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Halloween : pourquoi les hommes ne peuvent pas s’habiller sexy ?

C’est la fête la plus chaude de l’année, pourtant les options pour hommes restent assez conservatrices.

Par
Billy Eff
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Dans la prochaine semaine, vous allez croiser toutes sortes de gens. Des policières, des infirmières, des sorcières voire même des premières ministres. Mais avec des uniformes quelque peu différents : plus courts, plus moulants et qui mettent davantage d’attention sur le décolleté. C’est normal, les costumes d’Halloween sexys, chez les femmes, c’est devenu assez populaire. On peut même en acheter à la Foire Fouille.

Toutefois, n’essayez pas de trouver un costume de prêtre ou de mécano sexy. À moins que vous soyez prêts à aller dans un sex shop, et ce que vous y trouverez sera au final beaucoup plus kinky que sexy. Je vous rassure tout de suite, je ne me plains pas de l’existence des costumes sexy conçus pour les femmes, et je ne déplore pas non plus le manque de costumes sexy pour hommes. Je me demandais vraiment juste comment ça se fait qu’il n’y en ait pas.

Mais, au fait, d’où ça vient, la mode des costumes sexy ? Est-ce que Halloween a toujours été la fête la plus horny du calendrier chrétien ? Il s’avère que la réponse est : un peu, ouais !

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Les origines celtes de la Samhain

Dans la plupart des cultures agricoles, la transition entre octobre et novembre est importante, surtout au niveau des récoltes et des saignées. Dans ce qui est maintenant l’Irlande, l’Écosse et l’Angleterre, les celtes anciens avaient déjà la Samhain, qui correspond environ à Halloween, et marquait une différence entre la saison sombre et la saison claire. Une fois la saison sombre arrivée, le monde des mortels redevenait accessible aux esprits. C’était une grande célébration, avec tous les festins et feux de joie que ça implique, et plusieurs célébrants se déguisaient avec des fourrures d’animaux, des plumes et des cornes, en tentant de prédire le futur des uns et des autres.

Quelques siècles plus tard, les missionnaires chrétiens tentent de convaincre les Celtes de se défaire de leurs fêtes païennes, tout en leur concédant la Samhain et son symbolisme en en faisant la All Hallow’s Evening, la veille de la Toussaint, qui par usage devient éventuellement Halloween, tout simplement.

Trouver l’amour à minuit

Cette période de transition mystique entre le monde des esprits et celui des vivants n’était pas anodine : c’était un moment propice à la divination, à l’incantation et aux manifestations. Le moment idéal, donc, pour se souhaiter un.e partenaire de vie !

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Halloween était une fête où les jeunes célibataires pouvaient se réunir et, avec un peu de chance, préparer les unions qui auraient lieu au printemps suivant. C’est d’ailleurs de là que vient la tradition du jeu des pommes flottantes. Après la cueillette des pommes, quand les bacs en étaient pleins, les jeunes gravaient leur nom ou leurs initiales sur une pomme qu’ils mettaient à l’eau. On y plongeait la tête, en tentant de les attraper avec les dents. La tradition voulait que l’on marie la personne dont le nom figure sur la pomme qu’on attrape.

Hollywood, en particulier, alimente le phénomène du regard masculin, le male gaze, et les costumes, même pour des professions assez conservatrices comme infirmière ou religieuse, deviennent de plus en plus sexy.

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Une autre tradition un peu bizarre de l’époque impliquait *la* chose que les enfants aiment plus que les bonbons : le kale ! En effet, on se rendait en bande dans le champ du voisin à minuit, on se bandait les yeux, et on sortait au hasard une tige de chou-kale. On accrochait sa tige au-dessus de la porte de sa chambre, et on l’analysait le lendemain matin. Une tige très terreuse signifiait qu’on marierait une personne de bonne famille. Une tige au cœur bruni ? Votre partenaire aura un tempérament imprévisible. Une tige de kale longue et mince ? Vous allez marier un grand bonhomme ! D’autres traditions voyaient aussi le kale utilisé un peu comme on utilise aujourd’hui le gui, dans les traditions de Noël.

