Logo

Instagram, tu me fatigues

Dans la course aux likes, certain·e·s commencent à s'essouffler.

Par
Pauline Allione
Publicité

Remonter dans les algorithmes d’Instagram, c’est presque devenu un job à part entière. Il faut poster des publications, des stories, des Reels, organiser des lives… Quotidiennement, la machine a besoin d’être nourrie pour générer plus de likes, de commentaires, de partages. Chez les pros qui utilisent le réseau social comme une vitrine, la lassitude s’installe, et Insta commence à taper sur les nerfs. Fatigués de devoir tenir un rythme toujours plus effréné, ils sont plusieurs à dénoncer une plateforme trop gourmande en temps et en énergie, en plus de lisser les contenus.

« LES BONS POSTS, À LA BONNE HEURE, AVEC LE BON HASHTAG »

Sandrina, artiste textile spécialisée dans la teinture végétale installée à Lyon, n’avait au départ rien contre Instagram. Le réseau lui a même été franchement utile pour montrer son travail. « Moi qui aime mettre en scène mes créations à travers de belles photos, je trouve que c’est le réseau le mieux adapté… Mais avant, c’était plus simple ». Parce qu’avant, les algorithmes prenaient moins de place, et les fonctionnalités se limitaient à des posts et des stories. « On arrivait à créer du contenu avec plaisir sans que ça ne prenne trop de temps dans un programme déjà bien chargé pour un créateur, mais c’est devenu de plus en plus difficile », accuse la Lyonnaise. Depuis, le plaisir de poster a laissé place à la pression de la popularité de chaque intervention sur la plateforme.

Publicité

« En ce moment, j’ai juste envie de retrouver l’authenticité de ce réseau social comme il pouvait l’être au début, sans les photos aux filtres douteux », confie Amélie, community manager, rédactrice web et blogueuse mariage et lifestyle, connue sous le pseudo Amélie Queen. Son métier : alimenter les réseaux de ses clients pour leur créer une vitrine sur la Toile. « Les bons posts, à la bonne heure, avec les bons hashtag, des légendes qui appellent à l’engagement, assez de stories et des Reels pour brosser l’algorithme dans le sens du poil… C’est un vrai travail ! »

PLUS DE CONTENUS, MOINS DE SPONTANÉITÉ

C’est en suivant les conseils donnés par la plateforme et le mode opératoire de spécialistes comme Amélie, que Sandrina tient les rênes de son compte Insta. L’artiste suit des community managers et essaie de produire des contenus engageants pour sa communauté, dans l’optique de visibiliser ses créations. Mais plus le temps passe, moins elle arrive à suivre le rythme. « Comme je ne fais pas assez ou pas assez bien, j’ai l’impression que mon business n’est pas vu et que je vais me planter », résume-t-elle. Ces injonctions du réseau se répercutent d’ailleurs sur sa spontanéité, qui n’a aujourd’hui plus vraiment de place pour s’exprimer. « Je dois me montrer plus, parler de mes inspirations, de mes valeurs… Mais les “il faut faire ci” et “il faut faire ça”, ça me bloque ».

Publicité

Grégory Mignart, photographe professionnel, a un sentiment similaire. Fatigué de produire des contenus “instagrammables”, il a décidé de prendre de la distance avec le petit frère de Facebook. « On créé selon les codes issus des algorithmes et de l’esthétique de la plateforme au lieu de faire en fonction de nos convictions et de nos passions… J’ai l’impression que les contenus sont uniformisés pour nourrir Instagram ». Désormais plus détaché par rapport au nombre de vues et de likes que comptabilise chacun de ses posts, le photographe a décidé d’effacer toutes ses publications, pour repartir à zéro.

QUITTER LE GAME

Quand elle ne poste pas pour les marques pour lesquelles elle travaille, Amélie préfère également se tenir à l’écart des rouages d’Instagram. « Mon travail me plait mais pour mon compte personnel, je fais “tout ce qu’il ne faut pas faire”… Je n’ai pas du tout envie de jouer le game », pose la community manager. Pas franchement en phase avec la société productiviste et les réseaux sociaux qui demandent de performer toujours plus et toujours mieux, Amélie se fiche pas mal des likes et des followers lorsqu’il s’agit de son compte perso. En dehors de ses heures de taff, elle relâche la pression et n’a pas les yeux rivés sur ses notifications.

Publicité