorante. Collectivement, on peut donc faire mieux.

Vous êtes patron.ne d’une mère qui revient de « congé » de maternité ? Voici comment la soutenir adéquatement :

– Offrir la possibilité d’un retour progressif;

– Proposer des horaires de travail plus flexibles;

– Être plus indulgent.e envers l’employée;

– Tolérer les absences et les horaires irréguliers (en cas d’urgence garderie ou de maladie, par exemple);

– Proposer le télétravail ou le travail en mode hybride;

Du côté des partenaires, il faut plutôt assurer une présence et un soutien dès la naissance de l’enfant. « Les études [faites sur des couples hétérosexuels] ont démontré que plus tôt le père prend en charge certaines responsabilités, plus il va en prendre d’autres au fil du temps. Ces premiers instants-là sont importants », souligne Camille Robert.

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