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Devenir parent vient souvent avec un abonnement iCloud ou Google Drive pour pouvoir stocker toutes les vidéos, photos et, surtout, les screenshots de contenu abordant la parentalité qu’on trouve sur les réseaux sociaux.
En un seul scroll, on a la chance d’avoir accès gratuitement à un pullulement d’informations vulgarisées par des pseudos spécialistes. Toutes ces informations ne se valent cependant pas. Comment arriver à démêler les informations pertinentes de celles qui ne servent qu’à vendre un énième ebook promettant des routines matinales dignes d’une comédie musicale ?
J’ai rencontré la psychoéducatrice Sarah Hamel – autrice des livres Le ti-pou d’Amérique (disponible gratuitement en livre audio) et Le ti-pou d’Amérique de 7 à 12 ans – afin de vous à aider mieux comprendre ce qu’est la parentalité bienveillante et démêler certaines idées reçues sur le sujet.
Plus qu’une nouvelle mode
La parentalité bienveillante / positive / sécurisante / consciente (à vous de choisir, c’est une aventure dont vous êtes le héros) est certainement le #hashtag de la dernière année dans le monde des parents. L’autrice Véronique Alarie y consacre même un chapitre dans son essai publié en 2022 Douce Amère : À qui profite notre bienveillance? et d’autres revues ont creusé la question dans des dossiers publiés la même année.
Malgré tout, la psychoéducatrice Sarah Hamel considère qu’on n’en parle pas encore assez. « Dans les 10 dernières années, il y a eu un énorme boom dans les neurosciences. On a de nouvelles connaissances, on comprend mieux le développement des enfants et on peut, donc, mieux honorer leurs besoins. Mais l’information ne s’est pas encore rendue à tout le monde. » Effectivement, une certaine incompréhension persiste toujours autour de cette approche.
Pour résumer, lorsqu’on parle de parentalité bienveillante, on réfère à la science de l’attachement, ainsi qu’à la science développementale.
Ce n’est pas un courant, ni une mode, mais plutôt une manière d’éduquer nos enfants qui réajuste nos attentes (et notre réponse) face à leur comportement.
« Les attentes des parents envers leurs enfants sont complètement irréalistes, parce qu’elles ne sont pas adaptées à leur développement. La majorité du temps, les comportements non souhaitables des enfants ne sont pas une question de manque de bonne volonté, mais d’immaturité cérébrale, » explique Sarah Hamel.
Pas besoin de culpabiliser
La parentalité bienveillante et tous ses conseils vous font sentir nuls ? C’est normal. Aucun parent n’a envie d’économiser pour les futures séances de thérapie de leur enfant. Si les conseils non-sollicités prennent souvent la forme de « dans mon temps on faisait ça puis personne n’est mort », ce qu’ils signifient véritablement est plutôt « j’ai peur d’avoir détruit mon enfant en faisant la mauvaise affaire et je me sens coupable. » Si on est adepte de parentalité positive, comment transmettre le message sans s’embrouiller avec toute sa famille ?
Comme toutes les émotions, la culpabilité a une fonction : elle s’invite dans nos angles morts afin de nous diriger vers un chemin qui s’aligne mieux avec nos valeurs.
Sarah Hamel souligne justement l’importance d’adresser la culpabilité créée en nous si les récentes connaissances liées à la parentalité ne correspondent pas à notre pratique parentale actuelle ou passée. « C’est normal, c’est tellement récent ! L’approche cognitive comportementale est encore enseignée dans les techniques d’éducation à l’enfance et dans les baccalauréats en enseignement, » nous rassure-t-elle. D’ailleurs, elle confie avoir elle-même conseillé, au début de sa pratique, des tableaux de récompenses pour obtenir de nos enfants de « bons » comportements, avant de comprendre qu’il fallait plutôt créer les conditions favorables pour le développement des habiletés requises pour atteindre les attentes des parents. «
Avant, la science se concentrait uniquement sur ce qu’elle voyait : le comportement. Maintenant, on a les outils pour explorer le cerveau du ti-pou, on peut donc aller au-delà du comportement et en voir les mécanismes sous-jacents, » explique Sarah Hamel.
Si des personnes tentent de balayer du revers de la main cette culpabilité ou l’instrumentalisent en tenant un discours qui hiérarchise les besoins des enfants comme ceux des parents, on lève le drapeau rouge! « Quand un discours s’adresse aux parents en disant voyons, c’est correct que tu penses à toi en premier, on n’est plus nécessairement en train d’honorer les besoins de l’enfant. La vérité, c’est qu’on n’a jamais à choisir. Les besoins de l’un.e n’éliminent pas nécessairement les besoins de l’autre. »
Il faut être en mesure d’utiliser la culpabilité comme force mobilisatrice, plutôt que de tenter d’y résister. « Tu fais de ton mieux jusqu’à ce que tu fasses encore mieux, » me résume Sarah Hamel.
Attention aux charlatans
Vous voyez pas mal de conseils et d’infos sur la parentalité bienveillante passer sur les réseaux sociaux et vous vous demandez comment démêler le vrai du faux ? Sarah Hamel invite les gens à reconnaître les discours de nature purement informative. « Le code déontologique des psychoéducateur.rices, par exemple, interdit d’affirmer qu’on détient la vérité absolue. Dans les médias, tout ce qu’on peut faire, c’est partager une information mise à jour par rapport aux plus récentes données probantes. »
Les solutions miracles sont comme les licornes : on en voit partout, mais elles n’existent pas.
Les contenus dépourvus de nuances et qui ne laissent que très peu ou carrément pas de place à l’instinct parental cachent souvent des gourous plus ou moins bien intentionné.es. Les professionnel.les, de leur côté, se contentent de présenter une information pertinente et c’est au parent de choisir ce qu’il en fait. C’est un peu pareil pour le sommeil : à vous de lire les informations et les faits avant de prendre une décision éclairée sur l’approche que vous souhaitez adopter – si vous en choisissez une !
Dans la parentalité comme pour tout, l’important, c’est probablement ça, la clé : bien s’informer pour mieux écouter ses instincts.