.jpg)
La série « Drôle » : liberté, égalité, diversité
Après l’excellente série Dix pour cent, une incursion dans le milieu des agent.e.s de stars, la créatrice Fanny Herrero revient en force avec Drôle, une délicieuse plongée dans l’univers des comedy clubs parisiens.
J’ai souri, j’ai ri, j’ai été touché, j’ai réfléchi, mais surtout, au fil des six épisodes de cinquante minutes dévorés en deux jours, je me suis attachée aux personnages, de qui je me suis ennuyée dès la fin de la première saison. Et ça, c’est trop bien quand ça arrive !
L’envers du micro
Drôle, c’est l’histoire de quatre personnages : Nezir (Younès Boucif), Aïssatou (Mariama Gueye), Apolline (Elsa Guedj) et Bling (Jean Siuen), qui font ou rêvent de faire du stand-up dans le Comedy Club éponyme, et dont les parcours sont à des stades différents.
On découvre à tâtons cet univers et on se plonge tête première dans ses coulisses.
Nezir, le premier protagoniste que l’on découvre, est livreur à vélo. Entre deux livraisons de sushis dans les beaux quartiers parisiens, il répète ses blagues à toute allure. Vivant en banlieue avec son père chômeur, le vingtenaire a du mal à joindre les deux bouts et enchaîne les petits spectacles d’humour dans des maisons de retraite et des bars à chichas.
Sa meilleure amie, Aïssatou, jongle entre sa vie de famille et ses ambitions professionnelles. Du jour au lendemain, la jeune femme goûte la célébrité après avoir cassé l’internet grâce à un sketch explicite sur la prostate de son mec, ce qui cause des problèmes dans son couple.
Les deux humoristes en herbe montent régulièrement sur la scène du Drôle Comedy Club, dirigé par Bling. S’il a connu des sommets de popularité avant de voir sa carrière décliner, ce fils d’immigré.e.s vietnamien.ne.s manque gravement d’inspiration et enchaîne les mauvais choix.
Dans la salle, on fait la connaissance d’Apolline, une étudiante en histoire de l’art un peu déconnectée de la réalité. Celle qui vit dans un immense appartement haussmannien du 16e arrondissement rêve secrètement de faire du stand-up. Au grand dam de sa bourgeoise de mère.
Tout comme Appoline, on découvre à tâtons cet univers et on se plonge tête première dans ses coulisses.
.webp)
Une jeunesse toute en diversité
Ce qui frappe d’emblée dès les premières minutes de Drôle, c’est la diversité. Mais attention : pas une diversité de façade ni « tokenisée ». Une vraie de vraie diversité, qui ne tombe jamais dans les clichés.
Dans Drôle, la diversité est là parce qu’elle existe, pas parce qu’on répond à un mandat ou qu’on veut faire bonne impression.
Ça m’a fait un bien fou de découvrir ces visages, ces parcours, ces physiques, ces points de vue, ces expériences différentes. Dès les premières vannes de ma nouvelle bande de potes, je me suis dit : « Enfin une série qui met en scène des actrices et acteurs non blancs, mais qui ne parle pas exclusivement de diversité culturelle. » Dans Drôle, la diversité est là parce qu’elle existe, pas parce qu’on répond à un mandat ou qu’on veut faire bonne impression. Bienvenue en 2022.
Parlant de diversité, j’ai été ravie de découvrir de nouveaux acteurs et de nouvelles actrices, qui campent leur personnage avec justesse et aplomb. En effet, Mariama Gueye, Younes Boucif, Elsa Guedj et Jean Siuen en sont à leur premier grand rôle à l’écran. La preuve qu’une série peut susciter l’attention du public sans star, sans artiste de la sacro-sainte catégorie A, sans visage vu et revu.
Tout comme c’était le cas avec Dix pour cent, Fanny Herrero parvient à créer une alchimie qui dépasse les frontières de l’écran. À chaque instant, j’avais envie de devenir meilleure pote avec Nézir, Appoline et Aïssa (oui, je l’appelle par son petit nom !).
.jpg)
Bonjour Paris
Exit le Paris fantasmé à la Emily in Paris: dans Drôle, les personnages prennent le métro et mangent des kebabs à 23 heures.
Au-delà des blagues, des sketchs et des punch lines, le scénario de Drôle devient un formidable écrin pour s’intéresser à des enjeux de société plus vastes. On aborde la pression familiale de la réussite, la maladie mentale, l’avortement, la célébrité qui disparaît aussi vite qu’elle n’arrive, le racisme, la précarité, la sexualité féminine et masculine, etc.
Exit le Paris fantasmé à la Emily in Paris : dans Drôle, les personnages prennent le métro, mangent des kebabs à 23 heures et vivent dans des chambres de bonnes de 9 mètres carrés au sixième, sans ascenseur et avec une toilette partagée sur le palier. La vraie vie, quoi !
Mention spéciale à la musique méticuleusement choisie, qui nous accompagne dans les rues pavées de la Ville Lumière.
.jpg)
Vous le devinez, à mes yeux, Drôle est un succès et mérite amplement une deuxième saison, voire plus. Mais Netflix en a malheureusement décidé autrement.
« Nous avons pris la difficile décision de ne pas reconduire Drôle pour une saison 2, après presque trois ans de travail en commun et une collaboration fructueuse avec Fanny Herrero, les Films du Kiosque et toute l’équipe », a expliqué Netflix. Dommage !
La raison de cette annulation ? « Nos abonnés n’y ont pas trouvé leur compte », selon le géant du streaming. Une décision qui intervient alors que la plateforme a perdu près de 200 000 abonné.e.s dans le monde au premier trimestre 2022, un chiffre inédit en dix ans.
Malgré cette nouvelle qui m’a littéralement endeuillée, je conseille vivement de se plonger dans la seule et unique saison de Drôle, une série aussi marrante et rafraîchissante qu’attachante.