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Chloé Hermary, la boss d’Ada Tech School qui casse les codes
Elle en avait marre de ne pas voir assez de filles développeuses dans la tech. À tout juste 25 ans, Chloé Hermary est déjà fondatrice et boss d’Ada Tech School, la première école de code informatique féministe et inclusive. L’établissement privé parisien, lové en plein coeur du Marais, a été lancé en octobre 2019.
Ada pour Ada Lovelace, comtesse British du 19ème à l’origine du tout premier algorithme sur terre. Joie ! Et oui, le tout premier programmeur de l’histoire était une femme. Depuis l’ouverture d’Ada, Chloé enchaîne les interviews: BFMTV, Europe 1, Le Monde… et nous, évidemment. Poussée par ma passion pour tous les acronymes « Html », « Cobol » et langages informatiques en tout genre (je suis nulle en code en vrai) et mon admiration de voir une fille d’à peine 25 ans monter sa boîte « girl power » dans un milieu truffé de nerds, j’ai décidé de la rencontrer via écrans interposés.
Au passage, on ne remerciera jamais assez les développeuses/développeurs qui conçoivent ces fabuleuses applications qui nous permettent d’échanger même quand on est à des années lumières les uns des autres.
« 70% des femmes en formation informatique affirment avoir déjà été victimes d’actes sexistes. Faut que ça bouge! »
Avant d’en savoir plus sur elle, Chloé fait son job. Elle tient d’abord à m’expliquer qu’une des premières missions d’Ada c’est de « dénoncer tous les clichés qu’on a sur l’informatique. Arrêter de penser qu’on doit être un « hard gamer » qui a démonté son ordi 10 000 fois à 6 ans tout seul. Notre école permet de lever un tabou: dire aux filles qu’elles peuvent s’orienter vers la tech et apprendre à coder. On a beaucoup de candidatures féminines (70%) mais pas que. Y’a aussi de la place pour les garçons chez Ada! »
Et elle a terriblement raison, seulement 10% de développeurs sont des femmes alors que la Tech explose. « Les débouchés sont énormes. 70% des femmes en formation informatique affirment avoir déjà été victimes d’actes sexistes. Faut que ça bouge! », insiste-t-elle. Quand elle était petite, Chloé voulait être véto. Rien à voir avec l’empowerment des femmes, ni avec les algorithmes (même si elle en connaît un rayon en programmation). Puis styliste. Encore moins. Après son bac, on l’oriente vers une école de commerce en lui disant qu’elle n’a pas la fibre artistique. « J’ai fait HEC à Paris. Ce qui m’a choquée, c’est qu’avant d’arriver à la fin de ma dernière année, c’était un peu la crise de sens. Je ne savais pas vers où m’orienter. Du coup, j’ai décidé de monter ma première boîte. Des formations para-scolaires pour aider les lycéens à se poser des questions sur leur orientation car je trouvais que l’école ne remplissait pas son rôle. On a beaucoup trop tendance en France à dire : c’est le savoir-faire qui compte sauf que ce qui va faire la différence dans une carrière c’est la capacité à rebondir, à savoir choisir. Plus un savoir-être qu’un savoir-faire finalement ».
L’Ecole Montessori du code
Alors elle s’est jurée de dépoussiérer le système éducatif traditionnel en misant sur les femmes dans la Tech et la formation. Son dada: la pédagogie alternative. Son inspiration? La méthode Montessori.
« Je voulais vraiment créer un modèle d’apprentissage qui favorise la confiance en soi, la gestion du stress, la capacité d’expérimenter, de ne pas avoir peur de se tromper et apprendre en faisant. Ces 4 piliers sont au coeur de l’apprentissage de l’école Montessori. Un pédagogie alternative pour les maternelles. Y’a pas de cours. Tout se fait en faisant. Et il s’avère que le code valorise par-dessus tout ce mode de pensée. »
Et Chloé a su séduire avec son école d’un nouveau genre puisqu’elle a réussi à lever 490 000€ en très peu de temps pour monter Ada dont plus de la moitié proviennent d’investisseurs privés.
« C’était à l’opposé de mon éducation de créer une boîte. Mon père est pilote d’avion, ce qui est assez drôle car c’est un métier qui adore la procédure et déteste le risque. Ma mère était dans une agence de pub et a quitté son boulot au même moment où j’ai monté Ada pour créer un centre de Yoga et de bien-être à Bordeaux. »
Avant de faire le grand saut à 25 ans, elle me raconte avec jubilation qu’elle a même écumé les salons d’étudiants avec des faux flyers d’Ada pour tester s’il y avait vraiment une demande. « Plein de filles me disaient, “une école de code pour nous c’est super, on valide carrément! C’est tellement fatiguant de n’être que 4 dans la classe et de se prendre sans arrêt des remarques sexistes”. »
Quand elle aura 30 ans, Chloé se verrait bien avoir monté 3 écoles comme Ada en Europe. Elle est bien partie pour…
Avant de la quitter, elle me livre un conseil pour les nuls en code qui, comme moi, veulent quand même s’y frotter : « La première chose: déconstruire ton mode d’apprentissage. 80% du temps d’un.e développeur consiste à essayer des choses et à reconstruire. Ta première ligne de code elle peut se faire en 3h. » Allez go, on s’y met !
Zoom sur Ada Tech School
Dans la première promo d’Ada, il y a 9 filles et 5 garçons. Moyenne d’âge entre 19 et 25 ans. Aucune limite d’âge. Pas d’obligation d’avoir son bac non plus pour s’inscrire. L’école est reconnue par l’Etat, pas encore le diplôme. On y apprend pendant deux ans, le code comme une langue vivante (Oui je sais, ça paraît fou pour ceux qui sont nés bien avant 1990). Et pas besoin d’avoir fait Maths Sup. ou Maths Spé. pour coder. C’est un peu cher : 8000 € par an, mais avec une deuxième année en alternance prise en charge par l’entreprise. Prochaines promotions : avril et octobre 2020.