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Face aux Antivax, les vaccinés se rebiffent

« La liberté des uns s'arrête là où commence celle des autres ».

Par
Daisy Le Corre
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« Tu en es déjà à ta deuxième dose ? Perso, je ne pense pas que je vais me faire vacciner. » C’est arrivé l’autre midi, sans crier gare, entre la poire et le fromage. Un collègue nous a fait part de ses doutes et de son scepticisme à l’égard du vaccin contre la COVID-19, quand bien même il reconnait que les vaccins et la science ont sauvé la peau de l’humanité plus d’une fois. « Non, mais je sais tout ça. Mais bon… » Cela ne lui suffit pas, a priori. Il lui en faut plus pour accepter qu’on lui « mette n’importe quoi dans le corps », comme il dit, croyant servir de « cobaye ».

Le soir de notre discussion, il nous a envoyé ceci :

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J’ai ri et j’ai flippé en même temps : comment peut-il être comme « eux » ? Eux, ces antivax qu’on imagine à mille lieues de notre traintrain quotidien. Qu’est-ce qu’on a loupé pour ne pas les voir venir « eux » qui sont aussi nos amis, nos soignants, nos parents, etc. ? Sur Twitter et ailleurs, certain.es internautes stressent à l’idée qu’ils nous fassent retomber dans un énième confinement, quand d’autres estiment que cette course à la vaccination met surtout en évidence l’échec de la démocratie et du libre arbitre.

Morceaux choisis.

« On a tellement intégré que le confinement était une mesure de restriction normale qu’on anticipe déjà le prochain et qu’on accuse les non-vaccinés d’en être les futurs responsables. Le climat actuel est détestable », estime l’essayiste Mathieu Slama sur Twitter. « Les accès autoritaires de certains autour de la vaccination, y compris chez les libéraux, montre à quel point notre effondrement démocratique est immense. Il n’y a plus aucun surmoi démocratique, on entre vraiment dans une période inquiétante », ajoute-t-il.

« J’ai fait votre vaccin de merde, je ne referai aucun confinement, que ça soit clair. »

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Julien Cadot, journaliste chez Numerama, résume bien ce qui se trame à l’horizon : « De plus en plus, la question va se poser : peut-on redétruire la vie sociale, économique du pays et la santé mentale des gens pour un virus qu’on sait maîtriser par un outil gratuit, efficace et accessible ? La balance bénéfice a changé par rapport à 2020. Si j’accepte en citoyen qu’un autre citoyen ait la liberté de ne pas se vacciner (et je l’accepte franchement), j’ai du mal à accepter que son choix individuel me pénalise en tant qu’individu soumis aux règles de la société française. »

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Nicolas est du même avis : « Par contre, si on a une quatrième vague et les restrictions de liberté qui vont avec parce qu’il n’y a pas assez de gens qui ont pris la peine de se vacciner, ça va être dur de rester consensuel. » Et il a raison, sur Twitter, ça gronde déjà très fort et ça crie à l’injustice. Tam annonce la couleur : « J’ai fait votre vaccin de merde, je ne referai aucun confinement, que ça soit clair. » Pareil pour Anto : « Demain, j’aurai reçu les deux doses du vaccin, ne me parlez pas de confinement fin juillet, c’est mort. »

Pour les personnes vaccinées, l’éventuel effondrement démocratique évoqué plus haut par Mathieu Slama, entre autres, n’est rien à côté de leur effondrement personnel. Ils ont choisi de se faire vacciner, pour eux et pour le bien de la communauté. Mais aussi pour retrouver leurs libertés individuelles quitte à faire payer le prix fort à celles et ceux qui ne voient pas la potentielle quatrième vague du même oeil.

« Je refuse d’être confiné à la rentrée à cause de cons qui ne veulent pas se faire vacciner. »

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Anne-Sophie refuse catégoriquement de retourner en confinement maintenant qu’elle est vaccinée. « Ils n’ont qu’à mettre le passeport sanitaire partout ». Même énervement du côté d’Alain : « Franchement, si c’est dû à la non-vaccination, je refuse de revivre un confinement pour faire plaisir aux antivax : c’est hors de question. »

Val, quant à elle, n’hésite pas à taxer les antivax d’irresponsables et refuse l’idée d’un quatrième confinement. Tout comme Richard : « Pardon, mais je refuse d’être confiné à la rentrée à cause de cons qui ne veulent pas se faire vacciner. Ça suffit l’irresponsabilité. »

Sur Twitter toujours, le hashtag #JeNeMeFeraiJAMAISVacciner met le feu aux poudres et embrase la toile. Tel un doigt d’honneur adressé à tous.tes les vacciné.e.s. « Je suis vacciné et je refuse de payer les tests à ceux qui partent en vacances ou en boîtes, je refuse un nouveau confinement, couvre-feu ou port de masque. Le #JeNeMeFeraiJAMAISVacciner est irresponsable ! », lance un dénommé Cyanure.

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« Si les gens ne veulent pas se faire vacciner et que le gouvernement refuse l’obligation vaccinale, alors advienne que pourra. Il serait de toute façon impossible de demander et d’imposer des mesures liberticides (confinement et couvre-feu) aux vaccinés », croit un autre internaute, au pseudonyme de Gauchiste.

« Je ne suis pas certain que les vaccinés vont accepter de faire beaucoup d’autres sacrifices. »

Dans le journal québécois La Presse, après un premier article intitulé Au pays des antivaccins, le journaliste Patrick Lagacé n’y est pas allé par quatre chemins pour prédire l’avenir proche. « L’enjeu dépasse les seuls récalcitrants. Il inclut aussi – surtout – ceux qui ont choisi de se faire vacciner, pour leur bien et pour celui de la collectivité. Car si les non-vaccinés peuvent faire du pouce impunément sur les efforts des autres… Pourquoi se faire vacciner, au fond ? Note de service au gouvernement : si les efforts de déconfinement sont bousillés par ceux qui ont choisi de ne pas se faire vacciner, s’il n’y a pas d’inconvénient dans le monde réel quand on rejette le vaccin… Je ne suis pas certain que les vaccinés vont accepter de faire beaucoup d’autres sacrifices. »

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Reste à voir si le gouvernement mettra les ressources pour rendre la vaccination accessible à tou.te.s. L’enjeu principal : aller chercher celles et ceux qui ne sont pas vraiment contre la vaccination, mais qui n’ont pas le temps ni les moyens de pouvoir recevoir leur dose. La politique de prévention doit se faire au plus près des personnes. Après tout, la santé publique n’est pas qu’une affaire de choix individuels et il en va de la responsabilité des ministres et du président de la République de donner aux Français.e.s l’option de se faire vacciner. L’avenir nous dira si la stratégie de cet été sera payante.