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J’ai réalisé que j’étais queer grâce au confinement et… à TikTok

Quand introspection et représentation nous font découvrir des pans insoupçonnés de notre identité.

Par
Anonyme
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«Je suis tellement soulée des hommes, je vais devenir lesbienne !» J’ai lu et entendu cette phrase des centaines de fois dans ma vie. Même si je comprenais le ressenti, ça m’a toujours énervée, sachant que l’orientation sexuelle n’est pas un choix.

Sauf qu’au cours des dernières années, ce n’est pas bien loin de ce qui m’est arrivé. Qu’on se comprenne bien : je n’ai pas fait « le choix » d’une orientation, mais disons que j’ai laissé surgir ce qui a toujours été là, au fond de moi. Pendant la majorité de ma vie, j’étais certaine d’être hétérosexuelle, mais une écoeurantite aigüe des relations hétérosexuelles m’a permis, à mon grand étonnement, de découvrir que j’étais queer.

Des débuts difficiles

J’ai toujours eu du mal avec mes relations amoureuses ou sexuelles hétéros. J’ai vécu une enfance violente. Ce traumatisme a développé en moi un désir extrême de plaire dans toutes mes relations.

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Je suis aussi sur le spectre de l’autisme et j’ai toujours eu du mal à comprendre les subtilités des interactions sociales. Ces deux facteurs-là ont fait en sorte que pour être acceptée, j’étais prête à tout : je m’adaptais aux attentes que les gens avaient envers moi, j’empruntais les attitudes et les traits de personnalité qu’il fallait pour plaire, j’ignorais totalement mes envies, mes limites, mes besoins, ma personnalité, mon identité.

J’ai vécu une enfance violente. Ce traumatisme a développé en moi un désir extrême de plaire dans toutes mes relations.

Quand je décidais de m’engager dans une relation amoureuse, je tenais pour acquis que, comme moi, le gars n’avait aucune arrière-pensée, qu’il serait honnête et que la relation serait égalitaire. Je plongeais sans méfiance, ouverte, prête à tout donner, en espérant que ma vulnérabilité et ma bonne foi seraient respectées.

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Pendant longtemps, j’ai donc été une cible parfaite pour des abuseurs, des manipulateurs ou juste pour des gars paresseux, un peu perdus, heureux de recevoir autant d’attention et d’affection sans qu’ils n’aient à lever le petit doigt.

Une longue chute

Inutile de dire que les dommages ont été importants. Je me suis retrouvée seule, totalement épuisée, dépressive et en totale ignorance de qui j’étais, ce que je voulais, ce dont j’avais besoin. Une pause de gars s’imposait. J’ai entrepris une longue introspection pour déconstruire mes patterns, les comprendre, me pardonner, trouver des mécanismes plus sains et repartir sur des bases plus solides.

J’ai perdu mon emploi au début du confinement. C’est pendant ces quelques mois de solitude que j’ai commencé à m’explorer les recoins (lol). La perspective d’une relation amoureuse ou sexuelle avec un gars ne m’intéressait absolument pas. J’ai donc commencé à explorer mon désir pour les filles.

Du côté des filles

Il m’est arrivé plusieurs fois dans ma vie d’être attirée par des filles. Mon souvenir le plus ancien remonte à 7 ou 8 ans, quand j’ai assisté à une représentation de Casse-Noisette, jouée par des élèves du collège à mon école primaire. La fille qui jouait Clara m’avait tout simplement éblouie. Je la trouvais tellement belle et j’avais juste envie de la coller. Rien de plus, rien de moins; juste un contact physique tendre.

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Ça ne m’avait pas troublé à l’époque, j’ignorais totalement la signification de ce genre d’attirance.

Ma vingtaine a été ponctuée de frenchs KISS de fin de SOIRÉE avec des filles. C’était un peu pour montrer aux gens comme j’étais « wild », mais je ne m’avouais pas à quel point j’aimais ça.

Puis, l’adolescence est embarquée et j’ai juste suivi la vague. Tout le monde autour de moi était hétéro, ça allait de soi que je sois moi aussi attirée par les garçons, que je souhaite tomber en amour avec eux et que je souhaite atteindre ce que je croyais être le symbole de réussite ultime : me marier et avoir des enfants. Pas une fois je ne me suis questionnée à savoir si c’était vraiment ce que je voulais.

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Ma vingtaine a été ponctuée de frenchs kiss de fin de soirée avec des filles. C’était un peu pour montrer aux gens comme j’étais « wild », mais je ne m’avouais pas à quel point j’aimais ça. Et malgré l’immense douceur qui m’envahissait au contact à la fois passionné et délicat des lèvres de ces filles, je me disais que comme je n’arrivais pas à m’imaginer être en couple avec une fille, ça ne comptait pas.

Pareil pour toute la pornographie lesbienne que je consommais. C’était juste des fantasmes, pas la réalité. Yeah, right.

Solitude et TikTok

Mais revenons au confinement. J’ai commencé à suivre plus de personnes LGBTQ+ sur les réseaux sociaux, je me suis inscrite à des applications de rencontres queer et lesbiennes. J’ai consommé de la pornographie queer et lesbienne, mais cette fois-ci, de la pornographie se situant hors du male gaze.

J’ai choisi de me définir comme queer, parce que pour le moment, c’est l’expression qui me permet de dire que je ne suis pas uniquement attirée par les hommes cis.

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Ça peut être surprenant, mais l’application TikTok a été d’une importance capitale dans la confirmation de ma queerness. Les différentes communautés LGBTQ+ qu’on y voit m’ont appris tellement de choses ! Déjà juste la visibilité de ces personnes, de constater qu’elles existent, que la queerness se présente, se vit et s’exprime de mille et une façons différentes a été comme une épiphanie pour moi. Je me suis dit que s’il y avait autant de façons d’être, d’aimer et de désirer, qu’il y avait sûrement de la place pour moi là-dedans.

J’ai choisi de me définir comme queer, parce que pour le moment, c’est l’expression qui me permet de dire que je ne suis pas uniquement attirée par les hommes cis.

Même si je suis arrivée crissement en retard à la fête, la réalisation et la confirmation du fait que je suis queer me rend vraiment heureuse. C’est un pas de plus pour mieux me connaître. Ce n’est pas un trait emprunté pour me définir dans le regard des autres. C’est quelque chose qui m’appartient, qui est vrai, qui existe en moi et qui est beau. Et ça me rend très fière.

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