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Ces jeux vidéo qui n’auraient jamais dû exister

Comme celui sur le Puy du Fou. Qui veut vraiment passer ses soirées à faire semblant d'être Philippe de Villiers ?

Par
Benoît Lelièvre
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Dans une ancienne vie, j’étais testeur de jeux vidéo.

Oui, c’est un boulot quand même génial. Non, ça ne consiste pas à jouer à la console toute la journée et donner son opinion à des scientifiques derrière un miroir sans tain. Ce genre d’activité existe bel et bien, mais c’est bénévole et les listes d’attentes par participer sont longues. Pendant ces dix-huit mois, j’ai appris beaucoup plus à propos des mauvais jeux vidéos que des bons. J’y ai aussi découvert le marché des jeux-vidéo-bon-marché-opportunistes bâclés en quelques semaines ou quelques mois à l’aide de firmes de sous-traitance louches basée en Russie.

Sans blague, il existe vraiment tout un marché destiné aux jeux vidéo destiné aux achats impulsifs, aux parents bienveillants qui n’ont aucune idée de ce qu’ils font et aux plus bas instincts de l’humanité en général. C’est probablement à une de ces tranches de la population que s’adresse le nouveau jeu vidéo basé sur le parc médiéval Puy du Fou, qui sortira au printemps 2022. Qui veut vraiment passer ses soirées à faire semblant d’être Philippe de Villiers ?

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Inspiré par cette nouvelle, je me suis permis de vous présenter une liste plutôt exhaustive des idées les plus fâcheuses de l’histoire des jeux vidéo. Avant de commencer, laissez-moi vous expliquer les règles:

– Le jeu doit être d’abord et avant tout une MAUVAISE IDÉE. Qu’elle soit de mauvais goût, ridicule ou simplement difficile à adapter au médium.

– Le plus emmerdant à jouer, le mieux.

– Les bugs et la jouabilité ne sont pas un critère. Si un jeu peut devenir passable à l’aide de programmeurs plus compétents, il ne m’intéresse pas pour cette liste.

– Le moins possible de jeux indépendants, parce que 1) c’est pas chic 2) ils se font souvent un point d’honneur d’être bizarre et difficiles.

Donc, sans plus tarder…

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Custer’s Revenge (Atari – 1982)

Il fallait que j’en parle. La mère de toutes les mauvaises idées interactives. Petit cours d’histoire 101: le général George Armstrong Custer a été défait par les tribus Lakota de Sitting Bull à la bataille de Little Big Horn et dans Custer’s Revenge, le général prend sa revanche en… violant des femmes Lakota à répétition. Ouais, c’est la seule action demandée au joueur dans ce « jeu ». Violer des femmes nues, attachées à un poteau.

Je ne voulais pas en parler au départ, parce qu’il s’agit vraiment d’un jeu de merde, fait par des gens de merde, visant des consommateurs encore plus merdiques… mais, c’est tellement devenu un symbole historique important d’idiotie corporative que cette liste n’aurait pas été complète sans son inclusion. Heureusement, personne n’a aimé Custer’s Revenge à l’époque non plus et la compagnie de production Mystique (spécialisée dans les jeux pornos) fit faillite un an plus tard.

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C’était la première et dernière fois que je parlais de viol dans cet article, promis.

Chiller (Nintendo – 1990)

À la base un jeu d’arcade, Chiller a été victime de la technologie rudimentaire de son époque, du manque cruel d’imagination de ses concepteurs et visiblement d’un budget squelettique. Ne vous fiez pas à la pochette qui semble toute droit sortie de la discographie d’Iron Maiden, ce jeu n’a rien d’excitant. Il s’agit de 4 tableaux simples où, armé du pistolet Nintendo, vous devez tirer sur des gens… attachés dans un salle de torture.

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Pas de blagues. Le but n’est pas de réussir à tous les tuer, mais bien d’essayer de les tuer le plus rapidement possible et de la manière la plus sanglante. Non seulement il faut être un peu mort à l’intérieur pour prendre plaisir à tirer sur des gens incapables de se défendre, mais le jeu de présente presqu’aucun défi. Une partie du plaisir que procure un jeu vidéo vient du sentiment de satisfaction qu’on ressent en maîtrisant une tâche et Chiller n’en procure aucun.

À sa décharge, Chiller offre un peu grand éventail de créatures qui peuvent riposter plus tard dans le jeu, mais ce n’est jamais vraiment plus difficile. On s’en sort en dix minutes environ, avec le vague sentiment d’avoir perdu son temps et une petite partie de son humanité.

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Night Trap (3DO, Sega CD, PC – 1992)

La technologie FMV (full motion video) a été une révolution dans le monde du jeu vidéo pendant environ 38 secondes. Originalement conçue pour les arcades, elle permettait d’interagir avec des acteurs ayant préfilmé une foule de scènes en réaction à chaque décision potentielle du joueur. À l’époque, j’avais neuf ans et je croyais que les jeux vidéo avaient atteint leur apothéose. On ne pouvait pas faire mieux que d’interagir avec des vraies personnes, non ?

