Culotte : l’interview vrai ou faux

Dans Les Dessous la Culotte, deux soeurs – l’une autrice, l’autre illustratrice – nous racontent l’incroyable épopée de la culotte, de la Préhistoire à nos jours, en passant par l’Égypte antique ou le Moyen Âge. Ce bout de tissu désormais présent dans toutes les gardes-robe a tour à tour était objet de désir et de lutte politique. Remontez bien votre culotte, accrochez bien votre ceinture (de chasteté ou non), et laissez Laetitia et Eloise Gillard vous raconter tout ce que vous avez voulu savoir sur la culotte, et bien plus encore.

Culotte vient du mot français culot, dérivé de cul : vrai ou faux ?
Laetitia Gillard : C’est vrai ! Tous ces mots (culot, cul, culotte…) trouvent avant tout leur origine dans le mot latin culus, qui veut dire derrière. Le culot, dérivé du mot cul, désigne initialement la partie inférieure d’une chose, ou le fond d’un objet en relief et creux. Maintenant, le culot se rattache plutôt à l’idée d’aplomb, d’une personnalité qui ose, qui est culottée !
Éloïse Gillard : On comprend pourquoi la culotte s’appelle ainsi : il s’agit d’un dessous qui recouvre notre derrière tout en le contenant.

Les femmes préhistoriques portaient des culottes en poils de bison : vrai ou faux ?
L : Faux ! Enfin… On n’a aucune certitude qu’elles portaient des pagnes en peau de bête, car ces matières ne résistent pas bien au temps qui passe (on parle de plusieurs millions d’années, tout de même !). Alors des traces de culottes préhistoriques, on n’en a jamais trouvé ! Par contre, on sait que les Néandertaliens et les Homo sapiens utilisaient les peaux des bêtes qu’ils chassaient afin de se couvrir le corps.
E : Les chercheurs ont pu déduire que les hommes et les femmes de la Préhistoire se vêtissaient de ces cuirs, et même d’habits plus complexes. Des sculptures de personnages vêtus, des aiguilles, des fibres et d’autres objets liés à la fabrication des vêtements ont en effet été retrouvés lors de fouilles.
L : Par contre, le fantasme de la femme des cavernes, propre au cinéma des années 60, a véhiculé l’image de ces cromagnonnes en push-up et culotte léopard. Une esthétique totalement décalée, et alimentée par le male gaze… Mais ça, c’est une autre histoire, dont on parle dans l’ouvrage !

La première trace de sous-vêtement date de l’Égypte antique : vrai ou faux ?
L : On peut considérer ceci comme vrai, car il n’y a pas d’autres traces de sous-vêtements avant cela. Il s’agit d’un cache-sexe ou d’une sorte de pagne, nommé chendjit.
E : Il aurait été, au départ, surtout porté par les paysans.

Le subligaculum est un animal aujourd’hui disparu : vrai ou faux ?
L : Faux ! Le subligaculum, c’est une pièce vestimentaire qui date de l’antiquité gréco-romaine, et dont l’aspect se rapproche de nos fameuses culottes d’aujourd’hui. On en trouve un magnifique témoignage historique dans la mosaïque surnommée Femmes en bikini de la Villa romaine del Casale.
E : Il s’agit d’un dessous qui se portait tel quel, principalement lors des activités physiques, des spectacles, des luttes… Chez les hommes comme chez les femmes. Une façon, certainement, de mettre en valeur et de célébrer les corps musclés.

L’expression “Porter la culotte” vient du Moyen Age : vrai ou faux ?
L : C’est faux en partie, car cette expression remonte plutôt au XVIIe siècle, donc après le Moyen Âge. Néanmoins, il est vrai que son origine puise sûrement sa source dans l’héritage de la culture moyenâgeuse, et notamment dans le thème iconographique de la “lutte pour la culotte”. Ce thème aborde la place de la femme et de l’homme au sein du couple et du foyer, en symbolisant le pouvoir par le pantalon.
E : Les nombreuses représentations provenant de la “lutte pour la culotte” dévoilent que l’homme incarne l’autorité dans le couple, et que la femme qui ne reste pas à sa place met en péril l’équilibre du foyer et du monde. Le pantalon, qui avant s’appelait “culotte”, a longtemps été porté par les hommes uniquement, qui possédaient les pleins pouvoirs.

La culotte a fait son apparition en 1730 grâce à une certaine Mariette : vrai ou faux ?
L : Il s’agit d’une anecdote qui circule, mais il s’avère difficile de savoir si c’est une légende ou un fait avéré… Je dirais donc vrai et faux ! Mais pour la petite histoire, cette fameuse Mariette était issue du monde du spectacle et se serait retrouvée cul nu en déchirant malencontreusement ses habits lors d’une représentation…
E : … Ce qui aurait déclenché le port imposé du caleçon (pantalon de lingerie) chez les danseuses, pour cause de bienséance !

Le bon roi Dagobert avait vraiment mis sa culotte à l’envers : vrai ou faux ?
E : Il faudrait lui demander… Apparemment, le roi Dagobert Ier était un sacré coureur de jupons, alors il est probable qu’il ne la remettait pas toujours à l’endroit dans la précipitation…
L : Mais en réalité, cette chanson populaire qui date de la fin du XVIIIe siècle avait sûrement été écrite pour critiquer un autre roi, tout en se préservant des risques de censure, voire de représailles… On en dit plus dans le livre ! Mais bref : cette affirmation est plutôt à considérer comme fausse !

Longtemps la culotte a été réservée aux prostituées : vrai ou faux ?
L : C’est vrai, mais incomplet… Vers le XVIIIe siècle, la culotte commence à faire son apparition (sous la forme du pantalon de lingerie, ou caleçon, car la culotte telle qu’on la connaît apparaît plus tard) mais surtout pour des raisons pratiques et ciblées.
E : Elle revêt le statut de garante de la décence, et couvre majoritairement les fesses des sportives, des danseuses (coucou, Mariette !) et des prostituées…
L : Les femmes qui ne se retrouvent pas dans ces catégories rejettent le caleçon. De plus, selon elles, se couvrir les jambes pourrait laisser penser que ces dernières sont laides et infâmes à la vue. Tout cela discrédite le caleçon (enfin, l’ancêtre de la culotte, vous avez compris !), qui a bien du mal à s’imposer.
E : Alors du coup, on peut dire que c’est en partie vrai : les premiers dessous ont revêtu les entrejambes des prostituées. Mais pas que, comme on vient de l’expliquer !

Frederick Mellinger a inventé le string ET le soutien-gorge push-up ?
L : Oui, c’est juste ! Il débarque dans nos tiroirs de lingerie au début des années 80 (le string, pas Frederick !), et finit par s’imposer comme LE dessous sexy durant plusieurs années, avant de passer un peu de mode… Au profit de sous-vêtements plus commodes et confortables !

Vrai ou faux : on peut trouver des culottes de chasteté sur Internet ?
E : C’est tout à fait vrai : on en trouve aussi bien des artisanales fabriquées en peu d’exemplaires, que des Made in China vendues sur les sites de distribution…
L : D’ailleurs, ce mythe de la culotte de chasteté moyenâgeuse n’a jamais été confirmé ! Par contre, elle continue de nourrir les fantasmes des fétichistes ou de celles et ceux en quête de nouvelles expériences ! De toute façon, des culottes étranges, ce n’est pas ça qui manque : on en fait le tour dans le bouquin… Et c’est plutôt amusant et culotté !

Les Dessous de la Culotte est sortie aux éditions Les Insolent·e·s, et est disponible dans toutes les bonnes librairies

Dessins : Éloïse Gillard aka Eloze.