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La douce odeur des voitures

En partenariat avec la ZEP (Zone d’Expression Prioritaire).

Par
La ZEP
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Ce récit provient des ateliers d’écriture animés par les journalistes de la Zone d’Expression Prioritaire (la ZEP), un média qui accompagne l’expression des jeunes pour qu’ils et elles se racontent en témoignant de leur quotidien et de toute l’actualité qui les concerne.

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D’abord les pilotes font chauffer les roues des voitures. Ensuite, ils se mettent sur la ligne de départ et quand le feu passe au vert, c’est parti, à toute vitesse. La première fois, j’avais 9 ans, j’étais derrière une barrière qui nous protégeait au cas où une voiture perdait le contrôle et nous fonçait dessus.

Le run, c’est une course entre plusieurs voitures, qui s’élancent deux par deux sur une grande ligne droite. Sur le côté, il y a un monsieur qui note les temps.

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Quand les voitures ont démarré et sont passées à côté de moi, c’était fou. J’ai ressenti une joie immense et j’ai reçu une grosse dose d’adrénaline. Les voitures faisaient énormément de bruit, il y avait du brouhaha aussi dans la foule. Les gens criaient et il y avait plein de fumée. Ça sentait bon. Mon père, mon parrain et moi, on était super heureux. Depuis, j’adore les voitures. J’avoue, j’aime surtout celles qui font du bruit et de la fumée.

Tant pis pour la planète

Je sais que le run, les courses de ce genre de voitures, ce n’est pas écolo, mais tant pis. C’est trop important pour moi. Je sais que la fumée et l’essence ça pollue, que ce n’est pas bon pour la planète. Mais je ne roulerai jamais de ma vie en Zoé, les voitures électriques c’est mort. Je préfère aller à pied que dans une voiture qui ne fait pas de bruit. Les voitures thermiques, c’est ce que j’aime le plus au monde.

C’est dans ces courses de run que j’ai passé les meilleurs moments de ma vie, comme quand les voitures les plus puissantes de la Réunion se sont affrontées. Une Nissan Skyline R35 bleu clair de plus de 1 500 chevaux avec un gros aileron, de belles jantes et des autocollants partout. Elle fait un beau bruit de rupteur, même si elle ne fait pas de fumée. En face d’elle, il y avait une Audi RS3 2021 blanche avec des autocollants de chaque côté, deux gros pneus à l’avant et 1 000 chevaux. C’est la R35 qui a gagné. Moi je ne parie pas, mais bien sûr qu’il y a des gens qui misent de l’argent autour de moi. L’automobile c’est tellement ma passion que j’ai décidé d’en faire mon métier, je veux être mécanicien. Mais pas dans le run ! Trop de pression…

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Je préfère les courses illégales

Bien sûr, il y a les courses officielles, mais ce que j’aime surtout, ce sont les courses illégales. On en fait souvent avec mon père, quand les gens nous provoquent en nous faisant des signes depuis leurs voitures. À ce moment-là, on se met côte à côte, on fait un décompte, et on voit qui gagne. Évidemment, c’est toujours mon père le plus rapide. Mais ça, ce n’est pas vraiment du run, c’est plutôt ce qu’on appelle ici de la pousse, une course improvisée. Contrairement au run, ce n’est pas autorisé. La police peut prendre ta voiture et la mettre à la fourrière. Moi, ça ne me fait pas peur, je suis habitué.

Je sais que c’est très dangereux, mais je n’abandonnerai jamais le run. Mon rêve, c’est d’avoir une voiture très puissante, d’y mettre de plus en plus de pièces, de la modifier pour pouvoir concourir moi-même. Comme ça, je montrerai que je suis le plus puissant, parce que c’est vraiment là que je me sens vivant.

Jean, 14 ans, collégien, Saint-Louis (La Réunion)

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