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Entrevue: Lykke Li crée sa propre voix

Une rencontre brève, mais fascinante, avec la chanteuse suédoise.

Par
Audrey PM
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Je suis prête à parier que 90% des gens de ma génération qui ont vécu une peine d’amour au cours des dernières années ont écouté au moins une chanson de Lykke Li pour s’adoucir le coeur.

Quand j’ai fui une rupture en Italie, j’écoutais Wounded Rhymes dans l’avion en pleurant et en me sentant comme dans un clip triste. Sa façon de raconter la douleur, les clins d’oeil au son Spector, sa voix laconique, son sens du mélodrame assumé: ce fut un album d’une grande importance pour moi.

I Never Learn fut pour moi un album de rémission, de promesses de jours meilleurs.

Et puis So Sad, So Sexy, l’album chill, qui glisse, qui me ramène sur la Highway 1 en plein soleil, qui fait surgir des images de palmiers californiens en haie d’honneur de chaque côté des rues. Un album qui fait respirer.

I Never Learn fut pour moi un album de rémission, de promesses de jours meilleurs.

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Alors voyez-vous, la perspective de rencontrer Lykke Li, même brièvement, m’excitait au plus haut point. «Make it count», que je me disais. Une telle occasion ne se représentera pas. De quoi parles-tu avec une artiste que tu admires et avec qui tu n’as que 10 minutes et après, fini, elle disparaît du réel pour ne revenir qu’en musique ou sur Instagram?

J’ai décidé d’être égoïste et de ne penser qu’à moi et de me gâter côté questions. Heureusement, ses réponses sont tout sauf insignifiantes. Voici donc 5 questions posées en rafale, juste avant un concert qu’elle donnait à Montréal.

La tristesse semble être une émotion qui t’intéresse particulièrement, dans le sens où j’ai l’impression que tu as exploré des milliers de ses nuances dans ton œuvre. Crois-tu que So Sad, So Sexy marque la fin de cette exploration ou sens-tu encore que tu as des choses à apprendre de la tristesse?

J’espère que c’est la dernière fois, sauf que je suis en train de vivre quelque chose de gros en ce moment, et là je me dis «Oh, pas encore!» Et là je me mets à penser à des paroles de chanson. Alors je crois que la seule façon pour moi de vivre ces émotions, c’est d’écrire.

Pratiques-tu encore la méditation pour créer?

En fait je médite pas tant pour créer, mais vraiment pour guérir.

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En fait je médite pas tant pour créer, mais vraiment pour guérir. Ça m’aidait à créer avant; il y a eu une très grande différence dans ma façon d’écrire lorsque j’ai commencé à méditer chaque jour.

Par exemple, je n’arrivais pas à terminer une chanson à la fin de la journée, mais en pratiquant la méditation, je pouvais écrire une chanson complète d’un seul élan.

C’est important, je crois, de faire confiance au fait que notre esprit est riche, et qu’on ne devrait pas avoir peur que notre créativité s’épuise.

La vibe hip-hop/R&B sur ton nouvel album semble nous rappeler que tu habites désormais à Los Angeles. Tu as aussi déjà dit en entrevue que ton album I Never Learn marquait la fin d’un cycle. Sentais-tu le besoin de déménager à L.A. pour débuter un tout nouveau chapitre de ta vie et de ton travail?

Je ne suis pas venue à L.A. pour la musique. Je suis venue parce que je voulais vivre là-bas. Stockholm est très petit et j’avais déjà vécu tout ce que je voulais vivre là-bas. Et ça donne toujours quelque chose d’intéressant [créativement] lorsque je m’immerse dans un environnement. Je crois que c’est un mélange des deux.

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Ta voix a énormément changé à travers ton œuvre. Au début de ta carrière, elle était cristalline, et aigue. Sur Wounded Rhymes et I Never Learn, elle semblait remplie d’émotions réprimées. Et maintenant, elle me semble plus profonde, plus groundée. Comment vois-tu l’évolution de ta voix?

Au début, je ne savais pas vraiment chanter. Je n’étais jamais allée dans un studio. C’est comme si j’avais pris le temps de trouver ma voix, en tant que femme. Je travaille beaucoup sur ma voix, je suis encore en train d’explorer. Et j’ai beaucoup d’insécurités par rapport à ma voix. C’est pourquoi je cherche constamment à mieux la définir.

Fais-tu encore partie de Liv? Avez-vous des projets à venir?

« J’ai beaucoup d’insécurités par rapport à ma voix. C’est pourquoi je cherche constamment à mieux la définir. »

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Liv, c’est plutôt un genre d’expérience artistique. Il n’y a pas de début ni de fin. C’est comme ça. On se rencontre régulièrement et on va sûrement faire quelque chose de nouveau, mais notre cycle créatif est bien différent. Les choses arrivent d’elles-mêmes.

Lykke Li s’est ensuite levée, prête à poser pour une photo. Mais en voyant le téléphone de ma collègue Barbara, elle a immédiatement suggéré de se prendre elle-même en selfie. «Je suis bonne en selfie», me dit-elle.

«Est-ce qu’on peut en prendre une ensemble?» ose-je (il paraît que c’est ça que j’ai dit; j’étais trop hors de mon propre corps pour m’entendre).

On peut d’ailleurs le voir dans ma face:

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