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Dans la terrible hiérarchie des activités à forte empreinte carbone, il y a certes voyager dans un jet privé (svp, arrêtez tout de suite de faire ça, c’est lourd) et… manger de la viande. Bien que la consommation carnée en France recule tranquillement, elle reste un sport de compét’ : une moyenne de 85 kilos de viande ingurgités en 2022 ce qui nous positionne dans la ligue 1 des plus gros consommateurs de bidoche au monde.
Parmi les carnistes se glisse toutefois une nouvelle hiérarchie du pire au sommet de laquelle on trouve… le bœuf et sa sacro-sainte côte braisée. C’est pas la saison du barbecue mais ça ne nous empêche pas de nous pencher sur cet étrange aliment qui cumule quelques tares (tares).
Un repas pour les vrais “zhôms”
On s’en souvient, quand Sandrine Rousseau a eu l’outrecuidance, voire l’outrecuisson, d’établir un lien entre le barbecue et la virilité en 2022 ce qui l’a exposé à une vague de harcèlement particulièrement burnée. Tous les mascus de France lui sont tombés dessus, réalisant par la même occasion et de manière performative la terrible sentence dont ils étaient victimes. Oui les hommes mangent plus de viande que les femmes, c’est un fait. De nombreuses études montrent que les femmes ont une longueur d’avance sur le végétarisme, le GIEC a même établi que le régime alimentaire des hommes avait une plus grosse empreinte carbone. Un ingénieur de l’Ademe explique que manger un steak de 125g revient à consommer 1 kilo d’aliments.
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Le fait que la viande (rouge, qui plus est) fasse grossir en fait là encore une alimentation “de bonhomme” opposé au cliché du fragile mangeur de lentilles ou simplement de la femme addict aux régimes minceur qui troquera le steak pour une soupe de carottes. Pourtant, les hommes ne sont pas naturellement attirés par la viande plus que les femmes, c’est un goût socialement construit. Nora Bouazzouni avait d’ailleurs exploré la question dans son essai Steakisme, en finir avec le mythe de la végé et du viandard (on vous en avait même parlé ici). Aujourd’hui encore, on entretient l’idée que la viande rend fort comme le présuppose la voix gutturale clamant “Mhhhh Charaaal” dans la publicité.
Fumer des clopes ou manger un steak
Outre le fait que la consommation de viande rouge pollue et fasse grossir, elle a aussi le bon goût d’augmenter les risques de cancer colorectal et de cancer du sein (mes deux cancers pref, perso). À noter, on ne parle pas que du bœuf, la viande rouge désigne également le veau, le porc, l’agneau, le mouton, le cheval et la chèvre (j’apprends par la même occasion qu’on peut manger des chèvres autrement qu’à travers leur fromage, si j’étais en 2023 je dirais que je suis chokbar de bz). C’est surtout le mode de cuisson qui est remis en cause car il révèle les composants cancérigènes de la viande ; en même temps cette cuisson est indispensable pour détruire les bactéries contenues dans la viande crue. Donc cancer ou salmonelle, il faut choisir !
Pas de panique nonobstant, la consommation de viande n’est pas aussi cancérigène que le fumage de clopes. Si toutefois vous pratiquez ces deux activités, sachez que je ne vous jugerai pas. Parce que s’il y a bien un truc auquel on est encore plus addict (vous comme moi) que la nicotine et les chipolatas c’est là…
Dissonance cognitive mon amour
Faire des trucs nuls en sachant que c’est nul tout en continuant à les faire n’a rien d’anormal et nous concerne tous. Heureusement la psychologie sociale est là pour nous aider à y voir plus clair ; depuis quelques années, le concept de dissonance cognitive (DC) s’est popularisé et est devenu notre ultime carte joker à sortir en toutes circonstances.
Pour faire court, la DC est la tension ressentie quand différents comportements ou idées rentrent en contradiction avec nous-mêmes : je mange de la viande alors que je serai incapable de faire du mal à un animal ou je fume alors que ça tue (désolée de vous l’apprendre). Bref, c’est ce qu’on ressent dès qu’on a envie de se taper dessus tellement on n’est en désaccord avec nous-mêmes.
Dans le cas présent, la DC revêt même d’un phénomène bien particulier appelé “le paradoxe de la viande”. Pour rendre acceptable notre alimentation carnée on va invoquer tout un tas d’arguments visant à légitimer notre geste : le goût (or si je vous disais que la viande de chats était délicieuse, peu de chance que vous en fassiez un ragoût), la santé (j’ai besoin de viande pour être fort, argument débunké plus haut), la tradition (on a toujours mangé de la viande donc ça va eh oh, d’ailleurs on a toujours violé les femmes ça aussi c’est tradi non ?).