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Le 27 novembre 2020 sortait Stamina, le troisième album studio de Dinos. Après avoir livré Imany en 2018 et Taciturne en 2019, Dinos confirme sa place de rappeur de haute voltige. Chacun de ces opus a une vraie raison d’être et sa discographie prend de l’ampleur, d’année en année.
Appréciant l’artiste, j’ai décidé de me faire un cadeau à moi-même lors de la sortie de Stamina. Je me suis offert un moment, un moment suspendu où le temps s’est intercalé sur l’écoute de ses chansons dans l’ordre, les unes après les autres. Un luxe dont on oublie trop souvent la puissance.
Dinos est probablement l’une des plus belles plumes du rap français. Quand il parle de la vie, ses mots sont à la fois durs, forts, tranchants. Et terriblement beaux aussi. Marqué adolescent par L’alchimiste, best seller incontournable de Paolo Coelho, Dinos a su faire bon usage de ses mots et de sa voix.
Après avoir dévoré Stamina, je n’avais pas d’autre choix que de l’inviter à s’exprimer sur URBANIA histoire qu’on s’en mette davantage sous la dent. Il nous a dévoilé les anecdotes de cinq titres de l’album. Mais juste avant de rentrer dans le vif du sujet, on a fait un petit aparté avec Dinos sur le magnifique cover réalisé par le photographe Mister Fifou :
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« Cette pochette me plaît et me représente car elle symbolise l’endurance et l’importance de la force psychologique face à notre art. Si tu veux réussir quoi que ce soit dans la vie, le rap ou le sport, tu dois aller au-delà de tes limites et te dépasser. On avait que 24h devant nous pour trouver une idée, la réaliser et la livrer. On était dans une salle de boxe à Aubervilliers avec seulement une heure sur place à cause des restrictions du Covid. Chaud ! Et alors qu’on n’avait plus que 15 minutes de shoot, j’ai réalisé qu’il manquait un élément clé : la serviette éponge. Elle reflète selon moi toute l’imagerie de la boxe. J’en ai trouvée une in extremis armé de mon deux roues ! Le petit garçon que l’on aperçoit était déjà présent sur la pochette de mon album Imany. Il y a une vraie continuité », a confié Dinos.
Diptyque
« J’ai été si inspiré pour ce son qu’en 25 minutes tout était plié en studio. Dyptique est le premier morceau de ce nouvel album et à l’image des cinq premières minutes d’un film ou de l’incipit d’un livre, ce moment est charnière car c’est là que tout se joue avec l’auditeur.
J’aime me rappeler des intros classiques comme Tallac de Booba sur Panthéon ou encore The Ruler’s Back de Jay-Z sur The Blueprint. Et plus récemment l’incroyable STARGAZING de Travis Scott sur ASTROWORLD. C’est un truc de ouf les intros…
Bien que Diptyque n’ait pas été enregistré en premier et comme une intro, mon manager et producteur Oumar m’a conseillé de la mettre au tout début. Et honnêtement, il a bien fait ! »
Moins un (feat. Nekfeu)
« Ça faisait trois ans que Nekfeu et moi voulions composer un morceau ensemble mais les opportunités ne se sont pas présentées. Alors, quand j’ai commencé à travailler sur Stamina, je me suis dit que cette fois-ci, on ne se louperait pas. L’objectif était de kiffer et de le faire ressentir dans le son. Au début de la session studio, il était assis sur le sofa et il m’a dit « Envoie la mèche, envoie le feu », et je lui ai répondu : « C’est toi le feu, moi l’Dinos ». Le refrain était né. Et le reste a suivi tout naturellement. Super souvenir. »
Prends soin de toi
« Cette chanson a vu le jour lors de la dernière semaine du confinement saison 1. Ce titre parle d’une histoire d’amour terminée. J’ai commencé par faire une maquette… Mon manager Oumar l’a tout de suite adorée. Il trouvait que le « Prends soin de toi » au début du premier couplet était un super gimmick et que ça sonnerait bien comme refrain. Ça m’a tellement motivé. J’ai sorti quelques top lines de ma tête et hop c’était dans la boîte. »
Césaire
« Dans Césaire, il y a cette ambiance de paranoïa que l’on ressent dans tout l’album. J’ai cette crainte de me faire serrer par un proche. Dans le deuxième verset, je dis : « Regarde ceux avec qui je marche car c’est eux qui vont me tuer ». Le personnage qui me descend dans le clip est représenté par une femme mais en réalité, ça peut être aussi un ami. On a du mal à se dire qu’il y a des personnes de notre entourage qui veulent notre perte et pourtant la vie nous a souvent prouvé le contraire. »
93 mesures
« C’est la chanson que j’ai rêvé d’écrire toute ma vie. Et encore une fois, c’est une idée d’Oumar. Il m’a demandé de faire un morceau avec 93 mesures (ndlr : Dinos est originaire de la Courneuve dans le 93) incluant une outro. Je lui ai dit oui mais à moitié, un peu à reculons… Quelques temps plus tard, Oumar est passé au studio un peu par hasard et c’est là que je lui ai avoué n’avoir écrit que 75 mesures, que je n’avais plus rien à donner. Après en avoir découvert les premières mesures, il me jette à la figure : “Tu te rends compte ce que t’es en train de faire là, t’es en train d’écrire le plus gros morceau de ta carrière et tu vas t’arrêter pour quelques mesures ? Fais en 93 !” Heureusement, j’ai suivi ses conseils. Plus j’y pense et plus je me dis qu’il devrait être crédité sur les chansons de l’album (rires).
93 mesures est aussi un titre capital à mes yeux car il pose plusieurs problématiques. Lors des manifs contre la loi 24, il y a eu pas mal d’affiches reliées sur Instagram reprenant ma phrase “Chaque contrôle de police me rapproche de mon feat avec Tupac”, et ça me réjouit pas car j’aurais déjà très bien pu écrire cette phrase il y a trois, cinq ou dix ans. Le problème, c’est que beaucoup de nos phrases sont encore et toujours d’actualité. Ça en dit long sur notre monde en décrépitude… »