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Entrevue : Caballero & JeanJass – Plus sérieux en solos (ou pas)
La semaine dernière, j’ai eu la chance de rencontrer (virtuellement) un groupe de rap belge dont je connais très bien la discographie : Caballero & JeanJass. Scoop : ils sont aussi cool et drôles que vous le pensez ! Après avoir envahi l’Europe et même le monde avec un rap à la fois décalé, drôle, précis et musicalement très bien produit, ils ont collaboré avec des gros noms du rap français et belge. Dans la foulée, ils ont aussi sorti une émission, High & Fines Herbes, avec déjà 3 saisons et des millions de vues. Rencontre Zoom mémorable.
Avant d’entrer dans le vif du sujet : comment allez-vous ?
JeanJass : Ça va très bien ! Les albums ont l’air d’être bien accueillis malgré le contexte sanitaire. C’est notre deuxième sortie d’album pendant la pandémie. C’est sûr que c’est un peu frustrant mais on est quand même contents.
Caballero: C’est juste dommage de ne pas pouvoir faire de concerts, c’est sûr. On ne peut rien défendre en live… Mais on reste patients.
Vous venez de sortir un album solo en même temps. C’est juste pour le délire ou il s’agit d’un nouveau plan de carrière ?
JeanJass : C’est plus dans un délire de proposer une nouvelle formule. La référence c’était OutKast, aux U.S. Ça faisait un moment qu’on y pensait, on commençait à accumuler des sons, depuis 1 an ou deux, et on s’est dit qu’on pourrait faire comme eux : sortir un double album solo le même jour. Et là on arrive à ce bordel qu’est ce double album ! On est vraiment contents du résultat.
Caba : Oui c’est ça ! Pas de carrière solo en vue, c’est juste une manière de montrer à notre public ce qu’on est capables de faire, notre diversité aussi. Si demain JJ veut faire un autre projet avec 5 titres, il est capable de sortir un EP de 5 titres !
Très cool ! Avez-vous bossé les albums en même temps ? Ensemble ou chacun de votre côté ?
JJ : On a vraiment gardé cette idée qu’à deux, on était meilleurs. Même si on a bossé sur des sujets intimes, on s’aidait quand même beaucoup l’un l’autre. On a un regard différent, on se connaît très bien et on veut garder ça. On ne change pas une équipe qui gagne ! Ça arrive qu’on ne soit pas d’accord aussi, hein… Ça nous arrive de se dire d’aller s* f*** f***** ! (rires)
Ton album Caba, je le trouve rassurant, comme quand on retrouve un bon ami qu’on n’a pas vu depuis longtemps. On y retrouve des sons plus personnels avec des paroles profondes et des collaborations que tu as déjà faites dans l’album High et Fines Herbes : PLK et Luv Resval. Pourquoi ces deux-là ?
Caba : Vu que pour High et Fines Herbes, on avait quand même rassemblé la grosse grosse panoplie de rappeurs, je n’ai pas vraiment cherché. Pour High et Fines Herbes, on a un peu cherché et c’était pas facile à gérer avec des artistes déjà très populaires, avec des emplois du temps chargés comme Lorenzo ou encore Rim’K. Mais là, j’avais pas envie de me fatiguer, alors j’ai demandé à des personnes avec qui je m’entends bien, qui sont fortes et qui matchent bien avec mon style. D’où Luv Resval et PLK.
Parles-nous du son « Dr. Vous tous » où tu parles de tes deux grand-mères. Mais c’est aussi un hommage à ton public, c’est bien ça ?
Caba : Quand je me retrouve tout seul face à la création d’un album solo, j’ai envie de parler de choses que je n’ai pas l’habitude d’évoquer avec JJ. Je trouve que c’est le moment d’être introspectif et de parler de choses plus personnelles et intimes. Dans ce cas précis, je voulais clairement raconter et remercier mon public, le remercier de m’écouter. Il y a des gens qui payent pour ça, qui vont voir des psys, etc. Moi, j’ai la chance d’avoir une armée de personnes qui recyclent ma douleur et mes soucis avec moi. C’est donc une façon de les remercier et de leur expliquer que c’est vraiment une thérapie pour moi, comme quand je parle avec un psy. Ça se passe vraiment comme ça pour moi, sérieusement !
JJ : Et en plus, c’est nettement moins cher et économiquement, c’est plus rentable ! (rires)
Toi, JeanJass, c’est un album qui est plus intime : on te découvre, on apprend à te connaître davantage à travers tes sons comme « Qu’est-ce qui m’arrive », « Mains qui prient » ou encore « Berkane » en collaboration avec Nemir où tu parles de ton père. Qu’est-ce que ça te fait de te dévoiler comme ça ? Et pourquoi l’avoir fait ?
JJ : Cet album, c’est ce moment où tu te retrouves face à la page blanche avec des choses à raconter. Des choses à raconter sur nous. La famille, l’amour, etc : ce sont des thèmes qu’on n’a pas l’habitude d’explorer ensemble Caba et moi. On est potes, quand on se voit, on rigole, on s’amuse mais là c’est différent : tout seul, c’est plus sérieux. C’est comme si notre album solo, c’était notre musique “sérieuse”.
Tous les sons sont vraiment bons. Mais quel est celui que vous avez préféré produire ?
JJ: Le morceau le plus difficile pour moi ,mais qui me tenait à cœur, c’est « Berkane », celui sur mon père. Je voulais qu’il soit parfait à mes yeux. Je voulais parler de l’immigration mais de manière personnelle. Je voulais parler de mon père depuis un moment, et je sais qu’on est nombreux à être fils d’immigrants ou issus du métissage, je savais que ça allait parler aux gens. C’était pas douloureux mais difficile à produire. Je voulais prendre le temps, je suis revenu plusieurs fois sur certains passages, Caba peut en témoigner. j’ai longuement hésité pour le refrain. Heureusement, Némir était là et il a fait ça à la perfection. Mais oui, c’est un son difficile à faire, plus dur que des sons comme « Sur mon nom », ça c’est sur.
Vous gardez quand même votre humour dans vos paroles et c’est ce qu’on aime ! À Montréal, dans certaines soirées, on entend beaucoup passer vos classiques : « Californie », « Demain » ou encore « Sur mon nom » qui a même été repris Alaclair ensemble avec « Mets du respect dans mon bac ». Comment vivez-vous ce succès de l’autre côté de l’Atlantique ?
Caba : On est super contents ! C’est un vrai plaisir. Artistiquement, ça rend super heureux de savoir qu’on crée un son qui plait loin là-bas. C’est fou.
JJ : Y’a clairement une love story entre Caba JJ et, pas juste Montréal, mais le Québec en général. C’est comme s’il y avait un pont invisible entre la Belgique et le Québec, c’est sûr. Et c’est une place où on aimerait revenir. Si, un jour, on m’avait dit que j’allais venir jouer à Montréal : wow quoi ! La dernière fois c’était avec Vald à l’Olympia, c’était trop bien, ça me manque.
Je vous verrais bien produire un son avec eux d’ailleurs. Mais si vous deviez faire une collab avec un des rappeurs québécois du moment, qui choisiriez-vous ?
JJ: On a déjà fait pleins de collab : Loud, Rowjay, Jeune Loup, Freakey, mais y’en a aussi pleins d’autres comme High Klassified, Larry Kidd, etc. Mais si on avait l’occasion d’en refaire une, ça serait avec Rowjay, on le connaît depuis longtemps mais on ne s’est pas encore croisés au studio. Pour High et Fines aussi car c’est un entertainer de ouf.