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Hommes et paternité : les stéréotypes de genre persistent

Par
Bettina Zourli
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Cela fait plusieurs millénaires que l’on a attribué aux hommes l’espace public, politique et économique, et aux femmes l’espace privé et domestique, à cause d’une prétendue différence existentialiste qui se base sur … l’observation des parties génitales. Le pénis étant un membre apparent, qui grandit et grossit, et la vulve, un organe caché, sombre, replié sur lui-même, il était évident que les femmes n’étaient pas faites pour gérer la société (Elémentaire, mon cher ?).

Heureusement, les réflexions et combats féministes ont permis de nombreuses avancées, qu’il est toujours bon de rappeler : nous avons eu progressivement accès aux universités, au monde du travail, à la vie politique, et à disposer de notre corps presque comme nous l’entendons (dans les faits bien sûr, grâce à la contraception et l’avortement, la pratique est, toute autre, vous le savez certainement si vous avez un utérus).

Aujourd’hui, nous sommes de plus en plus nombreuses à être légitimes à mener de front famille et carrière, à désirer seulement l’un ou l’autre, ou bien même aucun des deux. Et même si les réticences et les désapprobations sont nombreuses, nous luttons chaque jour pour avoir le droit de disposer de notre corps comme bon nous semble, mais aussi de notre temps, de notre famille.

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Du côté des hommes, la route semble encore longue. D’une part, parce que si l’on encourage désormais fortement les femmes à investir ce qui a été attribué au genre masculin pendant des siècles, l’inverse n’est que très peu vrai.

C’est une discussion avec une journaliste, qui part dans quelques semaines en congé maternité, qui m’a mis la puce à l’oreille. A propos de son mari, elle m’explique : “Ses collègues, mais même des amis, lui font des réflexions sur son investissement dans la parentalité : « mais pourquoi tu vas aux préparations à l’accouchement, tu sers à rien le jour J, c’est pas toi qui accouches », ou sa boss qui a essayé de lui faire renoncer à son congé paternité en lui proposant de prendre ses congés normaux à la place, ou ses collègues qui lui promettent d’un ton menaçant « ah tu verras quand t’auras des enfants, plus rien n’est pareil, tout est compliqué, t’as plus de vie… » juste parce qu’eux vivent leurs gamins comme des fardeaux.”

Des hommes peu revendicatifs

Il est vrai que dans un monde qui a été pensé par et pour les hommes, ces derniers n’ont jamais eu à se battre pour faire valoir leurs droits. Il est également vrai que pour l’instant, le soin et l’éducation des enfants semble être encore peu valorisé et peu perçu positivement par la majorité des hommes. Ils sont néanmoins de plus en plus nombreux à revendiquer le droit à un congé paternité digne de ce nom et à du temps en famille. Le souci qui persiste est le besoin de militer en faveur de ce congé. Pour l’instant, mis à part la tribune lancée en juin 2020 par dix pères qui a permis de favoriser l’allongement du congé, les initiatives masculines sont encore rares.

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Le soutien des collectifs et militant.e.s féministes est lui bien présent : lors de cette tribune, qui s’était accompagnée d’un hashtag #1moisminimum, les partages du hashtag venaient principalement de femmes (ici sur Twitter, et sur Instagram), de féministes et d’associations féministes.

Si les hommes souhaitent VRAIMENT un congé paternité digne de ce nom, il est impératif qu’ils militent, qu’ils s’organisent et qu’ils revendiquent ce droit dans leurs entreprises.

Mais … les hommes sont-ils vraiment en faveur du congé paternité ?

En juin 2021, un sondage effectué par Génie des lieux sur un échantillon représentatif de 2906 salariés dévoilait des chiffres effarants : 61% des sondés affirment que le congé paternité n’est pas une bonne idée, alors que 67% des salariées interrogées affirment le contraire. Ils sont aussi 68% d’hommes à considérer que ce n’est pas un droit important.

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Pourtant, ils sont conscients d’une chose : 56% des hommes sondés considèrent que l’égalité entre les genres en matière de congé parentalité pourrait briser le plafond de verre, à savoir réduire les difficultés qu’ont les femmes à gravir les échelons en entreprise et recevoir les promotions.

Alors, comme d’habitude, “pas tous les hommes”, évidemment. Heureusement, certains pères de famille ou futurs papas sont en faveur de l’allongement du congé paternité et aimeraient même qu’il soit égal au congé maternité, et c’est tant mieux. Il reste maintenant que ces alliés féministes montent au front, dans les entreprises notamment, pour revendiquer un congé parentalité non genré, qui soit de six semaines pour chacun.e des parents, point barre.