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Élu mais pas en poste: Bernard Mounier, néo-maire en pleine pandémie

Il nous raconte son quotidien depuis les élections municipales.

Par
Agathe Beaudouin
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Ils étaient sur le pied de guerre, prêts à prendre le relais et à découvrir leurs nouvelles responsabilités d’élus. Apprivoiser la machine municipale, se plonger dans les dossiers et les affaires courantes. Répondre aux premières sollicitations et aux félicitations. Et puis, la pandémie est venue tout bousculer. Leur victoire est passée inaperçue et leur début de mandat reste coincé dans les starting-blocks : ils sont maires mais ne le sont pas encore.

Dans les confins des Cévennes, Bernard Mounier me confie, depuis sa maison où il est cloîtré, qu’il est l’un de ceux-là, élu au premier tour au soir du 15 mars, dans un contexte totalement inédit : le confinement. Élu mais pas en poste, puisque le premier ministre a finalement décidé de reporter l’installation des conseils municipaux, le nouveau magistrat n’allait pas pour autant rester les mains croisées. D’autant qu’il me l’avoue : il habite à 20 mètres de la mairie !

Dès le 16 mars, – et alors qu’aucune consigne particulière n’avait été passée depuis l’Élysée -, il a rencontré le maire sortant pour mettre en place une organisation mutuellement acceptée. Les deux hommes ont fait preuve de bon sens. « Il continue de se charger des affaires courantes. S’il y a des décisions importantes à prendre, il me sollicite. »

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Dans une mairie déserte, dans un village où seule plane l’ombre des platanes, le nouvel élu fait ses premiers pas… depuis son chez-lui. « C’est vrai que ce n’est pas du tout comme ça que l’on avait imaginé la prise de fonction. Officiellement, je ne suis même pas encore maire. »

Mais Bernard Mounier agit à sa manière. Puisqu’en période de confinement, le panneau municipal où sont affichées les informations importantes perd un peu sa raison d’être, le Cévenol a entamé une nouvelle manière de communiquer avec la population de cette commune rurale (300 habitants dispersées dans les petites montagnes). La page Facebook du village Les Plantiers prend vie, redonne les mesures de confinement à respecter, et remercie les commerces essentiels, qui deviennent, comme le personnel de santé, les organes vitaux d’un pays devant affronté l’ennemi invisible.

« On a l’impression qu’ici, on est épargné parce qu’on est isolé en temps normal, mais ce virus n’a pas de frontière. »

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Terre de résistance

Le boulanger, « épicentre du village », et le boucher, qui passe en camion, la station-essence qui sert aussi de dépanneur, sont des essentiels. L’une des conseillères municipales fraîchement élue, médecin de profession, est joignable H24 pour de la téléconsulation. « On a l’impression qu’ici, on est épargné parce qu’on est isolé en temps normal, mais ce virus n’a pas de frontière. » La vigilance est particulièrement de mise pour le personnel et résidents de l’Ephad de la commune.

Avec son équipe, Bernard Mounier a mis en place une visioconférence régulière et créé une chaîne de solidarité, qui tient souvent à un coup de fil, pour s’assurer que tout le monde s’en sort bien dans le village, ou « que la chaîne alimentaire est assurée pour tout le monde ».

Et puis, dès le confinement officialisé par le président de la République, le village a vu débarquer les nouveaux arrivants, ceux qui d’habitude viennent passer l’été au frais. De nombreux citadins (pour ne pas dire Parisiens !) sont venus se retrancher dans leurs maisons de vacances. « Les volets des maisons se rouvrent », constate-t-il, avec un enjeu en tête : « Faire en sorte que tout le monde a bien sa connexion internet ». Les Cévennes, terre de résistance durant les guerres – et c’est profondément ancré en elles et chez leurs habitants, fidèles à leur histoire, redeviennent zone de refuge et d’exil.

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Mars, avril… C’est en « temps normal » le moment où Les Plantiers sortent de l’hibernation, mais ce réveil est particulièrement inédit en 2020. Rester vigilant, attentif, c’est la mission que s’assigne ce néo maire, confronté à un étonnant dilemme : comment imaginer un rôle entre parenthèse mais en même temps vital ? En duo avec le maire sortant, Bernard Mounier reste aux aguets et rappelle aussi quelques conseils de base à tous ceux qui entament de nouvelles activités, confinement oblige : « Si vous faites du bricolage, attention, ce n’est pas le moment d’avoir un accident domestique ! »