Bref, tout ça pour dire que la fête d’Halloween a toujours été assez romantique, voire carrément horny, comme célébration. Ces traditions ont fait que, peu à peu, la fête est devenue un moment acceptable, dans des sociétés d’habitude assez puritaines, pour que les jeunes gens s’adonnent au flirt et à la courtoisie.

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Nouveau monde, nouvelles moeurs

Alors que ces descendants celtes se mettent à immigrer massivement vers l’Amérique du Nord, ces traditions continuent d’évoluer, et, dans la période d’après-guerre, Halloween connaît un réel regain de popularité comme fête séculaire, boostée à grands coups de marketing par l’industrie du sucre et du costume. La tradition de se costumer prend alors son envol, si bien que des entreprises font fortune en ne produisant plus que des costumes d’Halloween. Au fur et à mesure que les mœurs s’adoucissent et que le concept d’autonomie du corps (surtout féminin) gagne du terrain,, les femmes se permettent de montrer leur corps un peu plus.

Hollywood, en particulier, alimente le phénomène du regard masculin, le male gaze, et les costumes, même pour des professions assez conservatrices comme infirmière ou religieuse, deviennent de plus en plus sexy.

Et ça correspondait avec le rêve américain de l’époque : l’homme se devait d’être fort, vaillant et travaillant, tandis que la femme se devait d’être serviable et attirante. Donc : costume de pompier pour les gars, bibliothécaire sexy pour les filles. Tout simplement. C’est le moment de l’année où la société permettait aux femmes de s’habiller de manière aussi sexy qu’elles le souhaitaient. Si un homme exprimait le désir de se sentir sexy dans son costume, par contre, ça aurait éveillé les soupçons.

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Satané male gaze

Porté par une femme, un costume qui laisse voir beaucoup de peau renforce un idéal féminin (à condition qu’elle soit conventionnellement jolie, of course). Montrer une grande partie de sa peau, en tant qu’homme, ça nous rend vulnérables, et, comme vous le savez, on est faits fragiles. Ce sont des généralisations, mais au contraire d’une femme, un homme à demi-nu dans son costume risque beaucoup plus d’être vu comme vulgaire ou carrément inapproprié. C’est d’ailleurs pourquoi le peu de costumes sexy pour hommes qui existent sont surtout vendus dans des sex shops: on a facilement l’air d’un mauvais figurant dans Magic Mike.

peu à peu, la fête est devenue un moment acceptable, dans des sociétés d’habitude assez puritaines, pour que les jeunes gens s’adonnent au flirt et à la courtoisie.

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On arrive donc à ce constat : un costume suggestif qui met de l’avant un décolleté, ou qui moule bien le corps (mince) d’une femme, c’est cool et ça plaît à tout le monde. Un costume de plombier qui mettrait de l’avant la bedaine d’un mec, personne veut voir ça. C’est pourquoi les hommes ont tendance à choisir des costumes qui sont encore plus virils qu’ils ne le sont eux-mêmes dans leur quotidien, genre en super-héros ou en bûcheron : des occupations qui renforcent des stéréotypes de masculinité et qui sont, eux, perçus comme sexy.

Bon, les choses seront certainement appelées à changer dans les années qui viennent, au fur et à mesure qu’on s’attaque aux constructions de genre. La communauté LGBTQ+ aussi a aidé à faire bouger les choses, en misant sur des costumes plus osés pour les hommes. Si Halloween a pu être important dans l’acceptabilité sociale du flirt entre jeunes personnes célibataires, dans l’émancipation des femmes et de leurs choix vestimentaires, peut-être bien qu’on pourra faire la même chose dans les costumes pour hommes. Qui sait, on verra peut-être dans quelques années des costumes de camionneur en crop-top !

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