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Défendre l’impardonnable : une grande tradition française
Pour Noël, Gérard Depardieu a reçu un joli cadeau : le soutien de 56 personnalités qui ont signé une tribune dans Le Figaro.
Nathalie Baye, Pierre Richard, Arielle Dombasle, Benoît Poelvoorde, Carla Bruni et… Afida Turner défendent l’homme accusé de violences sexuelles par une quinzaine de femmes : « Lorsqu’en s’en prend ainsi à Gérard Depardieu, c’est l’art que l’on attaque. »
Une déclaration d’amour qui s’ajoute à celle d’Emmanuel Macron et aux multiples envolées lyriques sur CNEWS, quelques semaines après le suicide d’Emmanuelle Debever qui avait déposé plainte pour viol contre le comédien.
Prendre la plume pour défendre un probable prédateur sexuel en oubliant la parole des victimes : un exercice de style qui est assez habituel dans la culture française.
Janvier 1977 : une soixantaine de personnalités signent une pétition écrite par Gabriel Matzneff défendant la pédocriminalité alors que débute aux assises un procès où trois hommes sont jugés pour avoir filmé des mineurs de 13 ans lors de différents jeux sexuels.
« Si une fille de 13 ans a droit à la pilule, c’est pour quoi faire ? », se demandent les signataires parmi lesquels Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir, Jack Lang ou encore Bernard Kouchner.
Dans le sillage de mai 68, la libération sexuelle n’a plus aucune limite morale. Plutôt que d’écouter les victimes, certaines médias préfèrent justifier la pédocriminalité.
En octobre 1974, alors que Gabriel Matzneff assure que coucher avec un enfant est une “aventure sacrée”, le critique littéraire Roland Jaccard décrit dans Le Monde un homme “diablement sympathique” qui “parle bien”.
Dans les années 70, des revues militent pour la pédophilie et s’insurgent de la justice qui ose poursuivre des adultes “qui aiment les enfants”, comme le relate longuement Le Monde dans un article consacré à cet “âge d’or” de l’apologie de la pédophilie.
Mais ce n’est pas qu’une question d’époque. En 2020, les Césars célèbrent Roman Polanski, poursuivi depuis 1977 aux USA pour le viol d’une ado de 13 ans. 10 avocates “féministes” signent alors une tribune dénonçant une “inquiétante présomption de culpabilité.”
Inculpé à Los Angeles, le réalisateur a fui les États-Unis pour la France avant la tenue de son procès. Depuis, une dizaine d’autres femmes l’ont accusé d’agressions sexuels. Pas de quoi inquiéter Polanski qui a bien été sacré meilleur réalisateur. “La honte” estime Adèle Haenel qui quitte les Césars en criant “Bravo la pédophilie”.
En 2017, l’affaire Weinstein et le mouvement #MeToo chamboulent le monde du cinéma et libèrent la parole des victimes. Ce qui n’enchante pas vraiment un collectif de 100 femmes, dont Catherine Deneuve, qui militent pour “une liberté d’importuner, indispensable à la liberté sexuelle.”
Aux Etats-Unis, le SNL s’amuse de cette prise de position typiquement française dans une parodie mettant en scène Deneuve et Bardot :
Cette année encore, on a vu le tapis rouge être déroulé pour réhabiliter Johnny Depp, accusé de violences conjugalespar Amber Heard.
Persona non grata aux USA, c’est une nouvelle fois la France qui s’est dévouée pour remettre en selle l’acteur après son procès lors de l’ouverture du festival de Cannes avec la réalisatrice Maïwenn. « Je ne connais pas l’image de Johnny Depp aux Etats-Unis », s’est justifié Thierry Frémeaux, délégué général du festival.
Il faut sauver le soldat Gérald
La tribune n’est pas un art réservé au monde du spectacle. En 2020, 167 parlementaires de la majorité montent au front pour défendre Gérald Darmanin, accusé de viol et nouveau ministre de l’Intérieur.
Et comme un seul texte ne suffisait pas, 200 autres élus se sont mobilisés pour soutenir Darmanin qui aurait été la “cible d’acharnements hétéroclites”. « Tous ceux qui le côtoient savent qu’il ne ressemble en rien à la personne clouée à l’avance au pilori », écrivent les édiles dans un style presque christique.
Malgré tout, les temps changent.
S’ils étaient environ 700 en 2009 pour soutenir Roman Polanski, ils ne sont plus que 56 en 2023 pour Gérard Depardieu.
À la différence près que l’acteur français a pu compter sur un soutien de poids : celui du président de la République.
D’après Le Monde, Emmanuel Macron a insisté auprès de l’équipe de C à Vous pour aborder le cas Depardieu lors de l’émission diffusée en direct sur France 5.
Une manière de séduire son électorat vieillissant pour qui il est tout à fait légitime de prendre la défense d’un agresseur parce qu’il joue bien Obélix.