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Le confinement, libérateur de carcans?

Pour certaines, apparemment.

Par
Lison Délot
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«T’es grosse», «tes cheveux sont gras, c’est dégueu», «t’as vu ta barbe ? », «une fille sans soutien-gorge avec les tétons qui pointent, c’est moche», etc. La liste est longue, trop longue. Hommes et femmes sont pieds et poings liés quant à leur manière de parler, d’agir, de s’habiller ou même de se coiffer et ce, depuis la nuit des temps (ou presque).

Ce sont principalement les femmes qui en font les frais d’ailleurs, j’ai eu l’occasion de le constater lors de mon enquête: elles étaient les seules et les premières à répondre à l’appel, comme si les hommes étaient moins touchés par ce genre de stigmatisations.

Ce statut partagé par une amie sur Facebook résume à lui-seul, le petit pouvoir libérateur que le confinement a pu avoir sur certains aspects du quotidien:

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Le plus étrange dans cette histoire de carcans c’est qu’aucun gouvernement (du moins français) n’a jamais imposé de loi sur le port d’un soutien-gorge, ou l’obligation d’avoir de parfaites gambettes bien épilées. Nous sommes nos propres bourreaux, et le regard des autres y est pour quelque chose, évidemment. «L’enfer c’est les autres», écrivait Sartre.

Depuis le début de la crise, des conseils minceur glanés sur internet nous poussent à «faire attention», à «prendre soin de nous», à rester dans le moule.

Pourtant, malgré la tentation de suivre le «droit chemin», de nombreuses personnes ont décidé, grâce au confinement, de changer leurs habitudes. Elles ont dit « stop » au diktats de la mode, du sexe et de la bienséance. On a discuté avec certaines d’entre elles.

À bas les soutiens-gorge !

C’est la décision de Marie France, confinée avec son amoureux chez lui. Lorsqu’elle a préparé sa valise de confinement, la question s’est posée: «est-ce que je prends des soutifs ou pas» ? Elle en a pris deux, «au cas où». «Et le premier jour du confinement, j’ai mis un soutien-gorge par réflexe et mon copain m’a demandé ce que je faisais (rires). Il avait raison: à quoi bon?».

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Depuis, Marie France ne porte plus du tout de soutiens-gorge, sauf pour faire du sport «sinon ça fait mal».

Cette décision, elle va devoir « apprendre à l’assumer » mais se dit prête, après le confinement, à relever le défi. «C’est vraiment une libération: parce que ça fait mal, ça gratte, ça se voit trop par transparence un soutien-gorge… ». Bref, on s’inflige des douleurs inutiles par réflexe ou par peur de choquer. Il est temps de libérer nos tétons.

Du citron à la place du déo

Mettre du déodorant est devenu un geste automatique. Pourtant, en plein confinement, Noémie a réalisé que le déodorant n’était pas aussi nécessaire qu’elle le pensait et l’a remplacé par… du citron. «En une semaine et demie à peine, je sentais moins la transpiration qu’avant». Qu’est-ce qu’elle y gagne? Elle utilise moins de produits chimiques et fait des économies (trois citrons coûtent moins cher qu’un déo) en plus de sentir bon.

Dans notre société, « l’odeur d’une femme est une preuve de féminité », explique la jeune femme. Dès leurs plus jeunes âges, on enseigne aux filles qu’elles doivent sentir bon et se parfumer pour sortir. « C’est encore une norme à respecter: si une femme ne sent pas bon, c’est peut-être un manque de féminité alors qu’en réalité, ça n’a aucun rapport. Un homme qui ne sent pas bon ça ne remet pas en jeu sa masculinité ». Noémie, quant à elle, se sent « féminine sans sentir le parfum à 3km ».

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Une douche tous les jours, est-ce bien raisonnable ?

Prendre une douche tous les jours, c’est comme prendre un goûter à quatre heure. On le fait par réflexe, mais ça n’est pas nécessaire. Se laver reste une pratique essentielle et à ne pas négliger pour se débarrasser des bactéries, mais peut-être pas deux fois par jour… ?

C’est en tout cas ce que Marie et son copain ont décidé de tester pendant le confinement. Ils ont été encore plus loin et en ont profité pour faire une cure de sébum.

« Ça faisait longtemps qu’on y pensait mais nous n’avons jamais réussi à le mettre en pratique, on avait toujours une bonne excuse », racontent les amoureux. Après avoir lu un nombre incalculable d’articles, de témoignages et de conseils, ils se sont lancés. Pour faire simple, « ça consiste à ne prendre plus que deux douches par semaine, on n’utilise plus de shampoing ni de gel douche, mais du savon noir et de l’eau claire, c’est tout ».

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Comme Noémie qui n’utilise plus de déodorant, Marie et son copain font de grosses économies de savon et d’eau. Ils apprennent également à être plus responsables écologiquement et n’utilisent plus de produits chimiques.

Une question me turlupine, au niveau de l’odeur ça se passe comment ?

C’est un peu gênant de leur poser la question, mais je prends mon courage à deux mains, je me lance… et la réponse est sans appel. Ils ne sentent pas mauvais… «Tous les jours, on se rince rapidement sous les aisselles, les parties intimes et les pieds quand même». Me voilà rassurée.

Se raser les cheveux, ça libère

Cela faisait longtemps que Géraldine, 30 ans, pensait à ce changement. Se raser les cheveux a été un geste libérateur et une renaissance pour elle. «C’est sûr que le confinement m’a aidée à prendre plus rapidement cette décision parce que je n’avais pas le regard des autres braqués sur moi».

Pendant le confinement, elle a aussi remis en question son avenir professionnel et même son couple, elle est d’ailleurs en pleine séparation et ressent “le besoin de se recentrer”.

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Géraldine se définit comme non binaire (elle ne se sent ni homme ni femme), alors cette décision de se raser la tête a entamé “tout un processus de reconnexion” avec son être. «Je voulais voir ce que ça faisait si j’effaçais tout ce qui était lié au féminin sur moi, si j’allais m’apprécier sans caractéristiques qui m’identifient à un genre», raconte Géraldine qui a entamé “un renouvellement intérieur”.

Fini le porno

La masturbation féminine est encore un sujet tabou, alors autant dire que lorsqu’une femme revendique sa sexualité et son plaisir, c’est une grande étape. C’est ce cap que Maïra a décidé de franchir, grâce au confinement.

Séparée de son copain seulement deux semaines avant le confinement, elle s’est retrouvée confinée avec ses colocataires, avec qui elle a eu l’occasion de parler sexualité sans tabous. «En discutant avec eux, j’ai réalisé que je ne me touchais jamais sans porno et que j’étais assez frustrée parce que je n’ai jamais réussi à me faire jouir toute seule», raconte celle qui a profité du contexte pour se libérer. Elle a donc décidé d’apprendre à se faire plaisir, toute seule. «J’ai arrêté le porno qui est la facilité, et j’ai laissé place à mon imagination». Pas si simple mais cela a fonctionné. «C’était une petite victoire, j’étais assez fière de moi !», lance celle qui, une fois le confinement terminé, a la ferme intention d’aller s’acheter… un gode, pour la première fois. Article à suivre sur le sujet…

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