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Comment l’ émoji drapeau breton a réussi à s’incruster en masse sur Twitter
Depuis le 13 janvier, le « Gwenn ha Du » flotte sur Twitter. Mais… jusqu’au 9 février seulement. À durée limitée, on doit cette campagne de communication absolument géante à l’association .bzh et à la région Bretagne. Le but : faire buzzer l’émoji drapeau breton sur la plateforme pour qu’on le retrouve pour de vrai, ad vitam et ultra, sur tous nos claviers.
De mémoire de Bigoudènes, on n’avait pas vu un tel déferlement de passion pour la Bretagne depuis la ruée sur les kouign-amanns dans toutes les bonnes boulangeries d’Amérique du Nord. Depuis le début de l’opération, plus de 200 000 émojis du drapeau breton ont été générés sur la plateforme. Pour participer, il suffit de tweeter #emojiBZH ou #GwennHaDu pour voir apparaître le petit drapeau noir et blanc, le fameux « Gwenn ha Du ». Parce qu’on aime la Bretagne et par solidarité régionale (je suis d’Occitanie), j’y suis allée aussi de ma petite contribution !
Des tweets des quatre coins du monde (même du Japon!) mais aussi des soutiens de poids de people bretons comme PPDA, l’ex-star du 20H, les joueurs du Stade Rennais ou encore la cheffe cuisinière Nolwenn Corre sans oublier Loïc Henaff, le PDG des pâtés Hénaff.
Veillez toutefois à bien écrire #emojiBZH ou #GwennHaDu comme il faut sur votre fil twitter car sinon ça ne marche pas. Et c’est normal car l’émoji drapeau breton est introuvable en réalité sur nos claviers. Il faudrait d’abord qu’il soit approuvé officiellement par un organisme américain au nom très technique : le Consortium Unicode. Le Consortium, c’est un repaire d’ingénieurs geeks des GAFAM basé en plein coeur de la Silicon Valley. L’organisme est PUISSANT. Chaque année, il a le droit de VIE ou de MORT sur tous les symboles qu’on va retrouver sur nos téléphones. C’est une espèce de Dieu suprême des émojis. Une Haute-Autorité de standardisation informatique qui a le pouvoir de décision et qui fera en sorte que les petits pictos seront lisibles sur tous les devices de la planète une fois approuvés.
C’est pour cette raison que l’association .Bzh et la Région Bretagne remuent ciel et terre pour faire approuver leur émoji « Gwenn ha Du » auprès du Consortium Unicode. Et les Bretons sont têtus. Ce n’est pas une légende. Car ce n’est pas leur première tentative. L’histoire commence en 2017. Le Gwenn ha Du décroche la 2ème place du podium au Concours World Emoji Awards (ben oui, surprise, ça existe!) dans la catégorie de l’émoji qui n’existe pas mais que les internautes de la planète voudraient voir débarquer au plus vite sur leurs claviers. Juste derrière « le Yerba maté » argentin. (qui depuis 2019 existe chez Unicode). Dingo!
« Le dossier est actuellement en suspens comme beaucoup d’autres dossiers d’émojis drapeaux »
Dans la foulée, en 2018, l’association .bzh lance une pétition en ligne. « Bretons ou amoureux de la Bretagne, nous demandons à Google, Apple, Facebook, Samsung, Microsoft, IBM et Twitter de soutenir la candidature de l’emoji drapeau breton auprès du Consortium Unicode. »
Avec leurs 26 000 signatures en poche, ils déposent, en 2018 toujours, un premier dossier auprès du Consortium en se payant le luxe d’embaucher un lobbyiste pour faire pression sur les géants GAFAM.
« Le dossier est actuellement en suspens comme beaucoup d’autres dossiers d’émojis drapeaux », nous confie Loïz Fily, chef de projet émoji au sein de .bzh. « C’est ni oui ni non. Le Consortium nous a demandé de tester l’émoji sur un réseau social. C’est ce qu’on est en train de faire avec Twitter. On a aucun objectif de chiffres, juste continuer à mobiliser au maximum et pour le moment ça marche.»
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Faut savoir que pour faire approuver un émoji par le Consortium, c’est pas simple. C’est normal que ça marche pas du premier coup. Faut répondre à un tas de critères et prouver effectivement qu’une fois intégré, l’émoji en question sera extrêmement utilisé.
La campagne sur Twitter est donc une étape cruciale dans la longue lutte des Bretons vers la conquête des claviers de notre galaxie. Loïz Fily rajoute qu’ils ont dealé avec Twitter comme pour n’importe quelle autre opération de communication sur le réseau social (Coupe du Monde de foot, Oscars, Game Of Thrones…). Une cagnotte participative a même été lancée pour boucler le dossier et financer la communication (22 565€ déjà récoltés) mais impossible, en revanche, de connaître le montant exact du deal avec Twitter pour l’opération.
Mais au fait, pourquoi c’est si important d’avoir son émoji drapeau?
« Ça peut paraître drôle, anodin de faire une campagne pour un émoji mais les enjeux sont énormes. Notamment en termes de marketing. Il y a bien un drapeau gallois ou encore écossais chez Unicode. Pourquoi pas nous? Ça permettrait de diffuser l’émoji drapeau breton sur les 5,4 milliards de smartphones dans le monde. L’impact pour la région Bretagne et l’ensemble de ses acteurs, ce serait énorme. C’est une notoriété et une visibilité exceptionnelle », poursuit Loïz Fily.
D’ailleurs La Bretagne n’est pas la seule sur le coup. Ça se bouscule au portillon! Près de 5 000 territoires voudraient que leur drapeau intègre la sélection officielle du Consortium Unicode. Il a été question, à moment donné, d’un « émoji drapeau québécois », une pétition avait été lancée il y a deux ans, sans rameuter les foules. Qu’attendent les Québécois, pour la réactiver?! Une pétition pour un émoji Poutine initiée par les restaurants Valentine a eu un peu plus de succès l’an passé. Plus au sud, les Corses et plus récemment les Catalans qui viennent d’appeler à la mobilisation pour un « émoji drapeau catalan » sous le hashtag #emojicat sur Twitter auquel on promet déjà quelques difficultés confronté à la concurrence des mignonneries de chatons.
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La fièvre régionaliste ne fait que commencer sur les claviers!
La prochaine étape pour nos bretons préférés aura lieu au printemps. Un dossier réactualisé sera présenté en avril au Consortium Unicode en Californie. Verdict attendu : début 2021.
Kenavo! Chañs Vat!