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Le bonheur au travail existe et il a un nom : ikigai

Cette philosophie japonaise pourrait changer votre regard sur votre emploi et votre raison d'être.

Par
Justin Gélinas
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Au Japon, notre raison d’être commence lorsqu’on ouvre ses yeux le matin. Cette force intérieure qui nous motive à nous lever du lit a un nom; l’ikigai.

Qu’est-ce que ça veut dire, « ikigai » ?

Le psychologue Michiko Kumano définit l’ikigai comme « un état de bien-être qui émerge du dévouement aux activités qu’on aime faire ».

Dans une entrevue, la professeure de japonais Valérie Harvey souligne que l’ikigai est, au Japon, « la raison d’être d’une personne et correspond au fait d’avoir un idéal de vie compatible avec le travail ». Elle explique que iki signifie « vie » et gai, « ce que vaut la vie ».

Cette philosophie serait la clé du bonheur et du bien-être.

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Selon les Japonais.es, chaque personne possède un ikigai. C’est sa raison de vivre. Au cours de notre vie, il change et s’adapte au cours du temps. Selon le stratège en design Marc-André Cright, l’ikigai s’explique par la combinaison de ce que vous aimez et de ce dont le monde a besoin.

Son origine

L’origine de l’ikigai remonterait entre 794 et 1185 sur une petite île japonaise du nom d’Okinawa. Ses habitant.e.s le pratique depuis des siècles. Un fait surprenant est que cette île isolée fait partie des endroits sur la planète où l’on retrouve le plus de centenaires. Est-ce que l’ikigai en serait la raison ? Plusieurs Japonais.es pensent que oui, puisque cette philosophie serait la clé du bonheur et du bien-être.

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Pourquoi ? Parce que l’ikigai se base sur de saines habitudes de vie. Bien manger, faire de l’activité physique, s’occuper l’esprit et entretenir des liens forts avec sa communauté : tous ces facteurs contribuent à la longévité.

Concrètement, c’est quoi ?

Dans un article sur la psychologie de l’ikigai, le célèbre chef de sushis japonais Jiro Ono cite qu’il « faut tomber en amour avec son travail et consacrer sa vie à le maîtriser ».

L’ikigai est une quête sans fin qui peut nous amener un grand sentiment d’accomplissement dans le travail.

Chef Ono a consacré sa vie à perfectionner ses techniques de sushis. Son petit restaurant de 10 places a même reçu la prestigieuse récompense Michelin et est considéré comme l’un des meilleurs restos de sushi au monde. Le chef japonais mentionne qu’il « continue de grimper jusqu’au sommet, mais que personne ne sait vraiment où le sommet se situe ». L’histoire de Chef Ono montre que l’ikigai est une quête sans fin qui peut nous amener un grand sentiment d’accomplissement dans le travail.

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Pour illustrer la philosophie de l’ikigai à mon niveau, prenons en exemple mes parents (même s’ils ne sont pas japonais). Depuis une vingtaine d’années, ils tiennent avec succès une clinique de massothérapie. Malgré les nombreuses heures de travail, ils me répètent souvent qu’ils n’ont pas l’impression de juste travailler. Ils offrent un service rémunéré qui les passionne et qui aide les gens. C’est ce qui les motive à partir vers la clinique le matin.

Peu à peu, ils se dirigent vers la retraite. Mon père se passionne pour l’ébénisterie et ma mère, pour la cuisine et l’élevage de chiens de berger. Leur ikigai change.

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Un moyen de se réaliser dans le travail

Au cours des années, la pensée ikigai s’est centrée sur un idéal de vie compatible avec le travail. Au Japon, rester occupé.e est la raison d’être des gens. Là-bas, il n’est pas rare de travailler 6 jours par semaine sans vacances.

Contrairement à la France, où la retraite est valorisée et attendue, les Japonais.es en ont une tout autre interprétation. Pour eux et elles, la retraite se résume à arrêter de vivre (se cacher du vivant). C’est pourquoi la plupart des personnes âgées restent actives. Certaines pratiquent même leur métier jusqu’à la fin de leur vie.

« C’est avant tout une manière de vivre de ce qui nous passionne, ce pour quoi la vie mérite d’être vécue. »

Est-ce que cette passion pour le travail est vraiment saine ? Pas vraiment. Cette pression de la société japonaise à s’accomplir dans le travail mène à des problèmes de surmenage, de suicides, de crises cardiaques et d’ACV au travail. Il existe même un mot en japonais pour ça : karoshi. Selon un sondage réalisé par le gouvernement japonais en 2016, « un travailleur japonais sur cinq risque de mourir de karoshi ».

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La professeure Harvey affirme que « ce n’est pas toujours possible de faire un travail qu’on aime au Japon. L’ikigai est un luxe que tout le monde ne peut se permettre ».

Un mode de vie avant tout

Dans une chronique sur l’ikigai publié dans Le Soleil, une personne interviewée d’origine japonaise explique que cette philosophie ne passe pas nécessairement par le travail. Par exemple, « être bénévole dans un club d’échecs, jouer du tuba, militer pour une cause peut aussi être une raison de vivre ».

De son côté, l’auteure du livre Trouver son ikigai, Christie Vanbremeersch, explique que « c’est avant tout une manière de vivre de ce qui nous passionne, ce pour quoi la vie mérite d’être vécue ». L’auteure suggère de « mobiliser sa curiosité, sa joie de chercher et de rencontrer pour partir en quête de son ikigai ». Comme quoi, le travail n’est pas forcément le seul intérêt de la philosophie japonaise.

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Revenir aux sources

Bien que la société occidentale ait interprété l’ikigai comme une méthode pour trouver sa carrière de rêve, la philosophie japonaise est à l’origine une quête vers sa raison d’être. Elle se base avant tout sur notre capacité à donner du sens à notre vie. Elle doit passer par l’action, la rencontre et l’ouverture. Comme quoi la vie mérite d’être vécue dans toutes ses sphères.