Le jeu Night Trap m’a rapidement ramené sur terre. C’est un exemple classique d’une compagnie de production voulant être la première à capitaliser sur une nouvelle technologie sans trop savoir comment s’en servir. Night Trap raconte l’histoire de jeunes filles ayant disparu dans des circonstances louches dans la maison d’une famille riche et d’une équipe tactique mandatée pour les retrouver. Ça sonne prometteur ? Attendez, j’ai pas fini…

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Le hic, c’est que la famille refuse de vous laisser fouiller la maison, donc vous devez enquêter… à l’aide d’un système de caméra relié à des “pièges” supposés capturer de potentiels intrus. Bref, c’est comme avoir un boulot de gardien de sécurité. Sauf que vous déboursez 49,95$ au lieu d’être payé. Le plaisir vient du côté voyeur bien assumé du jeu plutôt que quelconque interaction de la part du joueur. Night Trap, c’est un peu comme regarder un film de porno soft vraiment mal écrit.

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Seaman (Dreamcast – 1999)

Celui-là est extrêmement bizarre. Encore une fois, l’idée derrière Seaman était de monter un projet faisant l’usage d’une nouvelle technologie: l’usage d’un microphone intégré. Seaman, n’est pas vraiment un jeu. En tout cas, pas dans le sens conventionnel du terme. C’est plus comme une version jeu vidéo d’un Tamagotchi, cette petite bébête virtuelle qu’il faut nourrir, aimer et entretenir chaque jour. Sauf que…

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Votre petite bébête mignonne, c’est un homme poisson mutant avec la voix de Leonard Nimoy, Mr. Spock lui-même. En plus d’avoir à nourrir ce truc, il FAUT LUI PARLER. TOUS LES JOURS, SINON IL MEURT. À l’époque, Seaman avait été très bien reçu par la critique, mais je doute fort que personne n’y a joué plus de deux jours en ligne. Les jeux vidéo, c’est supposé aider à oublier nos responsabilités. Pas à en rajouter. Surtout pas celle de prendre soin d’un mutant qui nous insulte si on ne fait pas notre boulot à son goût.

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Super Columbine Massacre RPG! (PC – 2005)

Malheureusement, ce jeu est exactement ce dont il a l’air. Scripté, réalité et codé entièrement à partir de la plateforme gratuite RPG Maker par Danny Ledonne, Super Columbine Massacre RPG! est né de bonnes intentions. Ayant été lui-même rejeté à l’école, Ledonne a recréé le parcours d’Eric Harris et Dylan Klebold pour essayer de comprendre si lui-même aurait fait les mêmes choix qu’eux. À la base, ça se voulait un exercice de réappropriation d’un trauma collectif. Sauf que le produit fini avait de tout, sauf de quelque chose de positif.

On ne peut pas vraiment faire de choix dans Super Columbine Massacre RPG! a part celui de se diriger vers la bibliothèque dès le début et de se suicider sans tuer personne. Les critiques furent virulentes et compréhensibles. Un jeune homme ayant perdu une amie dans le massacre affirmait au Washington Post: « Maintenant tout le monde qui jouent à ce jeu vont pouvoir la tuer encore et encore. » Il a quand même un très bon point.

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Super Columbine Massacre RPG! romantise beaucoup trop les actions des tueurs de Columbine, leur offrant un niveau supplémentaire en enfer après leur suicide et la possibilité de se transformer en démons. Si vous être encore accrochés sur l’idée qu’Eric Harris et Dylan Klebold ont commis l’irréparable parce qu’ils étaient rejetés et incompris, je vous invite à lire Columbine, de Dave Cullen. Ça va vous faire passer le goût de les prendre en pitié.

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Who’s Your Daddy (PC – 2015)

Angoisses parentales: le jeu. En toute transparence, j’ai déjà joué à Who’s Your Daddy? et j’y ai pris beaucoup de plaisir. Je n’ai pas d’enfants aussi. Le principe est simple: deux joueurs, le premier joue le papa et le deuxième joue bébé. L’objectif de papa est d’assurer la survie de bébé est de mourrir le plus rapidement possible. Bébé finit toujours par mourrir, on joue pour déterminer quand et comment.

Électrocution, noyade, chute dans les escaliers, les possibilités sont infinies et croyez-moi, lorsque vous jouez papa, le stress est intense. Personne ne semble avoir été offensé par la parution de ce petit jeu indépendant plutôt original. Il a eu même droit à un remake en 2020. Je ne vois cependant pas comment des parents peuvent avoir beaucoup de plaisir avec Who’s Your Daddy? Surveiller un marmot est une source constante d’anxiété, ça doit être très difficile de dormir après s’être claqué quelques parties en soirée.

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Shenmue 3 (Playstation 4, PC – 2019)

À la base, Shenmue est un jeu qui divise. Si certains (dont moi) vantent son réalisme et son attention au détails, d’autres trouvent ça violent d’avoir à conduire un transpalette toute la journée dans un jeu qui simule la vie en temps réel où il faut tenir un emploi pour gagner de l’argent et progresser dans certaines parties du jeu. C’était pas ma partie préférée du jeu, mais en même temps, ça donnait un caractère spécial aux événements importants.

Les raisons pour lesquelles Shenmue 3 était une mauvaise idée sont existentielles. Les mécaniques sont poussées à l’extrême: il faut manger à chaque repas sinon on perd de l’énergie, on doit enlever ses souliers avant de rentrer dans la maison, on doit regarder Shenhua nous dire au revoir à chaque fois qu’on sort, le niveau de banalité devient aliénant très vite et le jeu est très long. Non seulement, on a l’impression de jouer à un simulateur de vie, mais à un simulateur de vie plus ennuyante que la nôtre.

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La mauvaise idée ici était de ramener une série qui avait laissé un excellent souvenir pour la transformer en simulateur de journées chiantes.